Napoléon en Amérique du Sud ? Non ! José de San Martín (1778-1850) : ma prochaine conférence à l’Ambassade d’Argentine [ici]

Publié le 27 avril 2021 par Jyj9icx6

Bas relief de la Traversé des Andes, grande campagne de San Martín en 1817
Monument de Boulogne-sur-Mer (1909)
Zieutez donc le bicorne ! Il est mis à la mode de quelqu'un d'autre
Cliquez sur l'image pour une meilleure résolution

Dans le cadre de la semaine de l’Amérique latine et des Caraïbes, l’Ambassade d’Argentine à Paris souhaitait associer les deux figures contemporaines de Napoléon Bonaparte, dont on célèbre en mai 2021 le bicentenaire de la mort, et du général José de San Martín, qui est le libérateur de l’Argentine, du Chili et du Pérou. Je donnerai donc une conférence qui nous permettra de découvrir ce héros sud-américain avec, en contrepoint, la trajectoire du général républicain devenu empereur des Français.

San Martín contemplant les Andes
Monument à l'Armée des Andes, Mendoza (1910)
Vous remarquerez que le bicorne, là-bas, est dans le bon sens !
En colonne et non en bataille
Cliquez sur l'image pour une meilleure résolution

Les deux hommes, qui ont neuf ans de différence, se révèlent comme deux génies sur le champ de bataille, l’un ayant étudié les tactiques de l’autre et en ayant fait son miel. Ils avaient t d’ailleurs reçu une formation théorique militaire très semblable, fondée sur l’étude des mêmes auteurs du 18e siècle et de l’histoire de l’Antiquité, l’un à Brienne (en Champagne), l’autre à Madrid (1). En revanche, leurs cheminements politiques sont différents du fait de leurs personnalités et des réalités géopolitiques et sociologiques dans lesquelles ils ont œuvré. Et puis San Martín a su apprendre de ce qu’il s’était passé en France à partir de 1792 et il a voulu éviter tout ce qui s’était révélé nuisible au bonheur des hommes. Il a donc toujours privilégié la mesure et le compromis, là où le Premier consul et l’empereur n’en ont pas eu la possibilité ou l’appétence.

Cliquez sur l'image pour une haute résolution

San Martín présente donc un avantage certain aux yeux de nos contemporains : ses valeurs sont plus proches des nôtres que celles qui ont guidé Napoléon. Il nous paraît donc plus sympa ! (2)Dans les deux cas, les interprétations anachroniques ne manquent pas dans la littérature savante et la vulgarisation mais dans le cas de San Martín, c’est plus difficile à déceler. Les questions qui font polémique aujourd’hui, comme le mode de gouvernement supposément tyrannique (la démocratie n’était pas encore inventée, de toute façon), l’esclavage, le féminisme ou plutôt son absence, sont très faciles à écarter quand on parle de San Martín : il n’a que fort peu exercé le pouvoir politique, sa vie personnelle montre qu’il était très féministe (surtout pour un homme de son temps) et il a été sans interruption un fervent abolitionniste de l’esclavage (3).

Cliquez sur l'image pour une haute résolution

Après leur mort, tous deux en exil, ils ont été élevés au rang de mythes nationaux et inhumés dans des églises, l’un aux Invalides (dans une partie de l’église qui a été désacralisée) et l’autre à la cathédrale de Buenos Aires. Les mêmes problématiques d’historiographie et de récit mémorial se développent autour de leur réalité historique en Argentine comme en France et ailleurs dans le monde.

C’est à travers toutes ces questions que je vous entraînerais après un bref résumé de la vie et de l’œuvre politico-militaire de San Martín puisqu’il est trop peu connu chez nous et qu’il faudra poser quelques repères pour qu’on ne ne perde pas en chemin.

Tombeau de San Martín dans la cathédrale de Buenos Aires
photographié le 17 août 2008 au début de l'hommage officiel
Cliquez sur l'image pour une haute résolution

La conférence se fera bien entendu en français. Je reviendrai sur cet article si les conditions sanitaires bougent d’ici au 28 mai et qu’une jauge devenait possible pour accueillir du public, dans le jardin s’il fait beau.

© Denise Anne Clavilier www.barrio-de-tango.blogspot.com

Pour en savoir plus :

consulter le programme de la Semaine de l’Amérique latine et des Caraïbes

(1) Un certain nombre d’auteurs argentins prétendent que cette formation à Madrid est une invention du premier historien argentin, Bartolomé Mitre (1821-1906), qui aurait voulu par ce moyen créer le « mythe de San Martín ». Or il est vrai qu’on ne trouve pas trace du jeune garçon dans les archives de cette école mais j’ai découvert un texte contemporain de San Martín qui rend cet épisode des plus vraisemblables. Il figure bien entendu dans mon second ouvrage biographique : San Martín par lui-même et par ses contemporains, Éditions du Jasmin (à commander dans toutes les bonnes librairies, puisqu’elles sont ouvertes et reconnues commerces essentiels !)

(2) Objectivement, il l’était. Ne serait-ce que parce qu’il avait un sens aigu de l’humour et qu’il était vraiment drôle, ce dont Napoléon était tout à fait dépourvu. Avec lui, on ne rigolait jamais !
(3) D’ailleurs, jusqu’à l’éphémère paix avec la Grande-Bretagne en 1803, Bonaparte a lui aussi été abolitionniste en paroles et en actes, en digne fils des Lumières et de la Révolution de 1789 qu’il était. Et cette restauration de l’esclavage dont on lui tient tant rigueur de nos jours, dans un esprit manichéen contraire à une démarche historique (mais propre à une attitude idéologique), c’était de la real-politik à laquelle il s’est plié, en se reniant, non sans un certain cynisme il est vrai, lorsqu’il a fallu signer avec le Royaume-Uni pour laisser la France reprendre son souffle après dix ans de conflits contre les coalitions européennes.