Ils l’ont fait savoir lors d’une rencontre avec les défenseurs des droits de l’homme et des droits fonciers.
Il y a quelques mois, une importante communauté Mbororo basée à Moutourwa dans le département du Mayo-Kani a été victime d’un incendie criminel qui a réduit en cendres une trentaine de concessions de cette communauté. Les populations hôtes, identifiées comme responsables de cet acte, leur reprochaient ainsi d’envahir leurs terres pourtant concédées par les autorités compétentes. Faute de protection, ces peuples ont dû se résoudre à émigrer vers Doumrou dans l’arrondissement de Kaélé et à Bindir vers le Tchad.
Et comme si cela ne suffisait pas, l’avènement de la secte terroriste Boko Haram à l’Extrême-Nord n’a pas non plus arrangé la situation des Mbororo. On estime à plus de 250 000 têtes de bœufs qui ont été contraintes à aller paître à Bindir au Tchad faute de protection des autorités camerounaises. Pire, au Nigéria 6 chefs de famille Mbororo ont été égorgés par les jihadistes et leurs cheptels confisqués. Un tableau suffisamment noir qui n’a pas laissé indifférent les membres de l’association pour le développement social et culturel des Mbororo au Cameroun (Mboscuda).
En partenariat avec International Land Coalition (ILC) et CBI10, l’association a réuni ce 6 février, les défenseurs des droits fonciers, notamment les membres des organisations de la société civile, les responsables des communautés, les professionnels des médias, les juristes. Objectif visé, trouver des voies et moyens susceptibles non seulement de les protéger ainsi que leurs biens, mais surtout de garantir leur accès à la propriété foncière en tant que peuples autochtones, minoritaires et surtout sans voix. Ce d’autant plus que bon nombre des pays africains signataires de la déclaration sur les peuples autochtones, donc le Cameroun se sont engagés dans les réformes visant à faciliter l’accès à la terre des Mbororo.
Autre problème de la communauté Mbororo de l’Extrême-Nord identifié : la sous-scolarisation. Sur ce point justement, il a été décidé d’intensifier la sensibilisation sur l’importance de l’éducation des jeunes et surtout des jeunes filles. Car, malgré quelques efforts encore mitigés, la communauté Mbororo reste la moins scolarisée dans tout le pays. Selon un inventaire, non exhaustif toute la communauté Mbororo du Cameroun ne compte qu’à ce jour 4 enseignants d’universités, deux magistrats, dans la plupart originaires du nord-ouest. Si dans le Nord, l’on note une seule fille Mbororo étudiante en Master 2 droit à l’université de Ngaoundéré, l’Extrême-Nord fait figure de derniers sur l’échiquier.
D’où l’appel d’Adamu Yusufu, secrétaire général de Mboscuda. «Nous devons envoyer nos enfants à l’école. C’est la seule façon pour nous d’avoir la parole et de restaurer l’image et la dignité de l’homme Mbororo. Si nous sommes aujourd’hui marginalisés, violentés, méprisés et peu écoutés, c’est parce que nous ne sommes pas allés à l’école. L’école reste le seul moyen pour le salut du peuple Mbororo,» a-t-il indiqué. En marge de cette rencontre, une série de recommandations ont été formulées à l’endroit des pouvoirs dans le sens du respect des droits des peuples Mbororo et aussi la création d’un observatoire national des défenseurs des droits de l’homme et des droits fonciers.