Jean jacques rousseau l’infâme ?

Par Abdesselam Bougedrawi @abdesselam

JEAN JACQUES ROUSSEAU L’INFÂME ?

Jean-Jacques Rousseau est un auteur à part dans la pensée du XVIIIe siècle. À chaque fois qu’il écrit un livre, il sera calomnié, pourchassé, traqué par la fédération suisse, mais de même par d’autres philosophes tels que Voltaire et les gens de l’encyclopédie. Il ne s’agit pas d’une simple rivalité entre philosophes, il s’agit de comportements graves de la part de Voltaires et de ses amis qui auraient pu conduire à son emprisonnement, voire compromettre sa vie.

On a traité Rousseau de tous les noms, de malfaiteur, responsable de sédition. Un penseur célèbre du début du XXe siècle a même dit de lui que sa place était à Sainte-Anne qui est un hôpital psychiatrique. Récemment, un philosophe médiatisé a repris la même hargne contre lui. C’est souligner combien cet auteur occupe une place singulière dans la pensée du XVIIIe siècle, et dans la pensée tout court.

Jean-Jacques Rousseau est par excellence l’homme de tous les malentendus. Premier malentendu, il n’est pas français, il est suisse. Rousseau est né à Genève, de confession protestante, sa culture ainsi que son éducation le rapprochent davantage de la pensée allemande que de la pensée française.

Rousseau et Voltaire ne sont pas des amis. Beaucoup de personnes croient qu’ils le sont du fait de cette célèbre chanson que chantait Gavroche dans les misérables :

Je suis tombé par terre, c’est la faute à Voltaire

Le nez dans le ruisseau, c’est la faute à Rousseau

Je ne suis pas notaire, c’est la faute à Voltaire

Je suis petit oiseau, c’est la faute à Rousseau

Jean-Jacques Rousseau contrairement à Voltaire était un homme simple qui n’aimait pas les richesses, qui n’aimait pas le théâtre, qui n’aimait pas les opéras. Il préférait les fêtes conviviales avec des amis, il préférait de même délaisser les salons parisiens mondains pour des promenades à la campagne.

Jean-Jacques Rousseau a été, comme cela était déjà dit, traqué, pourchassé, à tel point qu’il ne pouvait pas revenir chez lui à Genève sans se faire arrêter. Une majeure partie de cette hostilité est due à sa pensée même.

Ainsi, à un homme qui lui disait que lorsqu’il serait riche, il ferait beaucoup de bien, Rousseau rétorque : vous m’avez bien dit ce que vous allez faire si vous deveniez riches, par contre je voudrais savoir comment vous allez faire pour devenir riches.

Ici, Rousseau dit pratiquement à cet homme que vous allez user de moyens malhonnêtes pour vous enrichir

Il y avait à Paris des commerces de luxe, vente de bijoux, vente de meubles de luxe. Les commerçants du luxe avaient cet argument : avec nos commerces nous faisons vivre bien des miséreux à Paris.

Jean-Jacques Rousseau ne manque pas de répondre : oui vous faites vivre quelques personnes à Paris, mais vous plongez dans la misère des centaines de personnes dans les campagnes.

Quand on fait pareilles réponses à des gens qui sont heureux de dire qu’ils font du bien, vous ne manquez pas d’en faire des ennemis. Et même le clergé s’est allié avec Voltaire le « mécréant » pour nuire à Rousseau le « croyant ». Quand il est question d’argent, les convictions restent au placard.

Justement, du fait qu’il le fut croyant, à l’opposé de la pensée majeure anticléricale, partager du reste les encyclopédistes, Rousseau sera dénigré par Voltaire, d’Alembert et Diderot.

Pour bien comprendre les différences de pensée entre Voltaire et Rousseau, je vous propose une célèbre phrase de Voltaire :

Un pays bien organisé est celui où le petit nombre fait travailler le grand nombre, est nourri par lui, et le gouverne.

Rousseau et Voltaire sont donc aux antipodes de la pensée. Autant Jean-Jacques Rousseau détestait la richesse et aimait une vie simple, autant Voltaire aimait le profit, aimait le faste et les apparats.

Toutefois, il ne faut pas conclure hâtivement qu’il y avait le bon Rousseau et le méchant Voltaire. Il ne faut pas perdre de vue l’engagement de Voltaire dans l’affaire Callas et  l’affaire du chevalier de la Barre.

De plus, l’histoire nous montre que, ceux-là mêmes qui quelques décennies plus tard vont appliquer en partie les idées de Rousseau, vont commettre des crimes abominables après la Révolution française. La prochaine fois j’entamerai avec vous la pensée politique de Jean-Jacques Rousseau.

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