Le tribunal a renvoyé la cause au 04 Mai 2021 exactement dans 5 semaines pour délibérer sur les exceptions (nullité de la procédure et incompétence du tribunal).
Le 23 mars dernier au cours de l’audience, la Présidente du Tribunal a rejeté la demande de mise en liberté provisoire, et l’affaire a été renvoyée au mardi 30 Mars, pour que la défense puisse présenter ses exceptions (nullité de la procédure & incompétence du tribunal). Le 30 mars dernier a eu lieu une autre audience au cours de laquelle les avocats de la défense ont présenté leurs arguments en faveur de la nullité de la procédure pendant un peu plus de 4h. A la suite de quoi, le substitut du procureur a présenté son réquisitoire pendant 15 min, à charge contre les inculpés. La Présidente a finalement renvoyé au 04 Mai (dans 5 semaines) pour délibérer sur les exceptions (nullité de la procédure et incompétence du tribunal).
Il faut remonter au début 2019 pour comprendre les subtils contours de cette affaire. Au lendemain de l’élection présidentielle de 2018 et à la suite d’un remaniement ministériel, un nouveau Directeur Général a été nommé à la tête de la SONARA. Les négociations non-abouties qui étaient en cours pour résoudre les questions bilatérales entre SONARA et GULFIN connaissent un ralentissement, le temps pour le nouveau DG de prendre connaissance des dossiers.
Une des conséquences immédiates des difficultés avec la SONARA est que la trésorerie de GULFIN est de moins en moins disponible et l’entreprise est de plus en plus en difficulté avec les armateurs propriétaires des navires affrétés et particulièrement ceux du CAPE LIMBOH. Or, ce navire est la pièce maîtresse du modèle économique de GULFIN depuis la perte du transport du Brut, et c’est avec celui-ci que la Société assure le cabotage entre Limbé et Douala. En même temps que les négociations avec SONARA pour la clôture du contrat de cabotage (2015/2018) entre Limbé et Douala sont conduites, GULFIN se prépare pour les appels d’offres à lancer par la SONARA tant pour un nouveau contrat de transport des bruts nécessaires à l’activité industrielle du raffinage, que pour le nouveau contrat de cabotage, pour la période 2019/2022. Parallèlement, GULFIN accélère la recherche de partenaires pour le Trading. La grande difficulté est que ces Traders sont habitués à des niveaux de prix élevés dans la cadre des importations de produits pour le marché camerounais, et ils rechignent à offrir des prix plus bas, compatibles avec les offres négociables avec nos clients. C’est dans cette situation que l’ADGA (Mme SOPPO PRISO) informe le DG (M. IYODI) d’un contact « avancé » qu’elle a avec les représentants d’un Trader nommé PEG (Petroleum, Energy and Gas) qui est opérationnel à Singapoure et a un bureau régional à Naïrobi. Une rencontre technique a lieu entre ces représentants et les collaborateurs de la Division des Transports et des Approvisionnements de GULFIN. Cette rencontre donne lieu à un rapport présenté à l’ADGA qui précise les opportunités, avantages et inconvénients de l’offre de PEG. Pour GULFIN, pouvoir trouver un Trader qui fournisse les produits recherchés à des prix intéressants, permettrait de déployer un modèle économique plus stable et plus performant.
C’est dans cette atmosphère de discussions entre GULFIN et PEG qu’intervient l’incendie totalement inattendu de la SONARA le 31 Mai 2019. Contrat de fournitures et d’achat avec PEG A l’analyse des offres des traders consultés et de PEG, l’ADGA (Mme SOPPO PRISO) et le DG(M. IYODI) conviennent qu’il est opportun de passer une convention commerciale avec PEG. Ce Trader fait venir à Douala son Directeur Régional pour l’Afrique, Mr Gilbert NGUGI NDWIGA avec qui le DG signe le 20 Juin 2019, le « Sales and Purchase Agreement » (SPA).La base globale de cet accord commercial prévoit que PEG vendrait à GULFIN sur une période de trois (3) ans, une quantité totale de 180.000 tonnes métriques TM de Super et 180.000 tonnes métriques de Gasoil, soit une moyenne mensuelle de 10.000 tonnes métriques TM de l’un ou l’autre des deux produits. La première quantité minimale prévue livrée au mois de Juillet 2019, devait être de 3416 TM de Gasoil et 7630 TM de Super. Il y est prévu que le paiement se ferait à travers une « Stand-by Letter of Credit » (SBLC) qui couvrirait et financerait de manière répétitive ces fournitures de produits. La première conséquence évidente du sinistre du 31 Mai à la SONARA est l’arrêt de l’activité industrielle, dont la durée est estimée au moins à 4 années. Ceci conduit le Gouvernement camerounais à définir, dans le cadre de concertations avec différentes parties prenantes, un modèle d’approvisionnement en produits pétroliers calqué de l’expérience des arrêts de 2017 et 2018, à travers des importations à faire sur la base d’allocations accordées par le MINEE.
