Mis sous pression par le Fonds monétaire international (Fmi) qui exige une reddition des comptes sur les fonds affectés à la riposte contre le Covid-19, Paul Biya se trouve entre le marteau et l’enclume d’un remaniement ministériel pour permettre au ministre d’État ministre de la justice d’engager des procédures judiciaires ouvertes contre les coupables de détournements, des malversations financières et tous ceux qui ont commis diverses forfaitures.
La présidence de la République tient désormais le rapport de l’audit commandé à la chambre des comptes de la Cour suprême commise pour connaître de la gestion des fonds affectés à la lutte contre le coronavirus. La diligence et la célérité avec lesquelles le Minetat/Sgpr veut faire conduire les poursuites judiciaires et le châtiment des auteurs presque jugés coupables des différentes forfaitures managériales, étonnent. Dans un pays où l’inertie, l’immobilisme et le laxisme sont un sport favori, dans un système du Renouveau devenu le cimetière des audits comptables de gestion, des enquêtes sur les forfaitures impunies, il y a comme de la suspicion et quelques curiosités dans l’accélération des procédures. Pourquoi cette envie subite et soudaine de traquer les coupables?
« En vous faisant tenir ci-joint thermocopie du rapport de la chambre des comptes de la Cour Suprême, relatif à l’objet repris en marge, j’ai l’honneur de vous répercuter les hautes directives du chef de l’État, prescrivant l’ouverture d’une enquête judiciaire contre les auteurs, coauteurs et complices des cas de malversations financières y relevés ». Cette correspondance du Minetat/Sgpr au Ministre d’État, ministre de la justice, Garde des Sceaux en date du 06 avril 2021 se veut sentencieuse. Elle résonne tel un cuisant aveu de détournement et des malversations financières sur les fonds affectés à la lutte contre la pandémie du Covid-19.On peut penser que la présidence de la République a déjà ciblé, connaît les coupables et auteurs des crimes économiques sur la fortune publique.
Rappel de mémoire
Le 22 juillet 2020, à la suite d’une loi de finances rectificative votée en juin au parlement, le premier ministre signe un décret portant la dotation du fonds spécial de solidarité nationale pour la lutte contre le coronavirus et ses répercussions sociales et économiques. Le montant est de 180 milliards de Fcfa. Soit 135,66 milliards de cette enveloppe provenant du Fonds monétaire international (Fmi). La répartition est de 131,9 milliards pour les dépenses de fonctionnement et 48 milliards pour les dépenses liées aux investissements. Le ministre de la santé publique s’en sort avec une enveloppe de 45 milliards alors que les 135 milliards restants sont affectés aux autres départements ministériels, aux entreprises publiques et aux établissements publics administratifs.Moins d’un an après, des soupçons de corruption, distractions, malversations financières et les détournements de fonds publics cristallisent et ébranlent les arcanes du pouvoir.
Dans un contexte où le Cameroun est sur pilotage automatique, alors que la gouvernance par procuration est actée, Ferdinand Ngoh Ngoh, est une fois de plus à la manœuvre. Le Minetat/Sgpr qui règne sans partage avec des formules du genre, sur « très grande approbation », « très hautes instructions », « haut accord » du président de la République, que personne ne peut vérifier, ni contester a dans sa ligne de mire, des agneaux du sacrifice et des victimes expiatoires qu’il veut faire guillotiner, conduire à l’échafaud ou brûler sur le feu de l’autodafé. Il reste que le vice-Dieu pour passer ses « cibles » à l’inquisition, a besoin d’un bourreau chargé d’actionner la moulinette broyeuse. Ce dernier n’est autre que Laurent Esso, ministre d’État, ministre de la justice et Garde des sceaux. L’heure est grave. La sérénité est absente. Certains membres du gouvernement ont perdu le sommeil.
Panique à bord. Chasse aux sorcières.
