Que tu n’as pas commis.
Tu tourmentes les chaînes
De ton cœur mal soumis.
Tu cherches qui pourrait
Te servir de bourreau
Et ton meilleur ami
A le regard qu’il faut
Cruauté sur la terre,
Cruauté sur toi-même,
Pardonne-toi d’être homme
Et de te voir changer,
Pardonne-toi le somme
De tes yeux fatigués,
Pardonne à cette main
L’angoisse de ces mots,
Pardonne à tous les maux
Dont s’enfle ta raison,
Pardonne-toi ce jour
Entrant par la fenêtre,
Pardonne-toi le doute
Ou repose ton être
En cette après-midi
De Février, le dix.
***
Jules Supervielle (1884-1960) – Le forçat innocent (Gallimard, 1930)