Mais le printemps reviendra. On videra les marais en mars et on les assèchera. Espérons qu'alors la crise sanitaire sera derrière nous. Et n'oublions pas que le sel est un puissant désinfectant, qui entre notamment dans la formule de l'eau de Javel.
L'histoire du sel remonte loin. Les soldats romains été remerciés de leur travail par une plaque de sel qu’on appelait le salarium. La création de la gabelle, un impôt sur le sel, remonte à 1340 et elle fut appliquée jusqu’en 1946. Les marais salants de Saintonge ont existé dès le Moyen Âge. Pourtant l'activité oléronnaise est moins connue. Il n'y a plus que 10 marais en exploitation contre 300 à Guérande.
Si au
XVIIe siècle un quart de l'île était exploité, surtout dans le nord, il y eut des vicissitudes historiques. Notamment après la révocation de l’Edit de Nantes en 1685 qui a provoqué le départ des protestants pour la Hollande. Plus tard le chemin de fer a infligé un gros coup dur parce que le sel méditerranéen était moins cher. La production française baissa énormément au profit de l'augmentation des sels portugais et espagnols. La morue a sauvé (momentanément) le sel d’Oléron.L'activité disparut quasi totalement alors qu’elle était auparavant l’activité principale. Les marais ont majoritairement été transformés en claires. Les habitants, sauniers l’été, ostréiculteurs l’hiver ont fini par muter et se consacrer uniquement à l'élevage des huitres. Ils ont mis au point une technique d’affinage unique au monde qui permet d’obtenir un mollusque plus charnu, dont la couleur verte est obtenue par la présence d’une algue bleue.Le travail suit une saisonnalité bien rythmée. L’hiver on fait monter l’eau d’un mètre. Cette inondation orchestrée par l'homme protège la saline du froid, des pluies diluviennes et du gel qui abîmeraient les diguettes. Elle évite également l'invasion des sangliers. Fin février on videra toute cette eau par le chenal des Barques. On assèchera puis courant mars on va tout refaire, muant comme aires saunantes. Il faudra curer les aires saunantes pour retirer les dépôts de vase accumulés en hiver. Cela s'appelle "remonter le marais", une opération qui est donc réitérée chaque année. La saunaison commencera mi mai. On pourra à la fin du mois décharger une prise de sel mêlée de vase. On observera une coloration rose puis rouge pour cette première récolte.Ce n'est qu'aux environs de la mi juin que commencent les vraies récoltes. Elles se poursuivront jusqu’à la mi-septembre. Il n'y a pas de date fixée d'avance. Le pire ennemi sera l’orage qui bloquera l'exploitation pour une quinzaine de jours. Autant dire que c'est catastrophique quand de fortes averses se produisent fin août. Il y a eu de gros orages le 15 août et la récolte fut suspendue pendant 10 jours.Vous comprendrez donc que les saisons peuvent être très mauvaises, comme en 2007 avec seulement 200 kilos de récolte ou excellentes comme l’an dernier avec 22 tonnes de gros sel et 3 tonnes de fleur de sel. Il est donc utile d’avoir trois ans de stock.On peut considérer qu'en année moyenne on récolte à peu près 1, 5 tonnes de sel par aire mais il faut accepter de travailler une douzaine d’heures par jour, et généralement pieds nus, même si on portait parfois des bottes composées de sabots de bois et de toile imperméabilisée au goudron, remplis de paille (numéro 6 sur la photo ci-dessous), fixés sur un patin de bois pour ne pas s’envaser (numéro 5).