Jean-Michel Espitallier a publié aux éditions Inculte, avant le confinement de mars 2020, un livre intitulé Cow-Boy, prenant appui sur la vie de son grand-père, né en 1887 dans les Hautes-Alpes, et parti en Amérique au début des années 1900. Il en revint. Et mourut dans les années 1930. L’auteur du livre ne sait pas grand chose de plus sur son aïeul et quasiment rien sur ce qu’il fit là-bas, en Californie. Alors il imagine. Il lui fait une vie américaine nourrie de ce qu’il sait du « petit million d’immigrants qui, chaque année, entrent aux États-Unis » à cette époque. Ainsi, quand il part et que tout pour lui est nouveau, il suppose qu’il vérifiait ce qu’il avait appris à l’école. Et, en particulier, ceci, lu dans son livre de géographie :
« La colline. Autrefois, les villages s’installaient en haut des collines pour se défendre. Les nouveaux villages se construisent au pied des collines, sur les grandes routes. » Et il se pose la question suivante : « Autrefois, ça finit quand ? »
La définition de cet adverbe évoque une époque révolue. Mais quand donc peut-on considérer qu’une époque est révolue ?
Les citations qu’on trouve sur internet mettent souvent en balance autrefois et aujourd’hui, comme le fait Michel Serres : « Aujourd’hui, on prend un parapluie parce que la télé a dit qu’il allait pleuvoir. Autrefois, on aurait regardé le ciel. »
Et vous, dans quel temps situez-vous autrefois ? Je ne doute pas qu’il existe différents autrefois selon le fait dont on veut parler. Que chaque individu donc porte en lui plusieurs sortes de temps révolus. Je vous invite à écrire un texte dans lequel vous montrerez en quoi une action, un évènement, une chose appartient à autrefois et ce qui les fait appartenir à une époque révolue : quels évènements ont changé les modes de vie ? Quelles techniques se sont imposées ?
Exemple :
Victor Hugo a écrit, dans son roman Notre Dame de Paris, qu’autrefois, l'architecture était « le registre principal de l'humanité, qu’il n'est pas apparu alors dans le monde une pensée un peu compliquée qui ne se soit faite édifice, que toute idée populaire comme toute loi religieuse a eu ses monuments ; que le genre humain enfin n'a rien pensé d'important qu'il ne l'ait écrit en pierre. » Il poursuit, plaçant son propos à l’époque de l’invention de Gutenberg : « Le livre va tuer l'édifice. L'invention de l'Imprimerie est le plus grand événement de l'histoire. C'est la révolution mère. C'est le mode d'expression de l'humanité qui se renouvelle totalement, c'est la pensée humaine qui dépouille une forme et en revêt une autre, c'est le complet et définitif changement de peau de ce serpent symbolique qui, depuis Adam, représente l'intelligence. Sous la forme imprimerie, la pensée est plus impérissable que jamais; elle est volatile, insaisissable, indestructible. Elle se mêle à l’air. » Et le livre aujourd’hui résiste encore.
C’est à vous main tenant. Il ne s’agit pas de nostalgie, vous l’avez compris. Il ne s’agit pas obligatoirement de progrès non plus. Il s’agit simplement de constater qu’autrefois on pouvait voir, faire ce qu’on ne voit plus, qu’on ne fait plus aujourd’hui.
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