[Critique] HALLOWEEN, LA NUIT DES MASQUES

Par Onrembobine @OnRembobinefr

Titre original : Halloween

Note:

Origine : États-Unis

Réalisateur : John Carpenter

Distribution : Jamie Lee Curtis, Donald Pleasence, Tony Moran, Nick Castle, Nancy Kyes, P.J. Soles, Charles Cyphers…

Genre : Épouvante/Horreur

Date de sortie : 14 mars 1979

Le Pitch :

Le 31 octobre 1963, le petit Michael Myers assassine sa grande sœur. Après 15 ans d’enfermement en hôpital psychiatrique, il s’évade pour rentrer chez lui. Son psychiatre, convaincu qu’il s’agit du mal personnifié, se lance à sa poursuite…

LA CRITIQUE DE HALLOWEEN, LA NUIT DES MASQUES :

Grand passionné du septième-art et diplômé en cinéma, John Carpenter réalise deux films (Dark Star et Assaut) avant de se pencher sur une histoire d’horreur : celle d’un type masqué qui s’en prend aux adolescents d’une banlieue américaine paisible. Halloween est né !

HADDONFIELD, ILLINOIS

Banlieue paisible, oui et non. En effet, la ville fictive créée par John Carpenter et Debra Hill correspond à l’archétype de la bourgade rêvée pour un Américain des années 1960/1970 (et sans doute encore aujourd’hui) : des petits pavillons soigneusement alignés aux pelouses impeccables, une école de quartier, un voisinage tranquille… Seule ombre au tableau : la maison abandonnée dans laquelle un petit garçon a assassiné sa grande sœur 15 ans auparavant. Un crime qui ne tardera bien évidemment pas à faire sombrer la petite communauté dans une nuit d’horreur.

La ville est donc à elle seule un personnage du film. À l’instar de Derry (et d’autres) chez Stephen King qui offre dans ses romans moult détails, le Haddonfield de Carpenter est rendu crédible par bon nombre de plans dans lesquels les véritables protagonistes sont parfois relégués au second plan. Ces longues séquences nous permettent de nous familiariser avec les lieux et ainsi d’être propulsés au cœur de l’action dans la dernière partie du film. Cette dernière demi-heure est d’ailleurs radicalement différente dans sa mise en scène.

DES BONBONS OU UN SORT ?

En effet, la première heure du film nous est proposée en grande partie en vue subjective. Nous voyons à travers le regard de Michael Myers et sa respiration rythme l’action. C’est par ailleurs sur ses yeux que s’ouvre le film, comme pour annoncer la naissance du mythe, à travers une séquence redoutable d’efficacité qui plonge immédiatement le spectateur dans un spectacle épouvantable. La découverte du petit blondinet, à l’issue de cette séquence, n’en est que plus choquante. Ici, pas de physique ingrat ni corps à moitié déformé, Carpenter matérialise l’horreur dans le corps d’un petit garçon vêtu pour aller chercher des friandises chez ses voisins, comme pour montrer que les cauchemars les plus insoutenables sont bien souvent cachés dans notre quotidien le plus banal.

Si Halloween est indéniablement une franche réussite, c’est avant tout parce qu’il joue avec son petit budget et propose quelque chose qui se fait bien trop rare aujourd’hui : une pression croissante née de la suggestion. Ici, pas d’effusion d’hémoglobine comme on peut en voir dans des productions plus récentes et souvent moins effrayantes, Carpenter cache (dans un premier temps), mais insère dans l’esprit du spectateur la violence malsaine dont pourrait faire preuve Myers. La bande-son en est sans doute l’élément le plus représentatif : tout en simplicité, la partition composée par Carpenter lui-même accentue la tension des images et ne manque pas de donner quelques frissons.

NAISSANCE D’UN MYTHE

Michael Myers, dont la démarche glaciale rappelle fortement celle du Norman Bates de Hitchcock (pensez à la scène de la douche dans Psychose), est toutefois la pierre angulaire de ce chef-d’œuvre du slasher. Son silence pesant, sa résistance incroyable, et sa capacité à rattraper constamment ses victimes en ont fait un monstre sacré du cinéma, inspirant avec plus ou moins de réussite bon nombre d’autres croquemitaines, parmi lesquels un certain Jason Voorhees. À la différence de ce dernier d’ailleurs, Myers tire sa force (du moins dans le premier film) du fait qu’on ne sache pas réellement ce qui le motive ; cela le rend encore plus effrayant, plus énigmatique, moins humain. Cette absence de motivation, ce vide d’humanité est sans cesse rappelé par l’impeccable Donald Pleasence qui est clairement le pendant humain du tueur masqué, lui aussi animé par une violence certaine ; certaine mais nécessaire semble-t-il. Jamie Lee Curtis quant à elle, est tout simplement l’incarnation parfaite de la Scream Queen : fragile, gentille, timide. Elle est l’exacte opposée de ses amies victimes de Myers mais aussi et surtout de Judith Myers (la première victime du bourreau).

Halloween premier du nom pose ainsi les codes d’une franchise naissante et même d’un sous-genre – le slasher – car même si avant lui, il y eut notamment Black Christmas, c’est bien Halloween et son tueur au masque blanc qui jouissent d’un véritable statut d’œuvre culte intergénérationnelle (on y fera notamment allusion dans Scream près de vingt ans après). Le sprint final oppressant, généré par une mise en scène différente de la première partie du film n’y est pas pour rien : plus question de voir à travers l’œil de Myers l’observateur, le spectateur est à présent aux côtés de ses victimes et ce, jusqu’à ce dénouement qui nous donne envie d’enchaîner rapidement avec la suite.

En Bref…

Ses quelques notes glaçantes, son masque livide et sa mise en scène maîtrisée ont permis à Halloween et son petit budget de véritablement lancer la mode du slasher tout en intronisant le monstre sacré qu’est aujourd’hui Michael Myers. Souvent imité, mais jamais égalé, La Nuit des masques reste, plus de 40 ans après sa sortie, un classique indémodable et est aux slashers, ce qu’est L’Exorciste est aux films de possession…

@ Kévin Lefebvre

Crédits photos : Opening Distribution
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