Pour son deuxième long-métrage, David Victori frappe fort : No Mataras, Cross The Line en français, s'est vu nominé dans quatre catégories aux Goya Awards. Distribué en France par Wild Side, ce film retrace la fulgurante descente aux enfers de Daniel, jeune garçon sans histoires, suite à un concours de circonstances malheureux. À coups de plans séquence ébouriffants, le réalisateur fait sombrer son spectateur dans un cauchemar haletant qui paraît... étonnamment crédible.
Daniel, la petite trentaine, vient de perdre son père. Pour l'aider à reprendre du poil de la bête, sa sœur lui offre un tour du monde. La veille de son départ, il rencontre Mila, jeune femme particulièrement instable, qui va totalement perturber le cours des événements.
Lorsque je me suis assis pour travailler sur ce qui allait devenir cette histoire, une question a littéralement allumé la mèche de mon imagination : comment un " bon gars ", citoyen sans histoire, une personne ordinaire comme nous tous, pourrait-il tuer quelqu'un ? David Victori
Entre tatouage improvisé, meurtre et combat à mains nues, cette nuit changera probablement le cours de sa vie. Cauchemar dans un univers presque cyberpunk, cette œuvre magistralement filmée et interprétée se dévore d'une traite.
From dusk till dawn
Avec son affiche qui ressemble à la couverture d'un album de synthwave, Cross The Line pourrait presque passer pour une science-fiction. Eclairé par beaucoup de néons aux couleurs crues et vives, le film se dote d'une identité visuelle remarquable. La transition entre l'intérieur de l'appartement du père, clair et traditionnel, et celui de Mila, sombre et pourvu d'une plantation de marijuana, souligne la différence entre les univers où Daniel évolue. Tout commence de jour, dans un quartier froid et banal, pour finir au bout de la nuit, dans un festival de couleurs chez la jeune femme.
Si l'univers visuel se révèle extrêmement travaillé et symbolique, la dimension sonore contribue aussi largement à intensifier le film. Les sons étouffés, les sensations d'oreilles bouchées pendant les combats, les musiques électro stressantes... Aucun détail ne semble laissé au hasard.
Master of plan séquence
Le réalisateur est (...) un narrateur qui dispose de nouveaux outils pour construire une histoire grâce à l'image et au son (et notamment la musique), et au rythme, qui permettent de décupler ces sensations et d'immerger le public dans une expérience inoubliable. David Victori
Entièrement filmé en , Cross The Line parvient à faire monter la tension et la maintenir à son sommet à travers une maîtrise impeccable du plan séquence. On remarque notamment celui qui retrace la fuite de Daniel après le drame chez Mila. Difficile de suivre cette scène sans transpirer avec le personnage ! David Victori nous livre ainsi un thriller passionnant qui laisse la désagréable impression que cette histoire aurait pu arriver à n'importe qui ...
Cross The Line, le mauvais endroit au mauvais moment
D'une vie normale et bien réglée au chaos le plus total, il n'y a qu'un pas... cette petite phrase pourrait constituer la morale de Cross The Line. Daniel, archétype du garçon timide sans histoires, se retrouve piégé dans un engrenage effrayant à cause de sa simple gentillesse. L'enchaînement rapide des événements appuie le caractère inéluctable de la situation. En acceptant de dépanner Mila, Daniel finit au milieu d'une bagarre à main nues dans un couloir sombre.
Une histoire qui ne serait peut-être pas aussi marquante sans les exceptionnels acteurs qui l'interprètent. Milena Smit se révèle excellente dans le rôle de la jeune fille instable et perturbée, oscillant entre femme fatale et ado attardée. Quant à Mario Casas, déjà éblouissant en Angel dans Irrémédiable, il livre une performance remarquable.