Titre : Vernon Subutex, T1
Dessinateur : Luz
Scénariste : Virginie Despentes
Parution : Novembre 2020
La série de romans « Vernon Subutex » a été un événement littéraire. La reprise de cette œuvre en bande-dessinée par Virginie Despentes et Luz est donc assez logiquement un événement en lui-même. Sans être un spécialiste des deux auteurs, j’ai apprécié ce que j’ai pu lire d’eux. Cette première partie, édité chez Albin Michel, pèse près de 300 pages. 300 pages d’une grande densité…
Un ouvrage d’une grande densité
Vernon Subutex s’est retrouvé disquaire par hasard. Avec l’arrivée du numérique, il finit par fermer boutique. Puis il vivote en revendant des vinyles, des dédicaces… Puis c’est son ami Alex Bleach, star de la musique, qui lui paye son loyer. Quand ce dernier décède, Vernon est expulsé et cherche où crécher. Il va alors contacter de nouveau ses anciennes connaissances, ce qui ravivera les souvenirs de chacun d’entre eux…
Virginie Despentes ne fait pas dans la dentelle, c’est bien connu. « Vernon Subutex » semble avant tout un prétexte à un galerie de personnages truculents. Nous avons droit à leur portrait de ce qu’ils étaient à l’époque où ils fréquentaient assidûment le magasin de disques et ce qu’ils sont devenus aujourd’hui. Pas besoin de faire un dessin : on ne peut pas dire que ça brille d’épanouissement ! Cette partie passé/présent est très réussie et participe pour beaucoup au plaisir de lecture. De plus, Despentes sait présenter des personnages originaux que l’on retrouve peu dans d’autres ouvrages, c’est appréciable.
Au-delà de la partie personnage, c’est aussi un monde de la musique qui est narré. Un monde où les gens vivaient pour la musique. C’était leur univers. Pour Vernon, ça l’est d’autant plus tant il paraît déconnecté du reste (et des autres ?). Tellement déconnecté du monde que sa descente aux Enfers après son expulsion est parfaitement retranscrite.
Difficile de ne pas parler de la densité de cette bande-dessinée. Non seulement il y a 300 pages, mais elles sont très fournies en textes, adaptation littéraire oblige. De plus, la présentation de chaque personnage avec à chaque fois le même mécanisme (Vernon reprend contact, va dormir là-bas puis un événement fait qu’il en repart). Cette routine amène un peu de lassitude et on ne saurait que conseiller de faire des pauses dans sa lecture pour éviter un effet de redondance.
Au niveau graphique, c’est magistral. Le trait de Luz est à la fois relâché et pleinement maîtrisé. On ne compte plus les planches aux constructions inventives ou les pages qui frappent droit au cœur. Le travail proposé est colossal et d’une grande virtuosité graphique et narrative. Bravo à lui.
« Vernon Subutex » est un bouquin peu digeste mais plein de qualités. Porté par un suspense qui monte petit à petit, il dépeint le monde avec justesse et dureté. La fin ne nous donne qu’une seule envie : lire la suite !