Italo Calvino – Les ruisseaux

Par Stéphane Chabrières @schabrieres

Souvent nous empruntons des itinéraires
secrets pour nous fuir. Et mes routes
ne sont pas les vôtres : moi je parcours les ruisseaux.
Je regarderai alentour à petites gorgées
le passage étroit veut des pas comptés :
je laisse mon chien – ami des soleils – tremper
ses pattes dans le courant fluet.
Rares les rencontres : des hommes avec des bêches
retouchent les marges des bûchers ;
passez devant : je me plaquerai contre
le mur par-dessus l’aplomb vert et bref.
Pourquoi ne pas dire : « hommes votre bêche
me donnez et je retournerai l’eau dans le vôtre » ?

*

I beudi

Il s’agit d’un des rares termes dialectaux employés par…
Sovente camminiamo itinerari
segreti, per fuggirci. E le mie strade
non son le vostre : io percorro i beudi.
L’intorno occhieggierò a fugaci sorsi
ché il varco esiguo vuol badati i passi ;
lascio che il cane – amico ai soli – guazzi
le zampe nella fievole corrente.
Rari gli incontri : uomini con vanghe
ribadiscono gli argini dei roghi ;
passate avanti : io mi farò a ridosso
del muro sopra il breve e verde ciglio.
Perché non dico : “uomini, il badile
Datemi e girerò l’acqua nel vostro”?

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Italo Calvino (1923-1985)Sept poèmes de jeunesse – Po&sie 2014/3-4 (N° 149-150) – Traduit de l’italien par Martin Rueff.