le virage amorcé du touriste vers le socio-pro
En mai 2019, Jean-Luc Boulin publiait un article intitulé Arrêtez de vous occuper des touristes, pensez aux socio-pros! dans lequel il expliquait combien il était pertinent de plus s'investir en faveur des socio-pros de vos territoires. Je ne vais pas revenir sur ses arguments; je vous invite à relire cet article qui prend encore plus de sens dans le contexte que nous connaissons actuellement. Et c'est d'autant plus vrai que tant que nous serons encore dans ce scénario de consommation touristique locale " forcée ", on peut franchement se permettre de lever le pied sur le marketing de destination et la surinformation du touriste. Bref, autant faire jouer les vases communicants et travailler avec nos socio-pros au bénéfice des acteurs culturels.
Je me doute que certains Offices ont déjà entrepris des actions en ce sens, j'en connais d'ailleurs quelques uns et c'est tant mieux. Mais ils sont encore trop peu nombreux et c'est la raison de ce billet.
On sait combien la dimension " expérientielle " a pris de l'importance ces dernières années et à quel point cela correspond à de réelles attentes des clientèles touristiques. Il y donc bel et bien une réelle opportunité à renforcer les collaborations entre la culture et le tourisme et c'est du gagnant-gagnant !
Quelle place l'Office de Tourisme peut-il prendre dans ce scénario ? Celle d'un marieur entre socio-pros et artistes pardi !
Concrètement, et certains territoires dont le Pays des Lacs en Belgique le font déjà, il s'agit de favoriser la mise en relation d'artistes avec des socio-pros ou des sites touristiques publics ou privés, qui pourraient leur permettre de disposer d'un lieu d'expression propice à leur activité ou talent. Actuellement, il faut bien entendu respecter les règles sanitaires en vigueur; on sait que l'organisation d'un concert avec un public " classique " est impossible. Mais il faut à la fois d'une part anticiper le retour à cette possibilité prochainement et, d'autre part, identifier les choses déjà possibles actuellement. Ainsi de nombreux lieux peuvent déjà permettre à des artistes d'exercer leurs talents pour autant qu'on leur en donne l'occasion: à Namur, une exploitante bien connue de chambres d'hôtes d'exception a par exemple organisé un mini-concert, donné par quatre musiciens sur sa terrasse, concert que les hôtes ont pu suivre depuis le balcon de leur chambre au premier étage dans le respect des règles sanitaires
Je pense également à ce musée qui a permis à des comédiens de " prendre la place " des guides traditionnels pour proposer aux visiteurs qui le souhaitaient une formule décalée de guidage. Il y aussi un projet de proposer dans une grotte une animation musicale live, ponctuellement, en lieu et place du son & lumière technologique classique. Toutes ces formules se font évidemment via une tarification particulière qui permet la rétribution correcte des artistes. Ainsi, selon les cas, c'est soit le site touristique qui rémunère directement le ou les artistes, soit le touriste lui-même qui paie un supplément, directement à l'artiste, pour sa prestation. Les formules ne sont pas figées et doivent s'adapter aux réalités tant des professionnels du tourisme que de celles des artistes.
L'auteur allemand Heinrich Heine disait : " Ceux qui brûlent des livres finissent tôt ou tard par brûler des hommes " - Heinrich Heine, 1820. Il semblerait que l'on a passé le cap des livres.