Un certain Choutov, Russe exilé à Paris, vient de rompre avec sa jeune amie Léa. Il décide alors, pour tromper sa solitude et son chagrin, de retourner à Leningrad, redevenue Saint-Petersbourg, où il a vécu autrefois, dans une autre vie... Mais la ville qu'il découvre ne ressemble plus en rien à celle qu'il a connue ; elle fête les 400 ans de sa fondation - on est donc en 2003... Iana, la femme qu'il avait connue est devenue une digne représentante de la nouvelle classe dirigeante : riche, branchée, constamment overbookée, totalement superficielle... et prête à piétiner tout ce qui peut rappeler le passé.
Elle a racheté toute une série d'appartements communautaires, pour en faire un unique loft ; mais on a "oublié" de faire déménager un vieillard mutique et grabataire, qui doit, le lendemain même, être emmené dans un hospice... Choutov se trouve alors contraint de garder le vieil homme pour sa dernière nuit chez lui.
La seconde partie du roman nous transporte dans une toute autre Russie, car le vieillard, Volski, devinant peut-être une âme sœur en Choutov, se révèle parfaitement lucide, et pas du tout mutique : il va raconter sa vie, du siège de Leningrad, durant lequel, affamé et mourant de froid, il chantait avec sa compagne, Mila, dans un théâtre, malgré les bombardements, et la mort qui rôdait. Plus tard, la troupe ira accompagner de son champ la bataille finale de Leningrad... Il ira ensuite combattre sur le front, à Koursk notamment ; Mila quant à elle, pour sauver des orphelins de la faim, sombrera dans la prostitution. Après la guerre, ils se retrouveront, et vivront un bonheur bref mais intense dans une maison en ruine... avant que l'horreur de l'histoire ne les rattrape : les "autorités" (Staline, en l'occurrence)iront jusqu'à vouloir détruire les pauvres reliques du siège de Leningrad, Volski sera envoyé dans un camp, et Mila sera fusillée.
Mais cette voix dans la nuit fait comprendre à Choutov qu'il ne pourra jamais vivre dans cette nouvelle Russie, qui oublie son passé et se jette à corps perdu dans une nouvelle barbarie.
" Choutov sent soudain avec violence qu'il n'appartiendra jamais à ce monde russe qui renaît maintenant ("Tant mieux !" se dit-il) dans sa patrie. IL restera jusqu'à la fin dans un passé de plus en plus méprisé et de plus en plus inconnu d'ailleurs. Une époque qu'il sait indéfendable et où pourtant vivaient quelques êtres qu'il faudra coûte que coûte sauver de l'oubli."
Tout est dit...