C'est une histoire qui n'avait pas super bien commencé, et pourtant ! C'est l'histoire d'un parcours compliqué mais dont je peux être fière. C'est notre histoire à nous, à ma petite dernière et moi, une page qui se tourne non sans émotion : une histoire d'allaitement.
5 mois et demi. C'est le temps pendant lequel j'aurais donné mon lait à mon bébé, alors que je n'y croyais pas plus que ça. Il faut dire que c'était plutôt mal parti et que j'avais des bagages assez lourds à porter à ce sujet. Que j'ai longtemps été très dure envers moi-même et nos " résultats ". Et puis, maintenant qu'arrive la fin du sevrage, l'heure est à la reconnaissance et à l'apaisement.
Il y a quelques jours j'ai donné le sein pour la dernière fois. Au fond de moi je savais que c'était surement la dernière tétée, cela n'avait plus rien de " nutritif " depuis un petit moment déjà. C'était devenu des tétées câlins, un moment à nous, et j'appréciais (enfin) vraiment l'allaitement. Mais rapidement, bébé a commencé à pleurer de faim au bout de 5 minutes, et j'ai préféré arrêter tant que c'était encore agréable pour tout le monde.
Bien sûr j'ai pensé à tout relancer pour continuer. Relouer un tire lait, reprendre du fenugrec et des tisanes, stimuler pour avoir une dernière chance. Cette dernière chance, je me l'étais déjà donnée au moment de la diversification en achetant justement des galactogènes et en relançant la machine un petit peu pour tenir quelques semaines de plus.
Et c'est ce qu'on a fait. Avec le recul, je sais que je ne veux pas " forcer ". Que c'est le bon moment pour moi, pour nous. Certains trouveront ça court, mais je pense que quand le temps aura passé, j'aurais la conviction encore plus forte que c'était le timing parfait. Pour l'instant, les émotions me submergent un peu, mais je me sens sereine, en paix avec mon choix. J'ai la sensation d'avoir réussi.
J'ai passé une heure à regarder toutes les photos et stories d'allaitement faites depuis presque 6 mois. Je me suis remémorée toutes ces étapes qui ont fait notre histoire d'allaitement pour refermer ce livre-là. J'ai pleuré (je pleure encore là, maintenant, mais ça fait partie du process chez moi), j'ai souri, je me suis dit " si tu avais su " à chaque souvenir d'une embûche qui aurait pu tout stopper.
La rencontre le premier jour à la maternité d'un auxiliaire de puériculture qui m'a tout de suite prévenu qu'il fallait lâcher la pression et vivre au jour le jour cet allaitement. Que c'était ok de ne pas aimer ça, et qui m'a mis au courant de certaines difficultés possibles au début, en particulier la nuit de Java ! Il a d'ailleurs demandé à monsieur de rester avec moi cette nuit-là, et je remercie encore ce monsieur d'avoir eu cette idée.
La fameuse nuit de Java justement, où j'ai fini par sortir les bouts de sein parce que la montée de lait rendait la tétée impossible pour bébé. Ces mêmes bouts de sein que j'ai maudi des mois durant, les rendant responsables d'un début " du mauvais pied ". Les pics de croissance qui s'enchainaient, les jours et les nuits passées au lit à allaiter alors que le reste de la famille vivait sa vie de l'autre côté de l'appartement.
Et puis les remontrances de la conseillère en lactation sur le poids de bébé, son reflux, son intransigeance quand je parlais, épuisée et démoralisée, de passer au mixte ou de sevrer. Ce qu'elle qualifiait je cite de " grosse connerie ".
Avec le recul je ne lui en veux pas. Mais ces mots m'ont fait mal et ils auraient pu tout me faire abandonner. Au lieu de ça, j'ai persisté et j'ai continué de tirer mon lait pour compléter mon bébé au poids plume, à bout de force et entre deux séances d'hurlements en écharpe de portage. Je ne pouvais pas m'asseoir pour manger, alors pour tirer mon lait 8 fois par jour... Mais je l'ai fait, quand même, souvent sur un sein pendant que bébé tétait l'autre avec difficulté et tapait dans le biberon vissé à la téterelle, la nuit quand tout le monde dormait, le soir quand bébé hurlait dans les bras de son père. Je récoltais de misérables millilitres qui sont vite devenus insuffisants.
