Il y a la station Noovo, au Québec, qui a fait une très large publicité du fait qu'ils rendront l'actualité dans ce qu'on appelle partout: les nouvelles, et qu'eux appelleront, le fil. Ça doit faire facilement un mois, avant la première fois en ondes, qu'on nous annonce qu'on fera les nouvelles. Cette semaine (je crois) était leur première.
Vous me connaissez, je fuis la publicité. Quand elle m'atteint, c'est qu'elle m'a trouvé, jamais l'inverse. Elle a donc atteint son but. Et les nouvelles sur la station Noovo m'ont été annoncées de partout avec un certain succès. Assez en tout cas pour que ça finisse par m'agacer et me faire réfléchir sur cet agacement.
Toute publicité étant une agace-pissette, je n'apprend rien à personne.
Je ne l'ai pas écouté ce fil. pas même par erreur. Je ne peux donc pas juger de son contenu et n'ai pas envie de le faire. Qui serais-je pour le faire? Mais je peux vous dire clairement ce qui m'agresse dans la publicité des nouvelles.
Le show qu'on essaie de nous vendre. Je sais, JE SAIS, c'est essentiel et tout est une question de charme en tout temps entre nos télés et nos salons. Il est absolument normal de nous vendre les personnalités qui nous lirons/ rapporterons/commenterons l'actualité. L'insistance avec laquelle on a présenté "une certaine réinvention de la livraison des nouvelles" m'a chatouillé aux mauvais endroits. Ils ont tous fait bien attention pour ne pas dire le très rébarbatif "réinvention du concept", mais ça sonne comme un canard, ça marche comme un canard, ça ressemble à un canard et calisse, c'est un canard, même si tu me dis que c'est un oiseau de la famille des anatidés.
J'ai utilisé quelque chose de très important dans ce que j'attends, de plus en plus en vieillissant, des nouvelles: la livraison des nouvelles. La plate et simple livraison de la nouvelle, sans émotion. La dynamique télévisuelle chez moi est très tranchée. Je n'écoute pratiquement que Radio-Canada (les actualités en tout cas) tandis que ma conjointe se stationne toujours à TVA. Comme je ne fais pas exprès pour l'offenser, j'assiste donc beaucoup aux programmes de TVA, bien malgré moi. Comme la musak peuple les foires en trame sonore de fond. Je râle assez souvent, je l'avoue. Mon cynisme doit se doser quand TVA sévi. Quand elle n'est pas devant et que la télé est sur TVA, j'ai toujours le réflexe de le changer à Radio-Canada. On s'équilibre comme ça.
À TVA on commence très, TROP, souvent les nouvelles par "Imaginez...". Juste à vous l'écrire, sans efforts, mentalement, j'ai vu Pierre Bruneau, Michel Jean et Sophie Thibault le dire dans ma tête. "Imaginez que vous aviez rendez-vous pour une chirurgie et..."
NON!
NON.
JAMAIS.
Jamais je ne veux imaginez mes nouvelles. je veux entendre les faits froidement et me ferai ensuite une tête, je ne suis pas un idiot. Imaginez l'actualité c'est le pain et le beurre des covidiots, des Marjorie Taylor Greene, Alex Jones, RadioX et leurs semblables. C'est la base de toute fabrication.
Imaginez ça se trouve ailleurs.
Quand j'imagine je pense à cette fille que je connais qui pleure chaque fois qu'elle joue de son violon. Je m'imagine que les sons qu'elle produit avec son instrument la touche tant, que les notes sont si pures, que les larmes naissent toutes seules. Et que c'est une mélodie encore plus belle et satisfaite qu'elle pleure du regard.
Ça, c'est imaginer. Mais si tu me parles d'un drame survenu à Mascouche, d'un féminicide, de n'importe quoi, je ne veux pas te voir le "feeler" comme disent mes jeunes. Tu es l'annonceur dans un match de hockey. Le reste, on le voit et on le comprend. Bien que le fil (justement) Twitter ne relève pas toujours les commentaires les plus édifiants, et trahit souvent des tempérament tout simplement épouvantables, nous ne sommes pas des enfants qui aient besoin de se faire prendre par la main pour se faire une idée de ce qui se passe. Et si nous étions enfants, christ, j'espère qu'on vous mépriserais encore de nous demander d'imaginer la nouvelle au lieu de l'entendre.
Spotify vient de lancer des capsules d'informations ("Mon daily" surement issu de France pour utiliser un mot anglais inutilement...) ou se croise brièvement l'actualité et la musique. C'est de plus en plus populaire. Écourter la formule des nouvelles afin de ne pas la surjouer autrement. Voici l'essentiel. Pas de mise en scène.
TVA, quand vous y êtes régulièrement, plante tous les jours de longues publicités, qui ne sont pas du tout des nouvelles, pour leur propre programmation. Je ne doute pas que Noovo fera aussi ça. Ils ont pleins de nouvelles séries, produites ici, dont plusieurs me tente vraiment. Et ce qu'il me vende depuis un mois, c'est une manière de livrer l'information. Différemment.
J'aurais envie qu'ils soient sobres et froids. Je ne crois pas qu'ils le seront. Ils veulent vendre des personnalités. Ils montent un show, comme dans un cirque. C'est ce qu'ils veulent aussi vendre. Des interprètes au lieu de messagers.
Pas un rendez-vous qui me tente tellement.
Les faits, donne-moi juste les faits. Je m'organise avec le reste. Vous n'avez pas à éduquer, surtout pas à émouvoir quiconque. Le charme suivra si vous êtes vrais.
Maintenant plus que jamais, on a envie du vrai.