Par William PETITJEAN
« Peuple de Berlin, peuples du monde, notre heure est venue. »...L' « obamania » qui souffle sur l'Europe va sans doute s'amplifier encore après le discours de Berlin du sénateur de l'Illinois. Belle éloquence. Et joli choix des mots. Surtout dans la bouche d'un homme qui n'a pas spécialement la réputation de bien connaître l'Europe...
Cette « obamania » européenne se vérifie dans tous les sondages et dans tous les pays.(sauf en Russie) Entre 49% (au Royaume Uni) et 80% (en Italie) des Européens sondés voteraient pour lui, s'ils pouvaient. Fatigue de Bush et des républicains, envie d'une « rupture » avec les « néo-conservateurs », besoin de voir un « autre visage de l'Amérique », fascination pour un homme de couleur qui réussit « l'impossible exploit » de pouvoir accéder à la maison blanche, look « à la Kennedy », bonne communication...et besoin de placer des espérances nouvelles dans une génération nouvelle.
Mais cette « obamania » n'a pas encore gagné les sphères dirigeantes de la plupart des pays. Pour cause...
Avec Mc Cain, les lignes directrices sont (presque) claires. Avec Obama, c'est encore très flou. On apprécie sa « bonne volonté » « et sa « générosité », mais on s'interroge sur sa crédibilité diplomatique et stratégique. Ses discours, bien ficelés et bien interprétés varient trop d'un auditoire à l'autre. Et, visiblement, il ne connaît pas très bien l'Europe. Au sénat, il a complètement négligé la commission des affaires européennes qu'il présidait et visiblement il est plus préoccupé par la Russie et la Chine que par la « Vielle Europe ». Le XXI ième siècle n'est-il pas déjà plus celui du Pacifique que celui de l'Atlantique. ?
A Paris,on se garde de dire quoi que ce soit de négatif, mais Sarkozy (qui le reçoit aujourd'hui) n'a pas du apprécier qu'il fasse une courte escale dans la capitale française (alors que le chef de l'Etat prend très au sérieux sa Présidence du conseil de l'Union) : à Berlin, il a fait une vraie étape, avec un grand discours et à Londres il ne fait pas que passer...
Son grand discours de Berlin ne permet pas de bien analyser quelle est sa stratégie vis-à-vis de l'Europe, sur des questions essentielles (protectionnisme ou pas, appui à un pilier européen de l'Otan ou non, soutien à la construction d'une Europe politique ou pas...) Certes, il a été plus ouvert que Bush à un partenariat vraiment équilibré entre « le meilleur allié de l'Amérique » et les Etats-Unis. Il a affiché une volonté de s'inscrire dans la perspective de ce monde « multipolaire » qui reste une ambition européenne. Il a encore demandé lus d'efforts aux européens sur quelques théâtres difficiles (en Afghanistan, notamment).Il a surtout été très déterminé à suivre les européens dans leurs politique environnementale. Mais sur quoi ses appels à plus de confiance s'appuient-ils ? Il y a plus de changement dans la forme et dans le ton que sur le fond. Du moins pour l'instant.
Cela dit, quel beau et grand discours ! Une prédication que l'on souhaiterait prendre au mot. Un festival de formules faites pour susciter l'enthousiasme de celles et de ceux qui veulent croire à un « ordre mondial » qui soit en rupture avec le désordre actuel et, surtout, avec la globalisation de la loi du plus fort, du plus puissant, du plus riche...
Devant près de deux cent mille personnes, au pied de la colonne de la Victoire au cœur de Berlin, Barak Obama s'est écrié : « Une nouvelle génération, notre génération, doit laisser sa marque dans l'Histoire. ». Qui pourrait ne pas applaudir ? Face au terrorisme, au réchauffement climatique, à la drogue, à la prolifération nucléaire, « nous ne pouvons pas nous permettre d'être divisés ». Constat partagé. « Le XXIe siècle s'est ouvert sur un monde plus interdépendant que jamais dans l'histoire humaine. (...) Mais ce rapprochement a entraîné de nouveaux dangers qui ne peuvent pas être endigués par les frontières ou les océans (...). Aucune nation, aussi grande et aussi puissante soit-elle, ne peut relever seule ces défis (...) L'Amérique n'a pas de meilleur allié que l'Europe. Mais « un vrai partenariat exige un travail constant et des sacrifices (...), des alliés qui savent écouter, apprendre les uns des autres et surtout se faire confiance ». C'est vrai ...si c'est partagé, évidemment.
