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Cow-Boy, de Jean-Michel Espitallier (éd. Inculte)

Publié le 23 mai 2021 par Onarretetout

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« Au fond, c’est compliqué de raconter des choses qui d’habitude ne se racontent pas. »

Et c’est à quoi Jean-Michel Espitallier se livre ici. Il y a le très très ancien, où il n’y avait personne et puis il y a eu Eugène. Qui traverse l’océan comme d’autres l’ont fait à la même époque, pour gagner l’Amérique et y faire fortune. Et l’auteur en nomme quelques-uns. Le train jusqu’à Paris, un autre train jusqu’au Havre, le bateau, un autre train jusqu’en Californie. Tout ce qu’il y a à voir ! Et quelle histoire ! Pendant le séjour d’Eugène, l’Amérique se peuple d’Européens qui accaparent les terres. Et l’auteur fait une liste d’évènements recensés au début du XXe siècle : phrase après phrase, meurtres racistes, répression de grèves, incendie de fabrique, morts de mineurs, assassinats, passages à tabac, naissance de futurs artistes, accueil de Marcel Duchamp, publications de livres, toutes sortes d’évènements présentés chronologiquement sans y mettre de priorité. Mais peut-être qu’Eugène n’en a pas eu connaissance, lui qui garde les vaches dans des espaces infinis. Et l’auteur liste les noms européens donnés aux villes des États-Unis, comme si les immigrants y exprimaient le mal du pays d’origine. La nostalgie peut-être a conduit Eugène à retourner dans les Hautes-Alpes. Où il se mariera et aura des enfants, un fils aîné, père de l’auteur de ce livre, et des jumelles. Comme s’il était revenu pour cela : se marier et avoir des enfants. Il n’atteindra pas l’âge de 50 ans. C’est l’homme de ce voyage aller-retour, dont on ne sait presque rien mais dont Jean-Michel Espitallier dessine un portrait qui est celui d’une époque, de cette époque d’où nous venons, cette époque qui précède celle que nous vivons à présent. Eugène, dont on ne sait pas grand chose, vit encore à travers les souvenirs parcellaires de l’enfant jouant aux cow-boys et aux Indiens, connaissant la liste des tribus indiennes qui occupe plusieurs pages. Ces listes (candidats au départ de l’Europe, évènements américains du début du XXe siècle, noms des villes, noms des tribus) rythment le livre qui s’achève dans le silence après tout ce fracas et tous ces paysages. 


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