Journée de la femme.
Journée des femmes. Journée internationale des droits des femmes… Tous les ans c’est la même chose. Il faut expliquer le pourquoi du comment.
Et encore dire et redire que toutes les offres commerciales qui y seront associées, ne sont que d’infâmes charognards, prêts à tout pour se faire du fric sur le corps – vivant ou mort- des femmes.
Non. Cette année, je ne peux pas. Je ne peux plus. Je n’en peux plus. Je suis fatiguée.
Fatiguée de cette date anniversaire qui revient comme le bilan d’évaluation annuelle d’un-e salariée. Alors, les points forts, les point à améliorer et surtout, les objectifs ont-ils été atteints ?
J’ai toujours eu horreur de ces machins-là. Je suis un être humain pas une machine, j’ai mes forces, mes faiblesses, mes joies et mes tristesses, mais je ne suis pas performante et encore moins rentable et ne le serai jamais. Et ça me va très bien. Merci.
Et ben, sans surprise, le bilan annuel du 8 mars, lui non plus, n’est pas fameux.
Plus de pertes que d’acquis.
Les seuls chiffres à peu près stables ou en progression sont ceux des violences faites aux femmes et aux enfants, dans leur globalité.
Ah oui, mais quand même, la parole s’est libérée !
Oui. On nous écoute un peu plus maintenant. Mais pour les actes, on peut encore attendre. La loi, la justice, les politiques, tout ça, ils ne veulent pas se précipiter. L’âge du consentement, oui, bon d’accord on va faire un petit quelque chose. Oui parce que l’inceste ça gêne, ça pue, ça empeste même et ça, dans les hautes sphères, on n’aime pas.
Et puis, il y a encore ces messieurs bien comme il faut, cis, blancs, + de 50 ans, CSP++++, pour prendre la défense de leurs copains, en dénigrant la victime. Les femmes et les enfants d’abord ! Allez hop !
A chaque nouveau nom d’agresseur qui sort, ça recommence. A chaque fois c’est un ramassis d’immondices qui se répand dans les médias, les réseaux, chez moi, en moi. Et je me sens crasse. Et je me sens lasse.
Si lasse.
La cause des femmes, c’est mon combat. Mais là, je suis épuisée.
Lasse d’être une femme, parfois. Sans vouloir être un homme pour autant ! Juste, de temps en temps, pouvoir ne plus sentir les coups, les insultes et la peur de mes sœurs, dans mon corps. Virginie Despentes a tout dit. Et tellement bien.
Nous, femmes, nous sommes le peuple de la peur.
Ah ben oui mais y a des hommes victimes de violences, aussi !
Mais ferme ta gueule ! Tu entends ? Ta bouche-là, tu vas la fermer et tu vas m’écouter. D’abord, ce n’est pas un concours. On ne compte pas les poings !
Ensuite, à aucun moment, les femmes n’ont nié la douleur des hommes. En revanche, ça fait un paquet d’années qu’on est là pour vous, à vous soutenir, vous nourrir, vous encourager, vous soigner, vous consoler, vous torcher s’il le faut.
La femme au service de l’homme. A disposition. Disponible, à genoux ou couchée. Mais debout, ça jamais. C’est comme ça que vous nous vouliez.
Et vous avez réussi. Religions. Patriarcat. Domination masculine. Masculinisme. Appelez ça comme vous voulez.Et au summum de la soumission, ce dicton : « Derrière chaque grand homme, il y a une femme ! » Derrière, dessous, peu importe, l’essentiel c’est de dominer. C’est contre tout ça qu’on se bat. Et un jour ou l’autre, on va y arriver !
Ah oui mais quand même, les choses ont évolué ! Surtout en France, alors arrêtez de vous plaindre et si voulez réussir, bossez !
Mais de quoi tu parles, toi ? Qu’est-ce tu en sais ? Tu pourras la ramener quand tu sauras ce que c’est d’avoir une boule de feu en permanence dans le ventre quand tu es en présence d’un homme, n’importe lequel. La peur du gibier, celle qu’on a intégrée pour apprendre à se sauver.
Tu sais ce que j’aimerais ?
Une arme qui te terrifie jour et nuit. Une arme qui aura déjà touché plusieurs de tes amis. Une arme pointée sur toi en permanence, sans que tu saches à quel moment elle va tirer. Bim ! Direct dans le paquet. Et voilà, c’est réglé !
Pourquoi j’ai fait ça ? Ben, il m’a provoqué ! Il a marché devant moi, en jean et ça m’a énervée, alors, j’ai tiré. Mobile valable. Non- lieu. Vous êtes libérée. Libérée, c’est le mot.
Tu la sens la trouille, là, envahir tout ton être, maintenant que tu as une cible sur la tête ?
Sauf que cette arme, c’est vous, les hommes, qui vous l’êtes octroyée. Tu les as vus les mecs dans le métro, assis jambes écartées ? Typique du mâle dominant, qui se déplace, armé et tient à ce que vous le sachiez !
Tsss ! Voilà pourquoi je suis fatiguée. Alors, cette, année, je passe mon tour ! Allez-vous faire foutre, tous ! J’en ai marre des hommes, voilà la vérité.
Marre de ne pas m’énerver parce que c’est contre moi que ça va se retourner.
Marre d’être sage et disciplinée. Marre d’être une victime qui doit le prouver ! Tout ce temps passé à faire de la pédagogie, pour se faire entendre, pour se faire comprendre. C’est un éternel recommencement et c’est épuisant.
Et surtout, je m’interroge. Peut-être que la non-violence a assez duré et qu’il est temps, après la honte, que la peur change de camp ?
Bon, ok, pour l’instant on n’a pas d’arme, mais la puissance est déjà-là.
Rdv le 8 mars.
Téri Trisolini
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