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Test Le Donjon de Naheulbeuk – l’Amulette du Désordre : de quoi être fiers… de hache

Publié le 17 mars 2021 par Linfotoutcourt

Le Donjon de Naheulbeuk : l'Amulette du Désordre, adapté de la série audio éponyme de 2005, est un T-RPG, ou tactical-RPG, au tour par tour développé par Artefacts Studio et édité par Dear Villagers. Est-il un de ces énièmes produits dérivés ou une proposition ludique qui va au-delà de son simple statut d'adaptation ? La réponse est quelque part entre cette phrase et la note.

Le Donjon de Naheulbeuk : L'Amulette du Désordre en aura mis du temps pour trouver la porte de sortie de son développement. On en parlait déjà à la Gamescom 2014, on en parlait ici même dans une preview en 2015 et pourtant c'est bien jusqu'au 24 septembre 2020 qu'il aura fallu l'attendre, et même un peu plus tard pour les versions consoles. Un travail au long court dont l'on sent heureusement les fruits dans le jeu final.

La pâte à donjon

Là où les qualités se trouvent - et se cherchent - c'est surtout dans les décors et animations. Si ce donjon magique reste un donjon, avec son lot de murs de pierre, de torches et des poutres en bois apparentes, cependant le jeu arrive à proposer différentes ambiances visuelles comme musicales et se trouve même une plutôt bonne utilisation de la profondeur de champ. Voir la terrasse du premier étage en contrebas plusieurs étages plus haut fait son petit effet.

Un peu comme dans Prey et sa station Talos I, l'on ressent dans Naheulbeuk un certain sens de la proportion, une certaine présence et cohérence de l'espace de jeu, de son agencement et de ses proportions. Que ce soit l'extérieur du donjon aperçu dans le menu principal ou ce millefeuille d'étages, le donjon du Donjon de Naheulbeuk est une belle réussite.

Enfin, si l'ensemble de la mise en scène reste extraordinairement statique (nous y reviendrons), les animations, que ce soit celle de marche de chacun des membres du groupe, mais surtout celle des combats, elles sont expressives et retransmettent bien la personnalité de chacun, en plus de donner ce qu'il faut d'impact pour un jeu au tour par tour. Ajoutez à cela les petites répliques souvent croustillantes des combats et vous avez un enrobage convaincant. Sans être une bombe artistique et malgré quelques rares charadesigns douteux, l'ensemble retransmet bien - mieux que la BD par exemple - l'univers de Naheulbeuk et ce qu'il peut avoir de maladroit et drôle dans cette bande d'aventuriers pas très douée.

Des choses à dire... et à redire

Là où beaucoup attendait certainement ce Donjon de Naheulbeuk, étant donné son statut de jeu licencié, c'est aussi sur sa plume, son écriture et dans une certaine mesure son fan service. On calme toutefois vos ardeurs, ce n'est pas ici la plus brillante réussite du jeu.

Pour ne pas citer de nom, les guest "youtubers" sont corrects pour l'un, mais absolument raté pour l'autre. C'est dommage puisque le plus mauvais des deux est également le plus présent. L'elfe aussi est un bel exemple de bourde, si dans la série audio elle tenait déjà un sacré rôle de gourde, en pure osmose avec ce groupe d'aventuriers, ici les curseurs de l'aigu semblent encore un cran au-dessus.

Le personnage de l'elfe est sans doute celui qui souffre le plus de ces contretemps dans les dialogues, de ces changements de rôles et de ce nouveau format, elle n'a jamais semblé aussi bête, alors même qu'elle n'a jamais été finaude. Y voir de la misogynie reste la vue de l'esprit de certains, mais concédons au moins qu' il s'agit du personnage qui souffre le plus de la comparaison dans cette adaptation, là ou le ranger - très justement doublé par Chambon - est presque au-dessus de ce que la série audio pouvait proposer, même si encore une fois, le format dessert le naturel des échanges.

