Nicolas Sarkozy a gagné sa réforme institutionnelle. "On a eu le bac" s'est-il réjouis. Mais à quel prix ? Celui de petites tractations de couloir. Bernard Tapie a gagné contre le Crédit Lyonnais. mais à à quel prix ? Celui d'une intervention en sous-main du pouvoir. Les réformes sociales furent toutes votées. Mais à quel prix ? Celui d'une absence de débat. Trois exemples de l'étroitesse de la présidence, qui ne sont pas les seuls de la semaine...
La petite victoire institutionnelle de Nicolas Sarkozy
Nicolas Sarkozy a gagné. A une voix près (celle de Jack Lang), la réforme des institutions a été adoptée lundi 21 juillet. Certains se réjouiront des référendums d'initiative populaires (réclamés par la gauche), de la limitation du mandat présidentiel, ou de celle du recours à l'article 16. D'autres noteront que le Président conserve son droit de vie ou de mort sur l'Assemblée Nationale, qu'aucun progrès n'est garanti en matière de liberté et d'équilibre des médias; Sarkozy s'est même arrogé le droit de nommer directement le président de France Télévisions; que ce n'est pas le Parlement qui est revalorisé mais l'opposition parlementaire; que les possibilités de référendum sont trop encadrées pour être praticables. Bravo ! Que nous reste-t-il ? Sarkozy ne pourra plus faire sauter les PV de circulation sans demander l'avis de l'Assemblée. Super, merci et encore bravo. Nicolas Sarkozy a juste acheté les voix de quelques parlementaires nécessaires, par avantages promis ou dissuasion électorales (tels Alain Lambert d'abord opposant puis nommé à la Caisse des Dépôts 48 heures après sont vote positif...).
Bref, cette nouvelle Vème République présente un Sénat sans légitimité démocratique directe et une Assemblée défensive face à un Président qui a le droit de vie ou de mort sur elle et la totalité des autorités "indépendantes."
La petitesse éthique de Bernard Tapie
L'affaire est grave. Bernard Tapie a gagné son affaire contre le Crédit Lyonnais. Tapie a réclamé, Sarkozy l'a fait: Just do it ! Le gouvernement a effectivement demandé à l'établissement public qui gère le passif de la banque d'accepter une procédure arbitrale plutôt que judiciaire. Et le jugement arbitral a donné raison à Tapie. La belle affaire ! François Bayrou, Ségolène Royal ou Eva Joly s'indignent. République bananière ? Tapie conteste. Evidemment.
La petitesse narcissique de Rachida Dati
La Garde des Sceaux a presque gâché cette belle semaine. Le ministère de la justice a mis en ligne un site digne de la grande période roumaine de Ceaucescu. Certains hommes politiques se confient depuis longtemps sur leur blog, souvent avec talent. On y trouve des confessions, des analyses, des commentaires (toujours modérés). Rien de tout cela sur la Rachida-Dati TV. On se croirait sur un site d'information nord-coréen. La ministre en Prada devrait se méfier. Même sur des sites officiels et contrôlés, un internaute attentif peut y trouver un dérapage qui fera du buzz sur le Web (voyez donc cette video dénichée par Rue89.com).
La petitesse diplomatique de la France
Nicolas Sarkozy a trébuché quelques jours après sa victoire monocratique. Il a retrouvé son agitation toute-puissante. La période de modestie est terminée. Passée l'Union pour la Méditerranée, le voici menaçant l'Organisation Mondiale du Commerce d'un veto français. Super-Dupont a oublié qu'il présidait l'Union Européenne pour encore quelques mois. Le commissaire européen Mandelson le lui a rappelé : "La Commission est chargée de négocier ici à l'OMC au nom de tous les Etats membres." ¨Paf !
On a oublié, tout occupé à attendre le résultat du fameux vote du Congrès, que le déplacement narcissique de Sarkozy en Irlande le même jour fut un échec. Avant cette visite, Sarkozy expliquait que les Irlandais devraient revoter le Traité de Lisbonne. Après son déplacement, la position avait évolué. Sarkozy a dû faire profil bas.
Quatre jours plus tard, quand il reçoit Barack Obama en coup de vent à l'Elysée, la France à nouveau est petite. Obama a rassemblé 200 000 Berlinois la veille. La France n'était qu'une escale technique, un allié et un symbole de seconde zone. On en a oublié que Nicolas Sarkozy était le président en exercice de l'Union Européenne !
La casse sociale en plein été
On ne reprochera pas à Nicolas Sarkozy de faire voter ses lois de "casse sociale" en session extra-ordinaire l'été. C'est de bonne guerre. On notera simplement deux choses : Sarkozy est un président agité mais immobile pendant 9 mois de l'année. D'octobre à juin, aucune réforme sociale majeure n'a été accomplie. La Sarkozie était inquiète de la popularité en chute libre de son Président et de ses agapes amoureuses. Ce dernier a beau roulé des mécaniques devant les médias, ses porte-paroles ont beau loué son activisme, le président ne fait rien en pleine saison (à part peut-être flinguer le service public pour le bénéfice de TF1).
Mais quand arrivent les beaux jours de juillet, le rythme des examens parlementaires s'accélère : "offre raisonnable d'emploi," garderie minimum à l'éducation nationale, assouplissement des 35 heures. ""un sale coup, on n'a rien vu venir", expliquait un cadre qui manifestait ce jeudi entre midi et deux. Et oui, il faut être V-I-G-I-L-A-N-T !
Les bas-fonds de Sarkofrance
Pardonnez cet excès de pathos. Deux fillettes vont perdre leurs parents cette semaine. Grâce à Brice Hortefeux. C'est cela aussi, la petitesse de la Sarkofrance.
Nicolas Sarkozy jouait gros cette semaine, il a gagné. Rachida Dati ne jouait rien, elle a perdu. François Fillon ne jouait plus; il s'est caché.
Petite semaine finalement. Petite Sarkofrance.
Ami Sarkozyste, où es-tu ?