Elle aurait dû savoir, appelons là l'infirmière Ratched, que chez les autochtones, les liens avec le passé sont importants.
Miss Ratched aimerait bien reculer dans le temps. Sous le prétexte qu'elle aurait été fatiguée et croulant sous une certaine pression, ce qui ne peut qu'être vrai puisque les infirmières sont probablement les travailleuses qui bossent le plus fort en temps de pandémie, l'infirmière filmée par la défunte patiente Joyce Echaquan, lui scandait les infâmes phrases "T'as faites les mauvais choix, ma belle" et "De quoi tu pense que t'aurais d'l'air face à tes enfants si ils te voyaient?", ou quelque chose s'en rapprochant.
Ces 7 enfants ont vu maman mourir.
C'est fameusement odieux. Fatiguée pas fatiguée. La première phrase suggérait très fortement que Joyce était une droguée. Autochtone= droguée, c'est le lien raciste. Mais ses maux de ventres étaient reliés à une intolérance à ce qu'on lui donnait à l'hôpital. Qu'elle tentait de leur faire comprendre que son corps ne tolérait pas. Mais Joyce ne parlait ni français, ni anglais. Ce serait un élément destructeur de l'incommunication fatale de terrible soir de 2020. Joyce allait gémir en tentant de leur faire comprendre que son corps ne supportait pas ce qu'on lui donnait, et on non seulement on lui administré quand même, mais on l'a fait trois fois. Et Joyce en est morte.
Pendant qu'elle agonisait, elle a eu l'excellente idée de faire oeuvre utile. En fait, c'était probablement pas une idée autant qu'un instinct de survie. Elle a filmé de son téléphone sa mort. Ce qui a capté les voix de deux infirmières, excédées, dont l'une, miss Ratched, qui dira les phrase odieuses nommées plus haut. Elle a dit pire. Elle a dit qu'elle n'était que bonne pour le sexe, (peu importe ce que ça veut dire), stupide, un embouteillage au système de santé Québécois et probablement mieux morte. Son voeu a été exaucé. Des mots qui reviennent la hanter.
Miss Ratched a été limogée et on l'a entendu en cour cette semaine, ajouter à l'odieux en disant que ses propos étaient des propos de "bienveillance" afin qu'elle "s'améliore" . Jugement toujours faible de la part de l'ancienne employée de Joliette qui a provoqué l'ire de la coroner, qui a été raide en disant à son tour cette chose brutale (mais vraie) "Ça? vous dites que c'est dit avec plein d'amour? c'est plein de jugement!".
La coroner a été réprimandée à son tour pour cette échappée verbale. Elle devrait s'en expliquer mardi prochain, a-t-on annoncé.
Reste qu'au final. les autochtones qui sont forcés de se rendre au triste hôpital de Joliette, ont toujours très peur. Ils savent qu'ils y seront jugés avant même de parler de leur malaise hospitalier. Le racisme, quoiqu'on en dise, envers les autochtones y est systémique. Mais ce n'est pas ce qui est en procès. Ce sont le degré de responsabilité des infirmières dans les erreurs humaines, trempant dans l'inhumain, qui ont mené à la fin largement inhumaine de la jeune femme de 37 ans. Qui avait mal au ventre en raison de la morphine à laquelle elle était allergique et que l'hôpital lui administrait au moins trois fois, pas des drogues d'ailleurs. Des drogues de l'intérieur. Elle était à l'hôpital, diabétique et avec un pacemaker pour son faible coeur.
Une citoyenne, un mois plus tôt. qui visitait ce même hôpital pour venir tenir compagnie à son père souffrant d'Alzheimer, a vu Joyce se plaignant aussi d'à peu près la même chose. Gémissant et se faisant dire "Mais va-t-elle finir par se la fermer?" par une infirmìère, ou encore davantage, vivant principalement de l'indifférence de tous les employés sur place. Malgré ses gémissements. La citoyenne a fini par s'en approcher pour demander à Joyce si elle pouvait, elle, faire quelque chose pour l'aider, mais une employée de l'hôpital lui a vivement suggéré de se mêler de ses affaires.
Mais on ne critiquera pas Winnipeg aussi sévèrement
Des affaires humaines, dans un département dénudé de cette présence certains soir dans l'hôpital de Joliette.
Ça a été suffisant pour le reste du Canada, le même qui dit parfois que le bilinguisme ne fait que renforcir la médiocrité (de ceux qui n'y adhère pas, oui, sinon c'est une grande richesse, bande de jaloux), pour penser et répandre l'idée, 100% fausse, que TOUS nos hôpitaux, et TOUS nos citoyens voulaient la mort des étrangers.
Ça se passe de commentaires.
Tout est abominablement triste autour de la mort de Joyce Echaquan. On ressasse tout ça en cour depuis le début de la semaine.
C'est comme une longue marche dans le corridor de la désolation.
Un fer dans une plaie qui sera dure à vraiment cicatriser pour la communauté Atikamekw dont je suis issu.
Si Miss Ratched a des enfants, je ne sais pas ce qu'ils pensent d'elle en ce moment, en la voyant.
C'est le mois de la lune en fleur en Mai. Que fleurissent vos horizons.