Si le jeu s'avère sympathique à suivre, c'est après une petite dizaine d'heures d'introduction très laborieuse. On met un certain temps avant de se reconnecter avec une partie des personnages. Heureusement, passé un cap, l'histoire est plutôt plaisante, souvent drôle dans ses quelques saveurs kaamelott-esque, bien que très routinière et parfois cousue de fils blancs.

Gang of Naheulbeuk

S'il y bien un point cependant où l'adaptation tient toutes ses promesses et transpose habilement la saveur de la série audio, ce sont ses combats et son aspect RPG. Si les grandes lignes de son gameplay tactical pourront rappeler , la réalité est que L'Amulette du Désordre rappelle plus la baston de rue, comme une sorte de tactical de la galère. Entre les échecs-critiques, les glissades sur des flaques de bières ou encore les fabuleux lancers de nain (des mines), on retrouve bien le côté foutraque et désorganisé que nous donnait à imaginer l'univers audio imaginé par Pen of Chaos. D'ailleurs une multitude de pouvoirs et autres compétences qui font la richesse du tout embrassent directement le folklore de la saga mp3.

Chaque personnage, au nombre de 6 pour la team historique, plus un septième compagnon qu'il vous faudra choisir parmi 3, sont caractérisés certes, narrativement et visuellement, mais surtout en termes de gameplay et de build. Chaque brique prolonge l'autre jusqu'au gameplay. Le prétexte même du jeu justifie la montée en puissance de notre groupe d'aventuriers et même leurs morts et retours systématiques. Bref, on sent un certain soin pour imbriquer le tout et ce par le prisme du gameplay.

T'as vu mes chaussettes ? C'est du mithril.

Plus concrètement, abordons les systèmes d'équipement et de progression avant de passer à l'aspect tactique de la proposition.

Dans L'Amulette du Désordre chaque aventurier, comme une classe, a un set d'équipement propre, c'est-à-dire que vous ne pouvez pas mettre une armure de Ranger à l'Ogre et vice versa. Chacun dispose de tout un tas d'emplacements, du casque jusqu'aux jambières en passant par un bouclier et une arme secondaire - type un arc pour le barbare ou une arbalète pour le voleur. Ces emplacements permettent une personnalisation statistique et une sur-spécialisation assez limitée puisque comme dit plus haut, les loots sont spécifiques aux classes, c'est rare que l'on ait à comparer plus de 2 équipements.

En vérité ce système d'armure et d'arme même s'il propose des embryons de systèmes intéressants - comme des armes magiques aux propriétés uniques - reste un déguisement pour une progression très linéaire et peu impliquée du personnage. Là où le joueur a cependant une belle marge de manœuvre pour lui-même sur-spécialiser une classe, c'est sur les 2 emplacements d' anneaux, le slot d' amulette ainsi que la ceinture. Ces objets n'ont pas de dépendance ou de prérequis - sauf très rare exception pour la magicienne -, c'est donc au joueur de savoir à qui les attribuer parmi les 7 membres de son groupe. C'est dans ces 4 emplacements que se cache la petite profondeur du système d'équipement.

Bien que l'on pourra regretter des équipements légendaires trop peu variés ou manquant d'effet magique - chaque personnage a approximativement un set qu'il est donc logique d'équiper peu importe son build -, il faut reconnaître que le tout trouve un équilibre satisfaisant avec ces 4 emplacements transversaux. Ne pas limiter certaines pièces d'armures aux classes aurait sans doute allongé de façon désagréable un menuing déjà conséquent. Certainement aussi que l'étendue limitée du jeu - bien que respectable - l'empêchait de développer des systèmes d'équipement au très long cours.

Donjon et Naheulbeuk font bon ménage

Pour comprendre pourquoi on aime beaucoup les skills trees du Donjon de Naheulbeuk, il faut en revenir à une question simple : qu'est-ce qui fait une gestion des compétences intéressante ? Pour ça on a fait une petite liste :

  • Moins de points compétences que de compétences
  • Des choix spécialisant exclusifs les uns des autres
  • Des compétences imbriquées et synergie-able
  • Des talents qui influent sur la façon d'utiliser son personnage et pas uniquement basés sur de pures notions d'efficacité
  • Et enfin des compétences qui viennent complexifier et non automatiser - ce qui implique de ne pas avoir volontairement créer des points de pénibilités inutiles...

