L’information a longtemps circulé dans les coulisses, mais au plus haut niveau de l’Etat, le pays a clairement choisi de refinancer une partie de sa dette extérieure.
Un choix calculé car il implique le perte de certains avantages auprès du G20. Les enjeux pour le Cameroun étaient nombreux et les arbitrages complexes. « Négocier le nouveau cadre d’allègement du service de la dette du G20 ne garantit pas que le gain de trésorerie soit pertinent », indique Jean Paul Oyono expert-consultant. En 2020, la première mesure a permis au pays de bénéficier de Fcfa 120 milliards de report selon la Caisse autonome d’amortissement (Caa), et de Fcfa 180 milliards selon l’agence Moody’s. Le gouvernement du Cameroun s’éloigne du bénéfice du nouveau cadre d’allègement de remboursement de dettes, initié par les 20 pays les plus riches plus l’Ue, au profit des pays pauvres. Selon une publication d’EcoMatin, qui cite une lettre du Secrétaire général de la présidence (Sgpr), le chef de l’Etat aurait autorisé que soit lancé le processus de refinancement de l’eurobond de Fcfa 450 milliards soit 750 millions de dollars en novembre 2015. Or, une des conditions pour solliciter le bénéfice de l’allègement du service de la dette du G20, est celle de ne pas contracter de nouveaux emprunts commerciaux.
Les enjeux pour le Refinancer son eurobond
Dans les milieux proches des investisseurs internationaux, l’on fait alors savoir que les autorités camerounaises seraient en train de mener une réflexion avec le Fonds monétaire international (Fmi) pour effectuer un refinancement de son eurobond. L’objectif de cette démarche serait, dans la mesure du possible, de repousser les échéances de remboursement du montant principal (Fcfa150 milliards) de cet emprunt international.Une tactique qui permet ainsi d’alléger la pression sur les liquidités extérieures du pays, mieux que l’initiative du G20 sous la forme actuelle. Le deuxième enjeu de ce refinancement est que le Cameroun, en plus de repousser ses délais de remboursement (maturité), peut réduire le coût de sa dette. Actuellement, il paie un taux d’intérêt de 9,5 % sur son eurobond. Mais sur la Bourse de Dublin, en Irlande, où les titres de cette obligation sont cotés, on note que, juste avant la crise de covid-19, les investisseurs étaient prêts à accepter un rendement de 6,5 %. Cependant, la situation s’est dégradée avec la pandémie (un rendement de 12,3 % en avril 2020), quoiqu’à la fin mars 2021, le rendement attendu sur les titres internationaux du Cameroun soit de 7,1 %. Mais de façon profitable, au début de l’année en cours, la courbe s’est montrée stable.
Conditionnalités
A l’analyse, cet indicateur donne une idée de la tendance que pourrait avoir le taux d’intérêt sur le refinancement de l’eurobond. Mais avant d’y arriver, il faudra d’abord que le pays trouve un nouvel arrangeur de l’opération. Aussi, le gouvernement doit préparer une modification de la loi des finances pour des discussions lors de la session parlementaire de juin 2021. Or, à partir du 19 novembre 2023, le Cameroun devra en effet effectuer un premier versement équivalent à Fcfa 150 milliards pour le remboursement de ce principal. A côté de cet eurobond, le pays doit aussi rembourser d’autres engagements internationaux, notamment ceux contractés pour le financement des travaux de la Coupe d’Afrique des nations (Can) qui se heurtent à la fameuse Task force. En clair, le pays traverse des moments difficiles sur le plan économique. En plus des pressions sociales, et des crises sécuritaires dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, il doit aujourd’hui faire face aux défis qu’imposent la pandémie de coronavirus et même les inondations. Dans le même temps, l’aide apportée par le G20 s’est avérée en dessous des prévisions faites par la Banque mondiale. L’institution de Bretton Woods prévoyait de possibles retombées de l’ordre de Fcfa 155 milliards. Mais l’ordonnance du 3 juin modifiant la loi des finances 2020 parle plutôt de Fcfa 118 milliards.