J'avais visité Brouage à la mi-septembre.
S'il était demandé d'être prudent, nombre de commerces étaient encore ouverts. On déambulait sur les rues pavées et visitait les galeries d'art qui lui donnaient un petit air de Saint-Paul-de-Vence, en plus modeste, mais charmant.
Il était agréable de s'imaginer prendre l'air marin depuis les remparts et de guetter un vol d'aigrette, reine au sein de cette réserve naturelle.
J'avais découvert la reconnaissance que les québécois vouent à un enfant du pays, Samuel de Champlain (1567-1635) lequel après avoir découvert le Canada ouvrit la porte de l’immigration charentaise vers ce nouveau monde qui attira les esprits les plus entreprenants.
J'ai profité d'un aménagement du confinement pour retraverser la ville le 2 décembre dernier. Malgré le soleil, les rues étaient désertes et son éloignement du littoral semblait la cause d'une désaffection qui n'avait aucun rapport avec cette évolution.
Comment imaginer dans ces conditions que Brouage fut autrefois un port stratégique concurrent de La Rochelle ? La bourgade semble perdue à une dizaine de kilomètres du rivage. Comme quoi tandis que la mer grignote du terrain d'un côté, elle le rend d'un autre.Si l'on y voit encore de l'eau c'est celle des marais qui l'entourent. Les remparts sont demeurés intacts, à l'exception de la porte d’Hiers, au sud, partiellement détruite, qui ouvre sur la place d’Armes et les anciennes casernes. Les fortifications sont imposantes, composées de sept bastions reliés par des courtines de onze mètres de haut et ponctués d'une vingtaine d'échauguettes d'où l'on aperçoit la mer au lointain.
Ces murs ont été construits entre 1630 et 1640 sous la volonté de Richelieu. On pouvait alors entreposer dans la poudrière jusqu'à vingt tonnes de poudre. La gloire de la place fut aussi rapide que l'arrivée de son déclin. Elle ne resta pas longtemps concurrente de La Rochelle. Comment aurait-elle pu se maintenir alors que le port s'envasait ? Et puis Rochefort lui fit de l'ombre.
Brouage déclina, fut abandonnée par les militaires même si de nombreuses écoles subsistent dans la région.La ville fut le théâtre de plusieurs épisodes épisodes historiques. En septembre 1659, c'est là que le jeune Louis XIV (il n'a que 21 ans) revoit pour la dernière Marie Mancini dont il est éperdument amoureux mais à qui il devra renoncer pour épouser Marie-Thérèse d'Autriche. Un escalier porte son nom, rappelant sa tristesse.
Un autre personnage célèbre a marqué la ville au XVII° siècle, Champlain, l'officier de marine cité plus haut qui entreprit son périple au Canada dès 1603. Il fit récit de ses voyages et découvertes auprès de ceux qu'il désigna sous le terme d'"Indiens sauvages".
Cinq ans après son départ, Brouage édifie l'église Saint-Pierre, à laquelle les Québécois offrirent sept vitraux illustrant la fondation de Québec.
Ce vitrail (ci-dessus) représente l'île Sainte-Croix et une statuette d'amérindienne est placée sur l'autel. Le vitrail de droite (ci-dessous) représente Montréal.
Une plaque mentionne que le vœu formulé par Champlain que l’on parle français au Québec a été exhaussé. C'est une consolation post-mortem pour cet homme, chassé par les anglais en 1629 du pays qu'il aima tant.