Alors qu’on croyait l’avoir réduit au silence après la fameuse saga d’écoutes téléphoniques impliquant certaines pontes du régime, le président directeur général du Groupe l’Anecdote renaît de ses cendres à travers une invitation dument signée du président de la République centrafricaine, l’invitant à la cérémonie d’investiture prévue le 30 mars prochain.
La lettre d’invitation qui porte à son entête, les sceaux de la Rca, est signée du Pr Faustin Archange Touadera en personne. Si les autres cartons d’invitation portés à l’adresse des hauts responsables du gouvernement camerounais sont signés du protocole d’Etat, celui de Jean Pierre Amougou Belinga en fait l’exception. En dehors du style qui se plie à certains usages protocolaires, le ton est amical, convivial, hospitalier pour dire le moins. C’est un vieil ami qui écrit à son compère et non moins partenaire d’affaires dont il berce le vœu de sa présence en une circonstance aussi symbolique pour l’histoire de ce pays d’une population qui s’élève à 4, 745 millions d’habitants pour une superficie de 622, 984 m2.
« J’ai l’honneur de vous informer que le peuple centrafricain m’a renouvelé sa confiance en me réélisant à la magistrature Suprême de l’Etat, avec 5.33,16 %, à l’issue du premier tour de l’élection présidentielle du 27 décembre 2020, pour un deuxième mandat de cinq (05) ans.Aussi, ai-je le plaisir de porter à votre connaissance que la cérémonie d’investiture se déroulera le 30 mars 2021, à Bangui.C’est avec une immense joie que je vous convie à bien vouloir rehausser de votre présence cet évènement historique qui marquera l’ancrage démocratique de la République Centrafricaine, voulu par le peuple centrafricain.Nous nous réjouissons à la perspective de vous accueillir à cette occasion ainsi que votre délégation.Je vous prie de croire, monsieur le président directeur général, à l’assurance de ma haute considération », peut-on lire sur la correspondance officielle dont le Messager a obtenu copie.
Indispensable pour la Rca
Donné pour mort dans le milieu des affaires et paralysé politiquement par des ennemis tapis dans l’ombre à la Présidence de la République, Amougou Belinga, de l’avis des observateurs,se positionne désormais comme un élément indispensable dans la coopération qui existe entre le Cameroun et la Rca. Classée 188e sur 189 pays dans l’Indice de développement humain du Programme des Nations unies pour le développement (Pnud) de 2019, ce pays dont les populations vivent sous le seuil de pauvreté (Banque mondiale), a cruellement besoin d’investisseurs pour sortir des profondeurs abyssales ; il doit aussi multiplier des partenaires sur le plan économique afin de mettre en lumière, la richesse de son sous-sol composé d’uranium, de diamant et d’or que se disputent les groupes armés. Idem pour les autres productions telles que le coton, le café et le tabac.
Qui mieux que celui qui est par ailleurs fondateur de l’Institut supérieur des sciences, arts et métiers (Issam) et dont les réalisations en matière de communication et télécommunications sont palpables sur le territoire centrafricain ? Tenez par exemple ! Vision 4 Tv Rca est une chaine à part entière et donc avec une unité de production complète, avec ses programmes, ses journalistes, son personnel technique, est depuis quelques années, la première chaîne Tv à voir le jour et de l’avis des dirigeants centrafricains, renforce le travail de promotion de l’image que fait la télévision nationale créée dans les années 70 et entièrement réhabilitée par celui qu’on surnomme affectueusement « le pape des médias ». C’est dire que Touadera a tout à gagner en continuant de faire affaire avec un homme de la stature de JPAB dont l’influence, l’expérience et la grande connaissance du milieu des affaires, sonne comme un sérieux argument qui parle en sa faveur.
La voie vers le palais…
Son parcours l’illustre d’ailleurs à la perfection. Présenté comme un self made man issu de la classe prolétaire, il a dû cravacher dur pour réaliser ses projets, aujourd’hui objet de convoitise et à l’origine de certaines batailles au sommet de l’Etat. Très jeune, il a été confronté à la réalité et la rudesse de la vie. C’est en faisant les petits métiers qu’il réussira parfois à avoir de quoi manger. L’entrepreneur avoue avoir travaillé pour un restaurant à Yaoundé où il avait pour salaire 3000 Fcfa/mensuel dont l’employeur n’avait jamais versé la totalité de son salaire à la fin du mois. Exit cet épisode, il entre dans l’univers de la presse comme jeune reporter pour les journaux à Yaoundé. Son admiration pour les pionniers comme feu Pius Njawé, Séverin Tchounkeu et autres patrons de presse à la notoriété établie, va le pousser à bosser plus dur. Avec le vent de la démocratie qui souffle sur le Cameroun dans les années 90 accompagné par la libéralisation de plusieurs secteurs notamment celui de la presse, en 1995 Jean Pierre Amougou Belinga décide de se lancer dans l’entrepreneuriat en créant le journal « l’Anecdote ». Honni, vomi et vilipendé par « ses frères Beti », il se retourne vers certains aînés originaires d’autres tribus qui acceptent de le tenir par la main pour affronter les milieux du pouvoir et lui « ouvrir la voie vers le palais ».
Expérience et maturité
Malgré les difficultés tant financières qu’administratives que rencontrent les organes de presse au Cameroun, l’homme va tenir la dragée haute et continuer à développer son organe de presse. Après le journal Anecdote, le magazine Africa Express suivra avant de disparaître par la suite avant de revenir sous le nom d’ « Express International ». Aujourd’hui propriétaire de Télésud, Vision 4 Rca, Vision 4 Cameroun et Vision 4 Congo, il a grandi en maturité, en expérience et même en influence. D’où ses liens d’amitié très soudés avec les chefs d’Etat Obiang Nguema de la Guinée Equatoriale, Denis Sassou Nguessou du Congo-Brazzaville, Faure Gnassingbé du Togo et surtout Faustin Archange Touadera qui mise sur lui pour redresser la Rca. Ami personnel et par ailleurs conseiller de ces présidents africains avec lesquels il ne partage pas que des cacahuètes, Amougou Belinga et sa fortune (colossale) inquiètent ses détracteurs tapis dans le sérail.
Manœuvres
Même s’il est loin d’être blanc comme neige, le premier mérite qu’on lui reconnaît, c’est de contribuer à la croissance et au développement de son pays. L’entrepreneur qui est en passe de bâtir des tours jumelles à Warda, se bombe le torse de soutenir bec et ongles, Paul Biya et sa politique pour le Cameroun. N’en déplaise à ceux qui ont choisi d’utiliser leur fortune à des fins inavouées.Dans l’entourage de ce dernier, les noms de Ferdinand NgohNgoh et le contre-Amiral Joseph Fouda résonnent telle une ritournelle. A en croire nos sources, le ministre d’Etat, Secrétaire général à la présidence de la République et le conseiller spécial du président de la République seraient à la manœuvre de ce funeste dessein.
Si le premier dispose d’une délégation de signature du chef de l’État, ce qui lui permet d’agir sur « hautes instructions » et jouir d’un supplément de puissance et d’influence, le second plus discret, œuvre dans l’ombre et aurait même encouragé le premier de mettre toutes les batteries en marche pour « avoir le scalp d’Amougou Belinga ». C’est peut-être pourquoi cette renaissance du « Zomloa » n’est-elle pas perçue comme un soulagement au sein de la grande communauté Beti du Centre qui n’a jamais digéré l’humiliation qu’a subi leur fils de la part de ses propres frères, déterminés à le voir couler.