« Les murs entre les alliés de longue date, de part et d'autre de l'Atlantique, ne peuvent pas rester debout. Les murs entre les pays les plus riches et les plus pauvres ne peuvent pas rester debout. Les murs entre les races et les tribus, entre les indigènes et les immigrants, entre chrétiens, musulmans et juifs ne peuvent pas rester debout. » Belle ambition !
Un constat : C'est la première fois qu'un candidat à la présidence des Etats-Unis prononce un grand discours de politique étrangère en dehors des Etats-Unis. Et c'est plutôt un signe encourageant.
En signant le livre d'or de la ville de Berlin, qu'est venu lui présenter le maire, Klaus Wowereit.Barack Obama a écrit : « Berlin symbolise l'impossibilité de diviser les hommes dans leur recherche de la liberté ». Belle inspiration...
William PETITJEAN
PHRASES CLEFS
Les Etats-Unis et l'Europe. «L'Amérique n'a pas de meilleur allié que l'Europe», a affirmé le candidat démocrate. «Un vrai partenariat exige un travail constant et des sacrifices... des alliés qui savent écouter, apprendre les uns des autres et surtout se faire confiance», a-t-il rappelé. Les Etats-Unis ont besoin d'une Europe, d'une Union Européenne forte», a souligné Obama. «Nous devons construire un partenariat mondial solide, ce n'est pas un choix mais une nécessité pour faire avancer la planète. Dans ce siècle nouveau, les Européens et les Américains devront faire plus», a-t-il plaidé. «Si nous avons pu créer l'OTAN pour mettre l'Union soviétique à plat ventre, nous pouvons nous rassembler pour démanteler les réseaux qui ont frappé à Madrid et à New York»,
Afghanistan. Le candidat démocrate a demandé l'aide de l'Europe pour vaincre les talibans. «L'Amérique ne peut pas le faire seule. Le peuple afghan a besoin de nos troupes et des vôtres; de notre soutien et du vôtre pour vaincre al-Qaida, pour développer l'économie de l'Afghanistan et pour l'aider à se reconstruire. L'enjeu est trop important pour renoncer maintenant».
L'Iran et le nucléaire. «Mon pays doit être au côté de l'Allemagne et de l'Europe pour envoyer un message sans équivoque à l'Iran : Téhéran doit abandonner ses ambitions nucléaires», a enjoint celui que l'on surnomme le «John Kennedy noir». «Il est temps d'arrêter la prolifération nucléaire, de réduire ces arsenaux d'un autre âge et de sécuriser tous les matériels radioactifs qui circulent dans la nature».
Réchauffement climatique. «C'est le moment où nous devons nous unir pour sauver la planète», a martelé Barack Obama. «Les entreprises chinoises comme américaines font fondre les glaces du pôle. Face au terrorisme, au réchauffement climatique, nous ne pouvons pas nous permettre d'être divisés. Maintenant nous ne faisons qu'un», a-t-il conclu.
L'image des Etats-Unis dans le monde. «Récemment les Etats-Unis n'ont pas été à la hauteur de toutes leurs promesses. Nous avons fait des erreurs», a reconnu le politicien métis. «Nous devons comme en 1948 lorsque que nos avions survolaient Berlin et distribuaient de la nourriture, gagner les cœurs et les esprits», a-t-il continué. «Lors de la Guerre froide, nous avons remporté la bataille des idées sur le communisme, nous devons accomplir la même chose sur l'islamisme». «Il faut donner un futur à nos enfants : le Darfour, les élections au Zimbabwe, le fléau du Sida, plus jamais ça», a souhaité le sénateur.
Le symbole du mur de Berlin. Parsemant son discours d'allusion à la guerre froide et à son symbole, le mur de Berlin, le sénateur de l'Illinois a exhorté les habitants de la planète à «abattre les murs». «Les murs entre les alliés de longue date, de part et d'autre de l'Atlantique, ne peuvent pas rester debout. Les murs entre les pays les plus riches et les plus pauvres, entre les races et les tribus, entre chrétiens, musulmans et juifs ne peuvent pas rester debout», a martelé Barack Obama.
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