Il y a aussi eu cette consultation avec un généraliste qui a décrété que je devais stopper l'allaitement. Celle du lendemain avec un pédiatre qui a tout de suite rectifié que le poids de bébé n'était pas si inquiétant et que mon allaitement pouvait se poursuivre. Et qui, au passage, a enfin accepté d'entendre et traiter le reflux de mon bébé.
Tellement de culpabilité, de fatigue, de larmes, de questions durant ces 6 semaines en allaitement exclusif... Je me dis toujours que si j'avais su, j'aurais pu m'accrocher, mais à un moment donné je n'y arrivais plus, et mon corps non plus. La mort dans l'âme je suis passée à l'allaitement mixte, option que l'on m'avait déjà présentée avec bienveillance mais que je rejetais en bloc jusque là.
J'ai cru que c'était le début de la fin. Mais je me trompais tellement ! Je sais que j'ai eu de la chance que Bébéloute accepte ça, que mon corps se remette à produire du lait en bonne quantité et que mon esprit finisse par s'apaiser. Tout a coulé de source après ça. Cette solution dont je ne voulais pas a fait durer les choses plus longtemps : je suis persuadée que j'aurais tout lâché et sevré bébé si je n'avais pas saisi cette rampe là. Alors oui, ce n'est peut-être pas le meilleur choix mais ça a été le mien et c'est celui qui nous a réconciliées Bébé et moi avec l'allaitement.
A partir de ce moment là, de ce lâcher prise, j'ai réussi à virer ces fameux bouts de sein. Et tout est reparti. Plus de tirage de lait, un seul biberon le soir pour compléter, un bébé qui grossit d'un seul coup... Zéro effet sur le reflux par contre, mais ce n'était pas grave. J'allaitais encore, malgré tout.
3 mois, 4 mois, 5 mois... On a fini par dépasser le moment de la diversification précoce alors que je n'y croyais pas. Chaque jour était un jour de gagné. Jusqu'à la dernière baisse de lactation après le pic des 4 mois et demi (je ne savais même pas qu'il y en avait un) et le constat que je n'avais pas envie de " me battre " une nouvelle fois. J'avais réussi à atteindre mon but, à avoir des tétées sereines avec bébé, si ça devait s'arrêter là, c'était OK.
J'ai tout de même pris des traitements doux pour continuer à avoir du lait le plus longtemps possible. Et nous voilà à plus de 5 mois et demi.
C'est terminé, et évidemment que je suis un peu triste. Mais aussi fière. Et j'ai envie de choisir ce sentiment là tout en reconnaissant l'émotion face à ce parcours. Enfin, enfin, j'ai allaité mon bébé, après 2 échecs qui me faisaient encore mal des années après. Bien sûr, je ne l'ai pas fait pour compenser, mais après deux allaitement foireux j'avais si peur de ne pas y arriver... Je me sens à ma place, et je chéris tous ces souvenirs.
Alors je remercie la moi d'il y a quelques semaines de s'être accrochée et d'avoir tout tenté. Et puis évidemment je remercie mon bébé d'avoir su s'adapter à tout : le biberon, la pipette, le lait en poudre, le sein avec ou sans bouts de sein... Je me rends compte avec le recul que ça a du être très compliqué pour elle, peut-être plus encore que pour moi. Mais je suis contente d'avoir su me remettre en question et d'y avoir cru.
Mon histoire d'allaitement a été semée d'embuches et j'ai souvent cru que ça allait mal finir. Et puis, finalement, ça se finit oui, mais bien. Ce lien là, j'ai pu le connaitre un bref moment et je ne l'oublierai pas. Et je referme le livre (presque) sans aucun regret.