Après la période narcissique d'Hedi Slimame qui avait enterré Yves Saint Laurent pour la seconde fois, imposant son style arty rock en noir et blanc qu'il assène depuis des lustres à toutes les marques qui l'embauchent, la direction artistique d'Antony Vaccarello apporte un renouveau plus subtil et plus créatif.
A la manière de feu Lagerfeld chez Chanel, il déconstruit et reconstruit la syntaxe harmonique YSL, sans tomber dans l'historiographie soporifique, pour la mettre en phase avec les femmes du XXIe siècle. Des femmes lyriques comme un opéra de Mozart ou glam trash comme un album de Marilyn Manson, des femmes qui ne font pas dans la demie mesure, mais affichent une liberté de tons esthétiques qui montent dans les aiguës, descendent dans les graves et assument parfois la dissonance stylistique. L'élégance (mot qui sonne désuet) n'est pas dans l'accord parfait, mais dans les fausses notes calculées qui vrillent les tympans sans assourdir.
Le registre de Vaccarello tape dure et juste, démonstration faite lors de sa dernière présentation, mais alors, pourquoi mettre en images des femmes décharnées en os pâles et mascara toxico qui tirent une tête querelleuse dans un décor de fin du monde ? La mode vend de l'impulsion et la promesse d'une séduction qui flatte et frivole, pas sous la menace du dernier jour imminent... Les femmes sont belles quand elles sourient. Les hommes qui les regardent aussi.
Photo : © Saint Laurent Paris