Si, a priori, il ne se passe pas grand-chose tout au long des 450 pages de ce premier volet, que le rythme est particulièrement lent et que le style s’avère descriptif et répétitif, Haruki Murakami parvient tout de même à nous tenir en haleine. À l’instar de nombreux auteurs nippons, il parvient à restituer des émotions profondes en capturant avec brio les silences et les non-dits, ces petites choses insignifiantes du quotidien, qui font tout le sel de la vie. Sans parler de sa capacité à décrire avec grande justesse le processus de la création artistique, comme si chaque tableau prenait vie sous nos yeux tout en dévoilant la nature profonde du créateur et de son sujet.
Puis, il y a cette touche de surnaturel, ces phénomènes étranges intégrés au réel avec un naturel presque déstabilisant. De cette clochette bouddhiste qui tinte dans la nuit à cette idée qui prend forme sous les traits d’un petit personnage grotesque, en passant par ce tableau dissimulé dans le grenier ou cet homme sans visage qui réclame son portrait dès le prologue, Haruki Murakami entretient le mystère, donnant envie de découvrir la suite au plus vite.
Finalement, il y a cette capacité à brosser des personnages intrigants et hauts en couleurs, que les lecteurs auront du mal à abandonner en fin d’ouvrage. Du narrateur au charismatique Wataru Menshiki, en passant par le petit commandeur ou le mystérieux inconnu à la Subaru blanche, les personnages de Murakami captivent du début à la fin.
Alors oui, il est assez frustrant de constater que les 450 pages de ce premier volet ne sont finalement qu’une mise en place, mais c’est l’envie de s’attaquer immédiatement à la suite qui l’emporte finalement haut la main.
Le Meurtre du Commandeur, Haruki Murakami, Belfond, 456 p., 23,90€
Ils en parlent également : Claire, Elodie, Céline, Charlotte, Anne-Sophie, Samurai Neko, Page après page, La bibliothèque de Déols
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