Au cours des premières discussions entre le Gouvernement et les parties prenantes, il apparait nécessaire de définir un schéma logistique qui tienne à la fois compte des capacités de stockage encore disponibles (ou à mettre à disposition) du côté SONARA, de celles limitées de la SCDP à Douala, couplées au potentiel de transport ferroviaire tout aussi limité sur Yaoundé, ainsi que du quai du PAD qui ne permet pas d’accueillir de gros navires. A cela s’ajoute le manque de ressources financières de l’Etat qui ne permettent plus de supporter d’importants « manques à gagner » à compenser aux importateurs dans le mécanisme de stabilisation des prix de distribution. En attendant de pouvoir concilier tout cela dans une formule logistique et financière équilibrée, toutes les suggestions ingénieuses raisonnables sont sollicitées. Il est convenu que le MINEE continue à attribuer des allocations d’importations. Tous ceux qui possèdent un agrément d’importation s’efforcent d’obtenir autant d’allocations du MINEE qu’ils le souhaitent. La SONARA qui fait partie des importateurs ne reçoit pas la majeure partie des allocations. C’est dans un tel contexte que la Direction Générale de GULFIN prend deux initiatives : Proposer un schéma logistique innovant au Gouvernement et Candidater aux allocations aléatoires du MINEE.
La Direction Générale de GULFIN adresse au Premier Ministre, chef du Gouvernement, au Secrétaire Général des Services du Premier Ministre, coordinateur de la Cellule gouvernementale de crise post-sinistre SONARA, et au Ministre del’Eau et de l’Energie, la proposition de schéma logistique suivante : « Allouer 60% des importations (base 180.000 m3/mois) à la SONARA pour lui assurer une activité économique avec des rentrées financières permettant de résoudre son endettement. La SONARA ferait venir du produit par vaisseau-mère à décharger partiellement dans ses stockages, et partiellement par cabotage vers Douala. Allouer les 40% restants à GULFIN qui ferait également venir (par le tandem GULFIN/SOLSTICE) un vaisseau-mère par période bimestrielle au large de Douala ou au Port autonome de Kribi, et à partir duquel par des opérations ship-to-ship (STS) des navires de GULFIN qualifiés feraient la navette de livraison au port de Douala ». Cette proposition se retrouve noyée au milieu d’autres au MINEE, qui dans un premier temps continue ses allocations comme par le passé, pendant près de 9 mois après le sinistre de la SONARA. En début d’année 2020, le MINEE sur instruction du Gouvernement et en synergie avec la CSPH, va opter pour des appels d’offres entre Traders afin de sélectionner les fournisseurs de produits aux importateurs attributaires des allocations.
Déjà, dès Juin 2019, lors de la grande réunion de gestion de la crise post-sinistre SONARA tenueà la Primature à Yaoundé, le Gouvernement décide d’approvisionner le pays par des importations directes sur une période pouvant courir jusqu’en fin 2019. Le DG postule d’entrée de jeu pour GULFIN, demandant une allocation globale de 15000 m3 de Super, et 15000 m3 de Gasoil. Cette demande est qualifiée au MINEE de trop ambitieuse, pour une société s’étant jusque-là tenue loin des opérations d’importations de produits, mais ayant aussi, il y a plusieurs années, décliné une attribution d’importation de Gasoil qui lui avait été faite. Le MINEE est sceptique quant à la capacité de GULFIN à réaliser cette importation sollicitée, excluant l’entreprise dans un premier temps de la première liste de distribution des allocations. Par plusieurs relances insistantes, le Ministre consent à allouer partiellement les quantités demandées (10.000 m3 Super et 4000 m3 Gasoil pour le compte du mois de Juillet 2019), puis presque harcelé par le DG, attribue une seconde allocation à GULFIN (12.000 m3 de Gasoil pour la période d’Août à Septembre 2019).
Recherches de financement des importations.
En tandem avec l’ADGA, le DG organise une équipe multidisciplinaire des services de la DAF et de la DEO (Direction des Exploitations et des Opérations) pour la recherche des concours de financements auprès des diverses banques de la place. A l’indication du PCA, le DG rencontre également des patrons de sociétés d’assurances pour solliciter le concours financier nécessaire. La situation des finances de GULFIN n’est pas très encourageante pour ces différents établissements, même si le projet présenté leur semble intéressant. GULFIN va essuyer plusieurs refus et même un désistement de la Banque -Société Générale, qui avait dans un premier temps accepté d’ouvrir une Lettre de Crédit (aucune institution n’étant favorable pour une SBLC pour GULFIN dans la situation de ce moment-là). La BGFIBank, après avoir d’abord rejeté le dossier de GULFIN, va finalement consentir à ouvrir une Lettre de Crédit (LC). Mais celle-ci ne couvre que la moitié de la valeur totale des produits de la première commande minimale prévue par le SPA. Il faut alors trouver une Lettre de Crédit complémentaire pour la première commande, mais il se pose également le problème du financement de la cargaison additionnelle pour effectuer l’opération d’importation globale de l’allocation qui a été accordée à GULFIN…La suite on la connait.
M. IYODI quitte la Société GULFIN le 07 Avril 2020 avec plusieurs mois d’aérés de salaires. Au mois d’Août 2020, il introduit un dossier de réclamation de ses aérés de salaires auprès de l’Inspection du Travail du Littoral. GULFIN rejette le bien-fondé de ces réclamations et la non-conciliation est actée. M. IYODI porte par la suite plainte à GULFIN au Tribunal de Première Instance du Littoral pour salaires impayés. En représailles à cette plainte, la Société GULFIN va engager une poursuite contre le sieur IYODI au pénal, pour abus de confiance aggravé. La gestion de cette plainte va conduire au déferrement devant le parquet puis à la mise en détention provisoire de M. IYODI (ancien DG – GULFIN), Mme SOPPO PRISO (ancienne ADGA – GULFIN), M. NLEND (ancien Chef de Division Transports – GULFIN), M. FONHOUE (Agent commercial de PEG) et Mme MOUKOURY (ancienne gestionnaire de compte SGC de GULFIN).