Nous sommes le dernier jour de l'été mais le temps est encore magnifique.
Un édifice très contemporain (photo ci contre) abrite un centre d’interprétation, pour favoriser les multiples regards sur l’habitat écologique, d’hier à demain. Des stages d'éco-construction, ateliers enfants, balades commentées, conférences… y sont proposés pour donner envie à chacun d’agir au quotidien, et d'utiliser des écomatériaux qui, parfois, ne sont pas locaux.
Les autres bâtiments sont anciens et authentiques même s'ils ont été remontés pierre par pierre, pour rappeler ce qu'était la vie d'une famille de petits cultivateurs oléronnais dans un passé qui n'est pas si lointain.
C'est si bien fait qu'on a l'impression qu'ils ont toujours été là. C'est à des passionnés qu'on doit cette performance entreprise de 1971 à 1981, les Déjhouqués, du Groupe Folklorique de l'Ile d'Oléron à Grand Village Plage, fondé par André Botineau. Son ambition était de faire connaître et d'éviter l'oubli des coutumes locales, le patois, les danses et les chants. Une statue à leur honneur les célèbre anonymement dans le parc voisin.
Ils s'y sont mis après la construction du pont (1963 à 1966) qui, entre autres, entraina une augmentation du tourisme. Mais à ce moment-là cette périphérie du bourg de Grand Village était presque encore entièrement entouré par la nature, avec juste le camping comme voisinage.
L'association existe toujours, et l’expression est encore employée dans la région. Se déjhouquer signifie se lever. L'origine de ce verbe provient des poules qui dorment toujours sur un perchoir, un "juqueux" en patois. Dire se jouquer comme les poules indique qu'on se couche de très bonne heure.Ils ont uni leurs forces, rassemblé des dons, trouvé du mobilier (lequel est en restauration) et des outils. La restauration est terminée à moitié, suite à des chantiers, des stages de formation, de peinture, ou de vernis sur meubles. L’ensemble est donné en 1994 à la municipalité, puis à la Communauté de communes, comme le port des Salines, et s'accompagne d'un changement de nom et de l’adjonction du terme "éco".
L'encaissement du sol contraint à descendre en y pénétrant, ce qui est voulu car c’est un moyen d’assurer une régulation thermique, d’apporter de la fraîcheur en été et de la chaleur en hiver.Le sol est composé d’une première couche de pozolane volcanique recouverte de chaux puis de terre battue. Au mur, la chau est mélangée à du chanvre, mais traditionnellement on employait de la fougère qui est imputrescible comme le chanvre. On remarque une bande noire en bas. C’est un coaltar imperméable, comme on l’utilise pour imperméabiliser la coque des navires. C'est un goudron, dérivé de la houille, et son nom vient de l'anglais coal (charbon) et tar (goudron). A force d’en respirer les odeurs toxiques les ouvriers devenaient ahuris, d'où l'expression "être dans le coltar".
La cheminée est immense pour chauffer la pièce et cuire les aliments. On posait dans l'âtre de gros galets de granit récupérés auprès des marins qui les avaient utilisés pour servir de lest aux navires venus chercher le sel. La nui, ces grisons réchauffaient les lits. Le mur situé entre l'évier et la cheminée accueillait les niches d'un potager que l'on garnissait de braises pour ensuite cuire et maintenir les plats au chaud. Ce type d'équipement se rencontre souvent dans les cuisines des châteaux du Val de Loire.
Une planche était accrochée à une poutre pour que les rongeurs ne viennent pas grignoter le pain qui y était posé.
Bien entendu c'est aussi la chambre, avec traditionnellement un grand lit à quenouilles. La pièce est actuellement en rénovation et a été vidée de ses objets. En sortant par la porte principale et après avoir dépassé la fenêtre on arrive au chai puis à la forge.
Contrairement à aujourd'hui, la maison n'est pas un lieu de vie. La famille ne s'y rassemble qu'en fin de journée. Seuls les aïeuls y restaient au chaud en journée. Les activités se déroulaient principalement à l'extérieur, dans les champs et dans le quéreu, place commune qui a aussi pour avantage de favoriser l'entraide.
Le jardin, cerné de murets de pierres sèches, abrite les plantes aromatiques et médicinales, qui servent autant à cuisiner qu'à soigner les hommes comme les bêtes.Il y avait abondance de figuiers, des variétés anciennes de vignes. On pratique l'élevage et la polyculture microparcellaire très dense même sur les bosses des marais pour des fèves, céréales et pâtures.On cultive beaucoup de légumes. Le fameux oignon Saint-Turjan, doux et sucré, était cultivé au XIX° dans les zones sableuses et les bosses de marais du sud-ouest de l'île. Il s'en produisait jusqu'à 5000 tonnes qui étaient expédiées par bateaux vers La Rochelle, Nantes et Bordeaux. La variété renait aujourd'hui avec la volonté d'une association. On le trouve donc au marché de Saint Trojan en saison.
Le ballet (on prononce ballète) est le hangar agricole. On le réserve maintenant à la démonstration des enduits. On enduit et on badigeonne pour protéger la maçonnerie de l’eau mais aussi des insectes. On remarquera que les gouttières sont très rares.Revenons sur le côté de la maison, un chasse-roue protéger le mur des passages de charrettes. Un escalier extérieur conduit au grenier fermé par une porte toujours percée d'une ouverture ronde pour laisser passer un chat, car son rôle est déterminant dans la sauvegarde des récoltes. Il fera la chasse aux rongeurs
Par contre les cartes postales dénotent une sur-représentation des quéreux (on cristallise l’identité oléronnaise et les usages collectifs qui sont déjà en voie de disparition). Des objets publicitaires démontrent combien l'imagerie touristique oléronaise est proche de celle de Ré alors qu'il n'en est rien. Il est amusant de voir qu'on a simplement écrit l'un ou l'autre nom sous un croquis identique.
Elles pouvaient ici constituer des appuis pour les échafaudages. Ces pierres créent aussi la liaison entre deux parements et assurent la solidité du mur. L'origine de ces "pierres dépassantes" fait l'objet de multiples autres interprétations. Il est dit qu’à chaque traite payée, le maçon faisait ressortir une pierre, ainsi dans chaque village on différenciait aisément les bons des mauvais payeurs !
Des sculptures sur pierre peuvent aussi être dignes d'intérêt. Au 55 rue de la République à 17310 Saint-Pierre-d'Oléron on remarquera une enseigne d'auberge qui s'élevait à la place de l'immeuble actuelle qui est encastrée dans la façade de la maison, à hauteur du premier étage. C'est une large pierre sculptée au XVI° où figurent une nef toutes voiles dehors et deux inscriptions. En haut : "Céans a bon vin et logis". En bas : "JHS RLE. OV. BLD 1585". Cette enseigne devait figurer sur l'auberge.