Naheulbeuk répond à tous nos critères, même s'il existe bien un volet très statistique à sa progression, une grande partie de celle-ci passe par un arbre de talents actifs et passifs. Le seul reproche que l'on pourrait lui faire est de ne plus distribuer de points statistiques après le niveau 10, rendant les récompenses d'XP inutiles vers la fin du jeu. Donner des points stats, sans les points talents n'aurait à notre avis pas cassé l'équilibre du challenge tout en permettant au joueur de rester un minimum investi jusqu'au bout de l'aventure.

Baston !

Le système de jeu au tour par tour de Naheulbeuk est construit sur deux piliers, les échecs critiques et le positionnement. Contrairement à beaucoup de jeux du genre, votre proportion à rater de façon spectaculaire est spectaculairement élevée. Pas au point d'être frustrant ou trop dur, mais au moins au point de le notifier.

Le second aspect est le positionnement. Déjà, vous trouverez dans les arènes nombre de couvertures, barils et autres pièges mortels, mais plus que cette composante environnementale, il y a la présence de bonus de différents genres, mais en premier lieu de précision, pour les personnages adjacents ou attaquant le même ennemi. Cumuler à cela une prise en compte de l'orientation du personnage pour déterminer ses chances de toucher ainsi que le cône d'effet de ses attaques d'opportunité et vous obtenez une multitude de systèmes qui synergisent et mettent une belle emphase sur le jeu en groupe.

L'Amulette du Désordre est un jeu profond qui, même sur sa belle longueur, propose une montée en puissance du joueur de pair avec sa compréhension des systèmes et subtilités. La difficulté plutôt corsée suit le même tracé. Si le début se fait dans la douleur (même en normal), une fois le jeu appréhendé on vous conseillera de monter la difficulté pour profiter au maximum des combats. Le jeu a la bonne idée, malgré des éléments persistants entre les combats comme la vie ou l'énergie de Mankdebol, de proposer des affrontements qui ont une valeur en eux-mêmes, et ne sont pas qu'une épreuve d'endurance. L'épreuve, dans le Donjon de Naheulbeuk, c'est le combat - les affrontements les plus tendus peuvent être sacrément longs. Un ensemble de doctrines qui font que le titre ne perd jamais l'intérêt du joueur en lui donnant toujours quelque chose à penser, de la composition de son challenge, à sa profondeur de jeu en passant par la variété de ses situations... Artefact a fait un VRAI bon jeu vidéo.

Saucisse, Donjon et Naheulbeuk

L'écueil est assez regrettable quand à côté de cela tout semblait bien en place. Chaque personnage est équipé d'une ceinture sur laquelle peuvent être accrochés des objets. Avec trois emplacements vous pouvez par exemple opter pour une potion de vie, un brocoli qui guérit l'empoisonnement ainsi qu'une potion légendaire de chance donnant un bonus de coups critiques. Ces objets sont alors utilisables durant le tour du personnage moyennant son point d'action, sachant que vous disposez d'un point d'action et d'un point de mouvement par tour. Dans ce cadre là peut-être aurait-il été plus intéressant de voir les objets comme une ressource à utiliser de façon optimale qui ne demanderait pas le sacrifice de notre unique point d'action, ou alors de pouvoir également utiliser un objet avec un point de mouvement. Cela aurait encore densifié les possibilités stratégiques. Paradoxalement le plus gros souci des consommables n'est pas leur aspect unitaire, mais bien la faible capacité que l'on a à les utiliser en jeu.

Donjon de Naheulbeuk : L'Amulette du Désordre est disponible depuis le 24 septembre 2020 sur PC et devrait l'être courant de cet été sur Playstation 4, Xbox One et Nintendo Switch.

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