Certains sans-culottes avaient poussé leur Révolution jusqu'à la Terreur, sans compter les vies à sacrifier, pour un crépusculaire Siècle des Lumières. Le sans-visage de la décennie pandémique s'efforce de préserver sa vierus et celle des autres.
Se garnir d'un Pampers facial, avec petits élastiques bien tendus derrière les oreilles, pour limiter toute expression contaminante. Ce bleu délavé de déplacement ronge le visage, rectangle-linceul de l'humanité.
Respirer son air expiré pour ne pas empoisonner l'autre.
Ne pas supporter l'inconnu(e) à moins de deux mètres.
Désinfecter paumes et doigts à chaque contact : le toucher est désormais présumé infecté.
Enrager contre la patibulaire trogne à nu ou l'horripilant sous-nez (le masque) à qui il faudrait expectorer une bonne dose covidée.
À moi, l'enfermement apathique
Pour qu'aux tréfonds je me déchiquette
Et brise l'air asymptomatique.
Entre ces murs la vie léthargique
Fait lâcher la poudre d'escampette,
Cernée par les stats cadavériques.
Fauteuil paralysant enracine
À cran sur l'écran pour toute vie
Des touches sortent de blafards signes.
Confiné aux confins de moi-même,
Cadenassé de gestes barrières,
J'étreins la condition inhumaine.
Le vide éventre ce qui subsiste
En silence et surtout sans toucher
Le sens perdu de ce qui existe.
Gisant sans masque et les deux mains nettes,
Quatre murs, un plafond, un plancher,
Détresse exécutoire s'entête.