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Cameroun – Réflexion : Quelles armes contre les discours de haine ?

Publié le 12 mai 2021 par Tonton @supprimez

Un colloque organisé les 5 et 6 mai 2021 par la Commission nationale pour la promotion du bilinguisme et du multiculturalisme a débouché sur un ensemble de recommandations pour combattre ce fléau au Cameroun.

Un Cameroun sans discours de haine ni xénophobie est-il possible ? Question difficile qui traduit bien l’ampleur de la tâche de la Commission nationale pour la promotion du bilinguisme et du multiculturalisme (Cnpbm). A côté des missions qui étaient déjà les siennes, le chef de l’Etat a instruit la Cnpbm de lancer une nouvelle campagne de communication contre les discours haineux et la xénophobie au Cameroun. Le dernier acte de celle-ci, l’un de ces principaux temps forts aussi, a été le colloque organisé les 5 et 6 mai derniers au palais des congrès de Yaoundé.
C’est dire que la Cnpbm, malgré l’ampleur de la mission, ne désespère pas de pouvoir la mener à bien. Son président a même une idée bien précise de comment son organisation peut y parvenir. «Nous sommes convaincus que ce n’est qu’à travers une approche globale et holistique que le discours de haine pourra être attaqué de fond et enrayé au Cameroun », a dit Peter Mafany Musonge à l’ouverture du colloque de Yaoundé. Le comité scientifique de cette rencontre était constitué d’intellectuels issus de diverses disciplines, que le président de la Cnpbm a invité, tous comme tous les participants, à « un débat général, ouvert et constructif ».

Six communications ont été au cœur des travaux du 5 et du 6 mai : Discours de haine et xénophobie comme obstacles à l’édification de la nation et à la cohésion sociale (Pr Ngolle Ngolle) ; Des alternymes et représentations péjorées à la haine et à la xénophobie de groupe au Cameroun : fondements anthropologiques de la construction du rejet de l’autre (Pr Mbondji Edjenguele et Pr Abouna Paul) ; Discours de haine et vocabulaire discriminant dans les médias camerounais : causes et manifestations (Pr Laurent-Charles Boyomo Assala) ; Discours de haine et le problème anglophone : les défis à une coexistence paisible au Cameroun (Pr Willibroad Dze-Ngwa) ; Clivages ethno-régionaux et animosités à caractère sociopolitique au Cameroun : éléments de compréhension des tendances xénophobes naissantes (Pr Yenshu Vubo Emmanuel) ; La codification pénale de l’interdiction de la haine et de la xénophobie (Pr Minkoa She).

Au terme de la rencontre de deux jours, les participants ont à nouveau mis l’accent sur le danger que constituent les discours de haine et la xénophobie. « Le discours de haine et la xénophobie fragilisent l’unité nationale, le vivre ensemble, la cohésion sociale, l’intégration nationale, la paix durable et la stabilité sociale. Ils structurent les replis identitaires et concourent au dénigrement et au rejet de l’autre. Le discours de haine contribue à l’exacerbation ainsi qu’à l’instrumentalisation de nos différences. Les difficultés au quotidien, les revendications, aussi pertinentes et légitimes soient-elles, ne sauraient autoriser le recours à ces pratiques qui affectent négativement les rapports intercommunautaires. Ce fléau gagne du terrain. Il n’est plus conjoncturel, mais tend à devenir systémique».

Les recommandations du colloque

-Mettre sur pied une coalition nationale de lutte contre le discours de haine et la xénophobie associant toute les parties prenantes ainsi que les organisations relais ;
-Vulgariser le concept de l’éducation aux médias et à l’information comme solution non répressive au discours de haine ;
-Assurer une veille médiatique chargée de répertorier les occurrences de discours haineux et de xénophobie ;
-Dénoncer toute association ou organisation partisane fondée sur l’exclusion ethnique ou religieuse ;
-Veiller à la mise en œuvre effective des lois pénales sur le discours haineux et la xénophobie telles que modifiées en 2019 ;
-Sensibiliser les partis politiques à la nécessité d’éduquer leurs militants sur le discours haineux et la xénophobie ;
-Sensibiliser la diaspora sur le caractère haineux et xénophobe de son discours ;
-Exorciser le champ lexical des mots et expressions alimentant le discours de haine dans les interactions sociales au Cameroun ;
-Promouvoir la communication non violente et le journalisme de paix par l’éducation aux médias et à l’information ;
-Réduire la perception selon laquelle il y a deux principaux groupes linguistiques qui se haïssent fondamentalement ;
-Elaguer des médias les contenus à caractère haineux et en rupture avec nos cultures ;
-Créer un réseau social citoyen plus dynamique afin de mener une contre-campagne dynamique sur les réseaux sociaux pour dissuader les nouvelles recrues ;
-Procéder à la déconstruction des groupes ethno-régionaux, à la réorientation des perceptions publiques et à la dépolitisation de l’identité ethnique ;
-Procéder à un réarmement moral dans tous les secteurs d’activités du pays ;
-Procéder à la révision du code électoral.

Jules Romuald Nkonlak


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