Y a que les folles qui ne changent pas d'idée. J'avais annoncé la mort de ce blogue, mais je ne peux résister à l'envie de vous dire un mot du roman que je viens de terminer : Évasion, de Benjamin Whitmer. La quintessence du noir, déclare Pierre Lemaitre dans la préface qu'il signe. Un roman noir, ça, c'est certain. Ténébreux. Avec tout au plus quelques lueurs pour ne pas nous désespérer complètement. Mais un sacré bon livre.
L'affaire se passe aux États-Unis, dans une petite ville dont toute la vie semble tourner autour de la prison d'Old Lonesome. Un soir de tempête, des prisonniers s'évadent et se dispersent dans la nature. Le brutal directeur de la prison lâche ses chiens sur leur piste. Ses chiens, comprenez les gardiens de prison qui, à une exception près, sont d'une férocité innommable. Deux journalistes et la cousine d'un des fuyards sont de la partie pour des raisons qui leur sont propres. Et nous partons avec eux dans la tempête pour une nuit d'enfer et de carnage. Il y aura beaucoup de sang répandu et de chair broyée.
Par-delà les éléments du récit, c'est la face sombre de l'Amérique que Whitmer nous révèle. On entrevoit cette Amérique inculte, pauvre, victime de l'alcool et de la drogue. Face sombre qui a sans doute à voir avec la fascination de nos voisins pour les armes et les tueries si régulières et si nombreuses qu'elles nous en paraissent banales, les Terminators s'attaquant au Capitol, un policier écrasant à mort le cou d'un Afro-Américain. Oui, Évasion est un roman impitoyable et ne distille que peu d'espoir. Mais c'est aussi un roman éclairant et d'une écriture moderne et efficace. Seul petit agacement, la traduction française du dialecte des bas-fonds. Je vous le recommande si vous n'avez pas trop peur du sang.
Benjamin Whitmer, Évasion, Gallmeister, 2018, 407 pages