Règlements des comptes en perspective
Le bateau dans la tourmente. Rien ne va plus dans le gouvernement camerounais. À cause de cette affaire de 180 milliards, des fonds dégagés pour la riposte contre la pandémie du Covid-19, le gouvernement du Renouveau vacille. On pourrait même dire que certains ministres du gouvernement Joseph Dion Ngute ont le feu aux fesses. Face à la sollicitude du pays de Paul Biya dont le besoin de nouveaux financements se fait ressentir, le Fmi a fermé les robinets. L’éventualité d’un nouveau déblocage des fonds est soumise à la condition pour le Cameroun de présenter le compte d’emploi, mieux la reddition des comptes de la rondelette somme de 180 milliards Fcfa. Devant l’insistance du Fmi, le branle-bas gouvernemental est d’autant plus visible dans la mesure où plusieurs ministres ont été éligibles à ces fonds Covid-19. Plus grave la pression du Fmi arrive alors que l’attente d’un remaniement gouvernemental est de plus en plus grandissante et d’actualité. Le pays ressemble étrangement à la caverne d’Ali Baba.
Agissant comme le patron de l’administration à la présidence de la République, véritable ministre des marchés publics, le ministre d’État/Sgpr est dans le costume du propriétaire de tous les dossiers. Dans sa correspondance au Ministre d’État, ministre de la justice, Garde des Sceaux, tout laisse croire que le président de la République Paul Biya piaffe d’impatience et veut rapidement voir les coupables dans les fils barbelés ou traduits devant le tribunal criminel spécial (Tcs). On peut questionner l’ampleur des « bravades », la démonstration de pouvoir et d’autorité qui dénotent de l’emprise, la forte centralisation des pouvoirs du président de la République Paul Biya, délégués au Minetat/Sgpr, Ferdinand Ngoh Ngoh. L’opportunité de sévir et la traque contre les auteurs des détournements et distractions des fonds Covid-19 par Ferdinand Ngoh Ngoh sur les hautes directives du président Paul Biya relance le débat sur l’isolement, « l’asile » physique et suspect du chef d’État, président de la République Paul Biya.
Remaniement ministériel à tout prix
Si tant est que Paul Biya est celui qui a ordonné les poursuites judiciaires contre les détourneurs de fonds Covid-19, on peut penser qu’un réaménagement gouvernemental est imminent ou d’actualité. Après le cas du ministre Louis Bapes(de regretté mémoire) écroué à la prison de Kondengui alors qu’il était encore en fonction, il va être difficile pour le président Paul Biya de passer à la phase punitive ou à des sanctions rigoureuses sans avoir déchargé certains de ses collaborateurs de leurs fonctions surtout s’agissant des membres du gouvernement. Toutes choses qui font planer les grandes frayeurs et des vives paniques. Si la chambre des comptes a enquêté dans tous les ministères et administrations publiques, c’est la fin qui justifiera les moyens. Il faut que chaque Ministère et administration rende compte de l’usage des fonds Covid-19. Que les coupables soient tous sanctionnés par la Loi.
Un doigt accusateur contre Manaouda Malachie
Dans l’attente que le Consupe rende sa copie de contrôle au Minsanté, des observateurs curieux s’interrogent sur la fixation faite au ministère de la Santé publique. Tout se passe comme si le ministre Manaouda Malachie est la cible principale visée; l’agneau par lequel le sacrifice doit commencer. Après avoir prescrit par correspondance le 29 mars 2021, l’accélération de la mission d’audit sur la gestion des fonds Covid-19 au ministère de la Santé publique, le président de la République à travers une autre lettre adressée au ministre de la Justice Garde des Sceaux, ordonne l’ouverture d’une enquête judiciaire contre « les auteurs, coauteurs, et complices des cas de malversations financières » desdits fonds.
Cet emballement aux allures d’acharnement et de chasse aux sorcières a tout l’air d’un règlement de compte. « C’est comme si Ferdinand Ngoh Ngoh veut assouvir ses règles de grandeur sur Manaouda Malachie », lance un magistrat. À l’observation, tout s’apparente à une conspiration. Certains cadres du ministère de la santé publique se disent embêtés par le fait que cette cabale dispersé les énergies des troupes qui malheureusement ne se concentrent plus sur la prise en charge des cas . Mais sur la recherche des documents justificatifs de telle ou telle autre chose. Surtout que tous sont scandalisés par les montants qu’on veut faire croire que le Minsanté aurait reçu.
Les 180 milliards de la riposte nationale contre le Covid-19 au Cameroun étaient destinés à plusieurs ministères et administrations. Pourquoi se focaliser sur le Ministère de la Santé publique qui avait une dotation de 45 milliards sur 180. Il y a urgence à rechercher ce qui a été fait des 135 milliards répartis aux autres ministères et administrations certes. Une simple focalisation sur Manaouda Malachie, pourrait biaiser les procédures.