Cameroun : Orca, l’enfer des malades Covid ?

Publié le 25 mars 2021 par Tonton @supprimez

Ce centre de prise en charge, annexe N°2 de l’hôpital central de Yaoundé, est considéré par une bonne partie de l’opinion comme un mouroir. Qu’en-est-il exactement ? Enquête !

Dans la lutte contre la pandémie du Coronavirus au Cameroun, et particulièrement dans la région du Centre, le gouvernement a réquisitionné l’ancien bâtiment du supermarché Orca à Yaoundé, pour abriter l’un des plus importants centres de prise en charge des patients déclarés positifs au Coronavirus. Cette unité de riposte à la pandémie, dirigée par un urgentiste, Dr. Bonaventure Honlong, qui est opérationnelle depuis le 8 juin 2020 est également l’annexe N°2 de l’hôpital central de Yaoundé. Ce centre est doté d’une capacité d’environ 283 lits répartis selon les degrés de sévérité de la maladie. Le sous-sol a 23 lits pour les malades critiques. Le rez-de-chaussée a 60 lits pour les malades sévères. Et les deux derniers étages sont réservés pour les malades modérés, « mais qui ont besoin d’être suivis ». Un service qui fonctionne avec près de 200 personnels de médecins, infirmiers, aides-soignants, agents d’entretien, personnels de laboratoire, accompagnateurs psycho-sociaux et ambulanciers. Le centre dispose aussi d’une morgue temporaire qui lui permet de garder les corps en attendant l’arrivée des familles.

Statistiques satisfaisantes

Depuis le 8 juin 2020 au 18 mars 2021, le Centre spécialisé de prise en charge des patients Covid de l’ancien bâtiment Orca a déjà reçu 1602 patients, dont 1308 sont sortis guéris et 133 décès. Soit un taux « satisfaisant » de décès de 8%. Actuellement, apprend-on de source interne, le centre de Orca enregistre en ce moment près de 110 patients hospitalisés. Signalons que le centre dispose d’un plateau technique relevé qui permet à la fois de prendre les malades critiques pour les réanimer et aussi les suivre tout au long de leur séjour dans le centre. Il y existe également des respirateurs mécaniques, un laboratoire, une pharmacie, un service d’imagerie et des médicaments pour prendre en charge les maladies associées. Le protocole de traitement administré aux patients est celui validé par l’Organisation mondiale de la Santé (Oms) et le comité scientifique national. Qu’est ce qui explique donc cette réputation de « mouroir » que traîne ce centre ? « Quand un patient guéri sort du centre, il n’y a pas d’attroupements. Mais quand on fait une levée de corps, il y a un attroupement. Par conséquent, le grand public va penser qu’il n’y a que des décès, puisque c’est cet attroupement qui attire l’attention du public », explique le Dr. Bonaventure Honlong.

Rigueur

Dans cette unité spécialisée de prise en charge, la circulation est strictement réglementée. Thermo-flash à l’entrée, lavage des mains et solution antiseptique. A l’accueil, une cloison isole l’usager où il est soumis à une prise de température. Le Centre compte également trois unités importantes dont le poste de prise en charge, le poste de prélèvement et le poste de triage. Les repas sont aussi contrôlés. « Les patients admis dans ce Centre ont droit à trois repas par jour pour les maintenir en forme », explique une infirmière, qui a accepté de s’exprimer sous couvert d’anonymat. Au regard du risque infectieux de la maladie, poursuit notre source, les visites sont proscrites dans ce centre. « Je viens de passer un grand moment de ma vie au Centre de Orca. J’ai vu un personnel dévoué, plein d’abnégation, courtois, accueillant…», résume une ancienne pensionnaire de ce Centre, aujourd’hui gruerie. « Je suis satisfaite des conditions dans lesquelles nous sommes pris en charge ici. Les salles et les toilettes sont nettoyées à tout moment et le personnel de santé est très sympathique. Nous avons le wifi pour pourvoir nous connecter sur internet et discuter avec nos famille », se réjouit Thérèse, admise dans ce centre il y a 9 jours. Après son admission, la jeune dame de 30 ans, se sent beaucoup mieux. L’entretien qu’elle a accordé au reporter du Messager s’est fait par téléphone parce que l’accès au site des malades est interdit aux personnes étrangères.

La situation se dégrade

Pour éviter toute contamination du personnel soignant, « les autorités sanitaires ont mis à notre disposition un protocole qui exige le port de l’équipement de protection individuelle obligatoire avant d’entrer dans la zone de prise en charge », souligne un personnel médical. Avant le début de la thérapie, explique-t-on, les soignants préparent les malades au plan psychologique. Au cours du séjour hospitalier, si la situation se dégrade, le sujet en détresse respiratoire ou cardiaque est admis en réanimation. La surveillance devient alors plus rapprochée. Malheureusement, il est impossible pour les patients de savoir la personne si bienveillante sous les combinaisons de protection durant tout son séjour. Mais quand sonne l’heure du départ, le malade guéri tient à être reconnaissant. « Jusqu’ici, il y en a pas un qui rentre chez lui sans venir nous remercier », note une aide-soignante. Un acte qui, loin de l’ingratitude, est un bel élan de reconnaissance à l’endroit d’une équipe soignante, dévouée et engagée sans répit pour le front périlleux de la riposte au Covid-19.

Ahmed MBALA