Trois ans après le démarrage de Shine, qui reste la référence, même après son rachat, et dans le sillage des tentatives de rattrapage de quelques grands groupes (Crédit Agricole avec Blank, Crédit du Nord avec Prismea…), c'est donc au tour de BNP Paribas de lancer sa banque pour les indépendants, sous l'ombrelle de Hello Bank!
L'engouement de l'industrie pour ce segment de clientèle n'a rien de surprenant lorsqu'on découvre la forte progression des créations d'activité individuelle, encore accélérée ces derniers mois en raison de la pandémie. En dépit de leur extrême diversité, les quelques 550 000 entreprises du genre enregistrées en 2020 (en hausse de 9% par rapport à l'année précédente) représentent en effet un marché potentiellement lucratif, quasiment captif puisque portant une obligation légale d'ouverture d'un compte dédié.
Ayant pris son temps pour se positionner, Hello Business n'a pas à rougir face à la concurrence. Pour un prix plus ou moins proche de la norme (10,90€ par mois), elle offre un compte courant et sa carte de paiement (à débit différé, en option), accompagnés de leur application mobile – intégrant le suivi des opérations en temps réel – et des services habituels, tous gratuits : règlements et retraits, en France et à l'étranger, virements instantanés, transferts en devises (on se méfiera tout de même du taux de change)…
Elle profite par ailleurs de son adossement à BNP Paribas pour proposer l'encaissement de chèques et d'espèces sur ses distributeurs automatiques, qui constitue une exigence impérative pour certains métiers, tandis qu'elle fait preuve d'une originalité bien placée avec une facilité de trésorerie, à hauteur de 1 500 euros, qu'apprécieront certainement les professionnels, notamment dans le domaine des services aux entreprises, qui doivent composer avec les délais (et les retards) de paiement de leurs fournisseurs.
Dans le registre extra-bancaire, en revanche, Hello Business ne se démarque guère. Côté assurances, elle se borne, à ce jour, à une couverture des cas d'accident et à une protection juridique (produits facturés en sus du forfait de base, apparemment, ce qui ne me paraît pas particulièrement compétitif en comparaison des leaders). Coté soutien administratif et comptable, pourtant essentiel dans l'univers des freelances, il faudra se contenter de l'inévitable module de facturation (autorisant aussi la création de devis).
Cet axe est justement celui qui alimente mon principal regret vis-à-vis de la nouvelle venue : elle ne tente pas de capitaliser sur les attentes manifestes de sa cible, pourtant exprimées clairement (p.7) dans l'enquête [PDF] qui semble lui avoir servi de fil conducteur à la conception, et se focalise exclusivement sur des besoins bancaires (p.10) où, en pratique, la différenciation est devenue quasiment impossible. BNP Paribas rate là une opportunité extraordinaire, qui tendait les bras à celle qui arrive après les autres.
Elle promet donc d'enrichir son offre rapidement (avant la fin de l'année) avec une solution de crédit et un terminal de paiement, certes désirés par une partie des populations visées, mais bien moins que les assurances santé et prévoyance, la comptabilité, l'assistance fiscale (sur les déclarations URSSAF, de TVA, de revenus…), pour ne citer que les exemples les plus triviaux. Laquelle de ces jeunes banques « digitales » franchira enfin le pas de l'intégration complète des fonctions financières et du support à la gestion ?