l’Amour de Monsieur Martin (suite)

Publié le 25 juillet 2008 par M.

Elle joue du violoncelle à merveille. Ses longs cheveux blonds entourent son visage si doux, et ses mains virtuoses lui semblent des colombres, signes de paix, si bien qu’il se met à pleurer.

A la fin du concert, il la cherche. Et la trouve près des loges, dont elle vient de sortir. A sa droite un homme, grand, jeune et élégant. Monsieur Martin hésite un moment, puis se lance : il marche droit vers elle, la tête haute et le sourire aux lèvres. Quand elle le voit, elle lui sourit aussi : son coeur est prêt à exploser.


Les quelques mots qu’ils échangent sont un peu banals, mais encourageants. Elle lui laisse une adresse e-mail. Il promet de lui écrire.


En rentrant, il se jette sur son ordinateur et rédige la plus belle lettre d’amour qui soit. Il décide d’attendre quelques jours pour l’envoyer, il ne veut pas l’effrayer.


Six jours plus tard, Monsieur Martin décide que c’est bien. Il ira chercher le pain et les enfants à la gare, et après le déjeuner familial il s’éclipsera dans sa chambre et enverra sa bouteille à la mer.


Il est en avance à la gare. Vingt minutes. Il traîne un peu sur le quai, il aime regarder les gens, surtout les voyageurs, ils ont toujours quelque chose d’intéressant. Par exemple, la femme blonde qui semble lire son billet comme s’il était la bible, elle tire une valise deux fois plus grosse qu’elle. Et l’homme à la veste noire, près d’elle, fait les cents pas de façon extrèmement minutieuse : cinq à droite, six à gauche, cinq à droite, six à gauche… S’il continue ainsi, il finira par heurter le couple enlacé assis sur le banc.


  • Excusez-moi ?

Une voix douce et fragile, derrière lui, le sort de ses rêveries.

Elle lui demande si le train qui part de ce quai est bien celui en direction de Paris. Il lui répond que non, et l’aide à trouver le bon. Elle est jeune, elle est jolie, elle s’appelle Valentine et vient visiter sa tante tous les mardi.


Quand Monsieur Martin rentre chez lui, après avoir déjeuné avec sa femme et ses enfants, il s’éclipse dans sa chambre et relit le mail qu’il avait écrit. Satisfait, il remplace le Camille, par un Valentine et clique sur envoi.