Après Storytelling, Christian Salmon s'intéresse à l'usage des histoires dans le monde politique. Enfin, continue de s'y intéresser. Il suit plus particulièrement Sarkozy et Obama comme des stars de séries, imposant à la politique émotions, mises en scène et surprises à un rythme frénétique.
A travers de courts chapitres, l'auteur analyse rapidement une vingtaine d'événements et histoires liées à des hommes politiques. Cela va de la love-story de Carla et Nicolas, à la campagne d'Obama, en passant par le régime de Hollande, la démarche d'un homme politique ou la virilisation et féminisation des discours. On découvre un peu plus les communicants de ces derniers et leurs méthodes pour mêler récits aux actes et aux discours, faisant des gouvernants des personnages.
L'ensemble est intéressant et vif. Je regrette toutefois la brièveté des chapitres et leur côté pêle-mêle, qui ne permettent pas toujours d'entrer dans une analyse complète des procédés mis en lumière. Il est flippant sur notre monde et sur la façon dont le spectacle et les histoires le construisent. Comme l'était Storytelling dont la lecture, finalement, est plus pertinente.
"Passé un bref état de grâce, le nouveau prince élu se voit confronté non seulement à ses ex-rivaux, tous bien identifiés, mais aussi à un ennemi insaisissable et rebelle : l'opinion. D'autres facteurs objectifs viennent lui compliquer la tache : le cadre national de la gouvernance s'effiloche par les deux bouts au bénéfice des pouvoirs régionaux d'une part et des instances supranationales de l'autre, qu'elles soient chargées de régulation économique, monétaire ou d'intervention militaire"
"Le secret du succès au élections se résume au triptyque :
1. Racontez une histoire
2. Soyez bref
3. Soyez émotionnel"
"Verrait-on s'opposer alors deux façons de faire campagne, l'une, basée sur les programmes et les actes ; l'autre, sur des rêves et des mots ?"
"Les campagnes électorales sont devenues des festivals de narration au cours desquels s'affrontent des personnages plutôt que des idéologies et où l'élection sanctionne les performances d'un acteur-candidat, sa capacité à capter l'attention et à susciter l'émotion plutôt que ses compétences. [...] Une telle performance pour réussir doit respecter quatre conditions, synchroniser quatre fonctions que l'on peut qualifier de carré magique :
1. Raconter une histoire capable de constituer l'identité narrative du candidat (storyline).
2. Inscrire l'histoire dans le temps de la campagne, gérer les rythmes, la tension narrative tout au long de la campagne (timing).
3. Cadrer le message idéologique du candidat (framing) c'est-à-dire encadrer le débat comme le préconise le linguiste Georges Lakoff, en imposant un registre de langage cohérent et en créant des métaphores.
4. Créer le réseau sur Internet et sur le terrain, c'est-à-dire un environnement hybride et contagieux susceptible de capter l'attention et de structurer l'audience du candidat (networking)."