Marie-Aude a un peu vocation à soigner, du moins les âmes en n’hésitant jamais à traiter des sujets qui défendent toutes les différences. Rien d’étonnant à ce qu’elle ait, comme Sauveur, l’esprit de famille et l’envie d‘utiliser la fabrication d’histoires à des fins thérapeutiques.
Son frère Lorris Murail n’écrit plus depuis plusieurs années parce qu’il en est empêché par la maladie. Mais quand sa soeur lui propose de s’y remettre avec elle, alors que la France se confine et se calfeutre il y voit sans doute l’occasion de s’évader. Les voilà tous les deux en cavale (imaginaire) dans cette ville du Havre qu’ils connaissent au coeur puisque c’est celle de leur enfance. Un plan suffira à raviver leurs souvenirs et garantir la vraisemblance.
Ce n’est pas la première fois qu’ils vont écrire ensemble (et Marie-Aude a aussi écrit avec sa soeur Elvire). Ils se mettent vite d’accord sur le genre, policier, et si l’une construit le scénario chaque jour chapitre après chapitre, lui les dicte chaque nuit à sa machine pour que sa soeur puisse en prendre connaissance quelques heures plus tard, alors qu’il est dans un sommeil récupérateur. Ils s’appellent en fin de journée pour échanger, se mettre d’accord sur les modifications et surtout continuer, encore et encore.
Voici le premier d’une nouvelle série (car série il va y avoir, ils nous le disent eux-mêmes à la fin du premier en nous offrant même le titre du deuxième, Souviens-toi de Septembre).
Angie ! se déroule entre le port du Havre et le quartier des Neiges, théâtres de trafics en tous genres qui relient une galerie de personnages si vivants qu’on a le sentiment de les voir en chair et en os. Il y a d’abord la jeune Angie Tourniquet, 12 ans, qui porte le prénom d’une célèbre chanson créée en 1973 par les Rolling Stones. Elle impulse régulièrement des rebondissements et son énergie marque ce premier tome. Elle se révèle la coéquipière futée du capitaine Augustin Maupetit, cloué (pour le moment), sur un fauteuil roulant et bien obligé d’avoir des alliés pour mener une enquête délicate.
Il s’appuiera sur son chien Capitaine, sur sa commissaire Alice verne, sur la fantaisiste tante Thérèse, et ses capacités de médium, sur la mère d’Angie, infirmière de son état. Leurs aventures se dérouleront alors que la France entière subit ce drôle de virus venu de Chine dont on aurait estimé l’apparition un peu exagérée si elle avait été le fruit de l’imagination des auteurs.
En tout cas situer cette intrigue policière en pleine pandémie lui donne un air familier tout à fait intéressant. On y croit plus que jamais. On vibre pour que tout se termine bien, surtout quand on sait le préliminaire que court la jeune Delphine (qui porte le même patronyme que moi mais qui n’est pas de ma famille). Et on attend la suite avec impatience.
Nous serons comblés puisque non seulement le numéro 2 est achevé mais je peux vous dire que Marie-Aude a déjà lancé le troisième. Comme beaucoup d’entre nous cette période de « confinement » aura été un formidable terrain d’évasion. Et surtout une occasion insensée de travailler énormément.