Mircea Eliade (1907-1986)
Mircea Eliade (13 mars 1907 à Bucarest - 22 avril 1986 à Chicago) est un historien des religions, mythologue, philosophe et romancier roumain. Il parlait et écrivait couramment cinq langues (roumain, français, allemand, italien et anglais) et savait lire aussi l'hébreu, le persan et le sanskrit, mais la majeure partie de ses travaux universitaires a été écrite d'abord en roumain, puis en français et en anglais.
Mircea Eliade est considéré comme l'un des fondateurs de l'histoire moderne des religions. Savant studieux des mythes, Eliade élabora une vision comparée des religions, en trouvant des relations de proximité entre différentes cultures et moments historiques. Au centre de l'expérience religieuse de l’homme, Eliade situe la notion du "Sacré".
Sa formation comme historien et philosophe l'a amené à étudier les mythes, les rêves, les visions, le mysticisme et l'extase. En Inde, Eliade étudia le yoga et lut, directement en sanscrit, des textes classiques de l'hindouisme qui n'avaient pas été traduits dans des langues occidentales.
Auteur prolifique, il cherche à trouver une synthèse dans les thèmes qu'il aborde (excepté dans son Histoire des religions, qui reste purement analytique). De ses documents est souvent souligné le concept de "Hiérophanie", par lequel Eliade définit la manifestation du transcendant dans un objet ou dans un phénomène de notre cosmos habituel.
Vers la fin du vingtième siècle, quelques textes d'Eliade nourrissent la vision gnoséologique de mouvements religieux, apparus avec la contre-culture des années 1960.
Mircea Eliade a grandi dans une famille chrétienne orthodoxe. En 1921, à l'âge de 14 ans, il publie son premier article Comment j’ai découvert la pierre philosophale. Il s'intéresse très tôt à la philosophie, la philologie et l'étude des langues étrangères.
Il s'inscrit à la faculté de philosophie de l'université de Bucarest en 1925. C'est alors qu'il subit l'influence de Nicolae C. Ionescu qui était alors assistant professeur de logique et de mathématique et journaliste. L'engagement de ce confrère à l'extrême-droite fut critiqué et cette fréquentation a contribué à ternir la réputation d'Eliade.
Il consacre son mémoire de maîtrise à la Renaissance italienne et, en particulier, aux philosophes Marsile Ficin et Giordano Bruno. L'humanisme de la Renaissance est demeuré une influence majeure dans les travaux d'Eliade.
De récentes recherches sur l'engagement politique d'Eliade telles celles d'Alexandra Laignel-Lavastine et de Daniel Dubuisson ont mis au jour qu'Eliade était chef de file de la Jeune Génération roumaine dès 1927, que ses articles dans la revue Vremea et le quotidien Cuvintul ont contribué à donner une assise philosophique au "Mouvement Légionnaire" (Garde de fer) de Codreanu. On le voit alors ennemi des Lumières, des francs-maçons, des régimes démocratiques "d'importation étrangère", du bolchévisme, partisan de "l'insurrection ethnique" contre les minorités locales et "l'invasion juive".
En 1928, il fait la connaissance, à l'Université de Bucarest, d'Émile Cioran et Eugène Ionesco, prélude à une longue amitié qui se poursuit par la suite en France.
Après l'obtention d'une licence de philosophie en 1928, il part pour l'Inde à l'âge de vingt et un ans. Il séjourne durant trois ans à Calcutta (Bengale occidental, Inde) où il prépare son doctorat. Ce voyage est pour lui une véritable initiation qui marquera ses travaux ultérieurs. Il rentre en Roumanie en décembre 1931 et commence la rédaction de sa thèse sur le yoga qui deviendra Le Yoga, immortalité et liberté.
En 1933, il devient docteur en philosophie. De 1933 à 1940, il enseigne la philosophie indienne à l'Université de Bucarest.
Dans la revue Vremea ("Le Temps" en roumain) du 10 septembre 1936, publie des écrits anti-maçonniques. Il suggère un rapprochement entre la "mentalité" des francs-maçons et celle des communistes russes qu'il juge "monovalente" et "abstraite".
En mars 1940, lorsque les "Chemises vertes" arrivent au pouvoir sous la dictature militaire et antisémite de Ion Antonescu Eliade est nommé attaché culturel du régime auprès de la légation royale de Roumanie à Londres. Il remplit la même fonction de janvier 1941 jusqu'à la fin de la Seconde Guerre mondiale à l'ambassade du Portugal, à Lisbonne. Il rédige alors un livre à la gloire de "L'État chrétien et totalitaire" de Salazar.
A l'automne 1945, il s'installe à Paris et Georges Dumézil l'invite à la Ve section de l'École pratique des hautes études pour présenter les premiers chapitres de ce qui deviendra plus tard son Traité d'histoire des religions.
La même année, il rédige en roumain Les Prolégomènes à l'histoire des religions, qui paraîtront par la suite en français sous le titre de Traité d'histoire des religions (1949) avec une préface de Dumézil. En 1949, il se fait particulièrement connaître du public français avec la parution de son essai sur Le Mythe de l'éternel retour (Gallimard).
En 1956, il fait paraître son ouvrage le plus célèbre, Le Sacré et le Profane (Gallimard, 1956).