Plus de vingt Camerounais ont perdu la vie ces derniers mois en consommant des aliments qu’ils ont eux-mêmes pris la peine d’apprêter. Une situation qui inquiète et interpelle plus d’un.
Emotion, stupeur, pleurs, les mots sont assez insuffisants pour décrire l’ambiance qui a régné au domicile des parents de Noé âgé de 5 ans et d’Alexandra 3ans situé au quartier Bonamoussadi à Douala le 27 avril 2021. Selon des informations, Noé et Alexandra qui se sont plaints d’un mal de ventre avant de passer l’âme à gauche quelques heures plus tard à l’hôpital, avaient consommé des avocats que leur a offerts leur grand-mère. Et le pire s’est produit. Les trois autres enfants ayant mangé le même fruit ont heureusement été sauvés à l’hôpital Laquintinie de Douala et l’hôpital Ad Lucem de Bonamoussadi, ou ils ont été admis en urgence. Les restes des avocats consommés par les membres de cette famille ont été saisis et les corps de Noe et Alexandra déposés à la morgue de l’hôpital de district de Deido scellés.
Le 23 aout 2020 dans la ville de Limbe, région du Sud-ouest, une femme et ses deux enfants trouvaient la mort après avoir consomme la soupe de haricots préparés la veille. Transportés à l’hôpital presbytérien de Down Beach, ces derniers qui gémissaient de douleur ont rendu l’âme en laissant pantois les riverains et le personnel soignant.
Le 3 août 2020 au quartier Kondengui à Yaoundé, François Emmanuel âgé de 5 ans et Ange Émilienne, 7 ans, sont morts des suites d’intoxication alimentaire. Selon nos confrères de Canal 2 International qui rapportaient cette information, les deux enfants appartenant à deux familles voisines auraient consommé des œufs dans une cafétéria et le pire s’est produit.
Le 14 mars 2019 dans la ville de NGaoundéré, quatre personnes trouvaient la mort après avoir consommé du riz à la sauce d’arachide. La scène qui s’est déroulée au quartier Jolie Soir rapporte la Crtv avait plongé toute la ville dans l’émoi total. Et avait laissé les populations pantoises. Puisque personne ne comprenait exactement ce qui s’est passe. Cette femme et ses trois enfants étaient ainsi décédés dans des circonstances inexplicables. Les premiers éléments d’enquête ouverte disaient que ces derniers avaient mangé du riz sauce d’arachide et que juste après le malaise a commencé et la mort s’en est suivie.
Le 10 août 2019, quatre membres d’une même famille trouvaient la mort à Limbé dans le Sud-ouest des suites d’une intoxication alimentaire, de sources hospitalières. Gladys Ebai, âgée de 66 ans, ses deux filles Sheila Mbeng Ebai et Che Sharon Ebai âgées respectivement de 38 ans et 35 ans, et un enfant, également son fils sont décédés après avoir consommé du couscous avec des légumes. Au total, onze personnes de cette famille avaient consommé ce repas, et c’est l’intervention rapide de l’équipe médicale qui a permis de sauver les autres membres de la famille dont le pronostic vital était engagé.
Le 10 septembre 2016 au quartier Ebandi à Tombel, un village de la région du Sud-Ouest, quatre enfants trouvaient la mort après avoir mangé un repas familial. Suzanne Maloum Acha la maman, les a retrouvés tous étendus sans vie près des plats de plantains bouillis à l’huile rouge qu’ils étaient en train de manger à son départ. Parmi les victimes se trouvaient Sylvanus Acha âgé de 12ans, Fritz Aicha âgé de 8ans et Acha Confidence Acha une fillette âgée de trois ans. Selon des informations le quatrième enfant, donc La Nouvelle Expression n’a pas pu avoir l’identité, était celui du voisin.
Ces cas de décès par intoxication alimentaire recensés au Cameroun ces derniers mois ne sont pas exhaustifs. Ils ne représentent que quelques échantillons triés sur le volet pour montrer la gravité de ce mal qui détruit de nombreuse famille et plonge le Cameroun dans l’émoi total.
En effet, les morts par intoxication alimentaire au Cameroun sont devenus légion. Il ne se passe pas un seul mois sans qu’un cas de décès ne soit signalé dans un coin de la république. D’après des diététiciens et des spécialistes de la toxicologie qui signalent que le mal est plus profond que cela, les cas relevés sont davantage ceux qui se déroulent dans les métropoles où se trouvent les médias. « Dans l’arrière-pays, les cas d’intoxication alimentaire sont plus nombreux et ne sont même pas recensés. Aucune communication n’est faite autour. Ils sont même banalisés pourtant, il faudrait y prêter beaucoup d’attention et surtout prendre des dispositions pour éviter cela», signale cet expert.
Problème de santé publique
Selon des informations, l’intoxication alimentaire n’est pas seulement une affaire du Cameroun. Cela concerne tous les habitants de la planète. C’est un problème de santé publique qu’il faudrait résoudre en utilisant une stratégie globale. D’après Lusubilo Mwam, point focal l’Organisation mondiale de la santé (Oms) pour l’Afrique 1% de la population mondiale meurt chaque année d’intoxication alimentaire. Et 75% de ces décès d’origine alimentaire sont causés par la mauvaise préparation et la mauvaise conservation des aliments. 38% des enfants dont l’âge varie entre 0 et 5 ans dans le monde souffrent d’intoxication alimentaire. 30% de ces enfants meurent chaque année pendant que beaucoup d’entre eux sont affectés par des problèmes de retard de croissance.
D’après ces statistiques toujours, les régions africaine et de l’Asie du Sud sont les plus concernées par ce fléau-là. Car totalisent à elles seules près de 91 millions de malades pour environ 137 000 décès par an. «L’intoxication alimentaire touche 41% de la population mondiale et est à l’origine de 51% de maladies», conclut Lusubilo Nwam.
Les aliments à risque
Si la mauvaise préparation et la mauvaise conservation sont responsables de l’intoxication alimentaire, il faut néanmoins reconnaître que la mauvaise qualité des aliments reste l’une des causes principales de ce mal-là. « Les aliments qu’on achète sont souvent de mauvaise qualité. Parce que déjà empoisonnés. Les boites de conserves sont souvent des produits de la contrebande, c’est-à-dire de mauvaises qualités. Parfois les produits ont expiré et sont encore sur le marché. Les engrais et produits chimiques que l’on utilise pour la culture industrielle affectent souvent des aliments. Le climat aussi est un facteur à ne pas négliger. Imaginer un produit qui doit être au frais expose à longueur de journée sur le soleil. Le danger est permanent et se trouve à tous les coins de rue. Il faut vraiment être prudent», conseille Douba Épée, expert en sécurité alimentaire. Celui qui invite également à la prudence et à la vigilance milite encore plus pour le respect des règles élémentaires d’hygiène et de salubrité. «Il faut laver les mains avant de manger et surtout laver les fruits avant de les consommer, il n’y a pas que les produits chimiques. La maladie se trouve aussi dans les aliments frais, les fruits aussi », précise ce dernier.