Martial Solal par Juan Carlos HERNANDEZ
Live at Salle Gaveau 2019
Challenge RecordsSortie le vendredi 9 avril 2021
Martial Solal: piano
Concert enregistré à Paris, salle Gaveau, le mercredi 23 janvier 2019 par Radio France pour France Musique.
Lectrices exigeantes, lecteurs sélectifs, j'ai l'honneur de faire partie des privilégiés qui assistèrent au dernier concert public de Martial Solal, à Paris, salle Gaveau, le mercredi 23 janvier 2019. Je vous renvoie à ma chronique du concert pour cueillir mes impressions du moment.
Martial Solal est né à Alger le 23 août 1927. La seule drogue de sa vie, c'est la musique. Il ne peut s'en passer mais elle ne nuit point à sa santé. C'est pourquoi il joue et compose toujours mais chez lui. Martial Solal avait déjà arrêté le piano dans les années 2000 puis repris à la demande de son coetano Lee Konitz (1927-2020).
Martial Solal avait joué à Paris, salle Gaveau en trio avec Guy Pedersen (contrebasse) et Daniel Humair (batterie) pour le premiers concerts de Jazz donnés dans cette salle vouée à la musique dite classique. C'était le 3 mai 1962 et le 11 décembre 1963. Je n'y étais pas mais j'ai une excuse valable. Je n'étais pas né.
Pour clore sa carrière sur scène, jusqu'à nouvel ordre, Martial Solal avait donc décidé de revenir à Gaveau mais en sa seule compagnie le mercredi 23 janvier 2019. Daniel Humair était dans la salle comme auditeur.
Ce concert est désormais accessible à tous mais pas dans son intégralité. Certains morceaux du concert ont disparu dans cette édition mais ce qui reste vaut l'acquisition. En musique, le diamant est vendu au même prix que le plastique. Ici, c'est un diamant taillé de la plus belle eau vendu au même prix que n'importe quelle collection de tubes (le tube est un cylindre brillant à l'extérieur et creux à l'intérieur comme l'expliquait Boris Vian, ingénieur centralien et musicien, chanteur, producteur, critique de musique, écrivain). Profitez en, lectrices sélectives, lecteurs exigeants. La pochette de l'album est ornée d'une peinture d'Anna Solal, l'épouse de Martial. A apprécier en grand sur la pochette du vinyle. Texte de présentation par Martial Solal en français et en anglais.
Pour commencer, " I can't get started " (1), morceau fétiche de son ami Dizzy Gillespie. Non pas, comme l'explique Martial, parce qu'il n'arrive pas à démarrer mais pour se débarrasser de cet air qui lui trottait dans la tête depuis plusieurs jours.
Après cet échauffement, Martial Solal attaque directement le morceau le plus long du concert (11'40), une composition personnelle qui donne son titre à cet album , " Coming Yesterday " (2). Seul au piano, Martial Solal joue piano, contrebasse & batterie. Les échanges d'un trio en solo. Eblouissant. Cf vidéo sous cet article. Pour comparer, écoutez justement la version en trio avec NHOP (contrebasse) & Daniel Humair (batterie) qui ouvre un album majeur de Martial Solal, " Suite for trio " (1978). Martial Solal l'a joué aussi récemment en duo avec Dave Liebman (saxophones).
Vient ensuite un hommage à son Maître, Duke Ellington avec un " Medley Ellington " (3) dont Martial Solal a le secret. Evidemment, " Caravan " y figure mais pas seulement. Je vous laisse trouver les thèmes ellingtoniens, cachés dans le labyrinthe solalien, lectrices exigeantes, lecteurs sélectifs.
Après quoi, un petit jeu typique de Martial Solal. Transformer une comptine enfantine sans intérêt, " Frère Jacques " en une composition intéressante ," Sir Jack " (4). Soyez bien attentifs, lectrices exigeantes, lecteurs sélectifs car ce thème est un fil rouge qui revient régulièrement, sous diverses formes, dans les morceaux suivants du concert. Je vous laisse le plaisir de les trouver. Cf extrait audio au dessus de cet article.
Le reste du concert est composé de standards immarcescibles auxquels Martial Solal continue de donner de l'intérêt grâce à sa technique, son invention, sa fraîcheur et sa sensibilité. " Tea for two " (5), " Happy birthday " (6), " Lover Man " (7), " I'll remember April " (8), " My funny Valentine " (9) & " Have You met Miss Jones " (10). Avec des citations de " Frères Jacques " alias " Sir Jack " (4) parsemées ici et là. Pour finir en beauté, un dernier accord conclut le propos.
Bref, vous l'aurez compris, lectrices exigeantes, lecteurs sélectifs, ce concert parisien de Martial Solal publié sous le titre " Coming Yesterday ", conjugue passé et futur au présent mais toujours au plus que parfait. C'est le testament musical public d'un Grand Maître du Jazz, Monsieur Martial Solal. Mélomanes et musiciens peuvent puiser dans cette fontaine de jouvence à volonté. Rien à ajouter.
La photographie de Martial Solal est l'oeuvre de l'Imputrescible Juan Carlos HERNANDEZ. Toute utilisation de cette oeuvre sans autorisation de son auteur constitue une violation du Code de la propriété intellectuelle passible de sanctions civiles et pénales .