Pour la sénatrice PCF, Laurence Cohen, l’exécutif récolte les fruits d’une politique basée sur la compétition, au détriment de la coopération.
Quel est votre regard sur la stratégie vaccinale du gouvernement ?
Laurence Cohen : J’ai interpellé Jean Castex au Sénat et mes critiques portaient sur le fait qu’après le fiasco au niveau des masques, et puis de tests, tout le monde constate que la France est en queue de peloton en terme de vaccination. Une fois de plus, le gouvernement n’utilise pas les bonnes méthodes. Il préfère confier la stratégie vaccinale à un cabinet privé (McKinsey) qui fait 10 milliards d’euros de chiffre d’affaire et facture ses honoraires à 130 000 euros par semaine. J’ai également interrogé Olivier Véran sur la manière dont cela allait être financé et il m’a répondu que la somme sera prélevée sur le budget de son ministère. Il n’y a aucune transparence, on ne connait pas les recommandations de ce cabinet. Il est évident aujourd’hui que ce sont les doses de vaccin qui manquent, même si les conditions de conservation sont à prendre en considération.
Quelles sont selon vous les marges de manœuvres du gouvernement face aux multinationales qui commercialisent ces vaccins ?
Laurence Cohen : La mise sur le marché de plusieurs vaccins est une excellente nouvelle, mais la course effrénée des laboratoires a d’abord été guidée par le profit. Quand Sanofi sera-t-il contraint par le gouvernement à participer à l’effort collectif de production des vaccins ? Quand sera mis un terme à cette politique de suppression d’emplois dans la recherche publique et le développement ? Il est également urgent de permettre la distribution de doses à prix coûtant. Et nous devons lutter contre la logique de profit qui s’est mise en place avec la pandémie, comme nous essayons de la faire avec nos partenaires au sein de l’Union Européenne. Nous proposons également la création d’un pôle public européen du médicament et de la recherche : la crise sanitaire a démontré à quel point nous avons perdu toute souveraineté, nationale ou européenne, face aux défis posés par la Covid-19.
Comment pourrait-on favoriser la mutualisation et la coopération ?
Laurence Cohen : Si nous voulons protéger les populations, il faut que le vaccin soit dans le domaine public, et que les pays riches ou pauvres soient traités de la même façon. C’est ce qui fera toute la différence, car la protection des uns garantit celle des autres. Nous revivons aujourd’hui, avec les vaccins, ce qui se passait au début de la pandémie avec les équipements de protection comme les maques, les gants et les blouses. Le gouvernement a clairement ancré son action dans une politique de compétition au lieu de la coopération et de la solidarité.
Entretien réalisé par Marc Miramon