Saupoudrez un peu d’urgence sur de la peur, et vous pourrez tout justifier : utilisant l’épidémie de coronavirus comme prétexte en or massif, l’Europe accélère à présent la mise en place d’un passeport sanitaire largement poussé par les autorités de certains pays, France en tête, trop heureuses d’enfin trouver un moyen de pister finement, contrôler et contraindre des populations vraiment trop turbulentes.
Quant à la carotte, elle a été d’autant plus facile à brandir qu’un nombre consternant d’individus est tombé dans le panneau : moyennant une limitation calibrée des libertés de tous, on va vous redonner un droit qu’on n’aurait jamais dû vous prendre. Magie des détournements sémantiques : l’autorisation de réouverture des magasins n’est plus un dû d’un gouvernement de vicelards aux abois, mais une grâce que ce dernier accorde en échange d’une petite formalité consistant essentiellement à traquer tout le monde et à ostraciser des bien-portants en jouant sur une habile inversion de la charge de la preuve, tout asymptomatique étant malade à moins de pouvoir garantir sa bonne santé, cerfa (électronique de surcroît) en pogne.
Et même si les Français se sont largement montrés hostiles à l’idée, « l’élite » déroule son plan, imperturbable : chacun devra avoir la preuve tangible qu’il est en bonne santé pour ne pas être ostracisé légalement, appliquant ainsi une méthode qui vole à la face d’un principe de base dans une société d’individus libres, et ce, alors que s’y oppose pourtant une majorité, consciente des dérives dramatiques que la pratique entraînera inévitablement.
Mais voilà : la classe caquetante et la classe au pouvoir s’agitent si bruyamment qu’on les croit nombreux. Ils sont alors rapidement rejoints par l’inévitable fraction d’hystériques manipulés et d’idiots utiles acquiesçant goulûment pour éviter de développer une opinion antagoniste qui risquerait de les faire mal voir auprès des premiers, qu’ils rêvent, amoureux transis, de rejoindre un jour.
Le passeport sanitaire sera donc mis en place.
Bien sûr, on peut s’attendre à un merdouillage intense de tout le procédé, tant les services de l’État ont amplement prouvé, jusqu’ici, leur maîtrise très relative de tout ce qui a trait à la pandémie.
On devrait donc avoir une période, plus ou moins longue, pendant laquelle il faudra absolument avoir ce bidule alors que son fonctionnement sera aléatoire et entaché d’erreurs, litron supplémentaire de vexations dans l’océan de bêtise bureaucratique qui caractérise maintenant la France.
On aura par exemple droit à des loufoqueries comme cette idée d’un passeport sanitaire obligatoire pour les mariages : Tonton Léon, qui a oublié son smartphone, sera-t-il refoulé de la fête ? Dans certaines villes, certains quartiers, gageons que l’application du principe promet quelques joyeux débordements.
Mais ne nous leurrons pas ; vous ne couperez pas au petit livret ouvrier du XXIème siècle : au début, on s’assurera que vous pouvez prouver être en bonne santé pour aller acheter votre pain ou voir un film ou un concert… Beaucoup se réjouiront niaisement de pouvoir retrouver des activités « normales ».
Puis, poussé par les autorités médicales et une pression sociale de plus en plus forte entretenue par des médias et un pouvoir totalement en roue libre, votre employeur vous imposera ce même passeport pour simplement travailler. Ce n’était pas dans votre contrat de travail ? C’est contraire aux droits les plus élémentaires ? C’est de la discrimination et de la ségrégation basées sur un profil de santé ? Qu’à cela ne tienne : la foule et le gouvernement auront voté pour, d’une façon ou d’une autre, et ce sera donc mis en place. Il vaudra alors mieux être handicapé avec ce passeport qu’en bonne santé sans le sésame : qui penserait à discriminer à l’embauche contre un handicapé, enfin, voyons !
Tout ceci, d’année en année, reviendra à vous imposer de vous injecter – probablement régulièrement – une dose de l’un ou l’autre produit qu’on vous désignera comme idoine pour vivre en société. Habilement couplé avec votre géo-positionnement et des statistiques en temps réel de vos consommations et de tout paramètre qu’on pourra récupérer lors de vos activités numériques ou autres, ce « passeport » permettra de déterminer si vous rentrez comme il faut dans les bonnes cases prévues par la caste dirigeante ou si vous méritez la mise à l’écart.
Comme le procédé sera accompagné de nombre de récompenses pour ceux qui s’y fondront avidement, et la mise au silence total de ceux qui le refuseront, l’ensemble sera accepté avec plaisir par une foule nombreuse, anesthésiée par son ventre plein et sa tête vide.
Petit-à-petit, chaque action des individus libres sera, par défaut, soupçonnée de nuire à autrui. Nul doute que la société résultante sera idyllique : parfaite synthèse d’un monde orwellien où la surveillance citoyenne est constante et totale, et du meilleur des mondes d’Huxley où chaque individu reçoit ce qu’il lui faut pour être artificiellement heureux à condition d’être un bon esclave, ce qui se met en place ne peut réjouir que ceux qui croient parvenir en haut de la nouvelle pyramide du pouvoir qui se met en place. Beaucoup vont se rendre compte que la tête de cette pyramide est fort étroite et avoir de désagréables surprises.
Bien sûr, ce tableau catastrophique n’est – heureusement – pas certain. Mais le chemin décrit ici n’est ni loufoque, ni impossible. Il est technologiquement possible. Il est légalement envisageable. Il est surtout ardemment désiré par une partie de la population : l’une, transie de peur irrationnelle, l’autre, alléchée par les bénéfices qu’elle pourra en tirer aux dépens de tous les autres.
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