L’armée française a perdu une guerre. Celle des choix budgétaires. Derrière ceux-ci, motivés par des prétextes de professionnalisation et de rationalisation ce sont ses liens avec la Nations qui sont fortement entamés. Avec la suppression du service militaire elle avait perdu son rôle d’intégrateur. Avec la fermeture de ses casernes elle abandonne son rôle dans l’aménagement du territoire. Le choc est rude : 54 000 emplois de supprimés et une cinquantaine de site de fermés.
Le silence contraint de l’armée lui coûte cher, presque 17 % de ses effectifs. Quelle autre institution aurait accepté une telle saignée ? Certainement pas l’Education Nationale. Ramené aux effectifs de ce ministère cela reviendrait à se séparer de plus de 200 000 collaborateurs. On imagine aisément la révolution que ne manquerait pas de générer une telle annonce.
La comparaison n’est pas innocente. L’école et l’armée ont été pendant des décennies les piliers de la république en offrant du savoir et du brassage culturel à des populations très diverses. Si l’on omet la face guerrière, le service militaire a longtemps été synonyme de rencontre avec la modernité. Notamment pour une France paysanne obligée pour l’occasion de quitter ses campagnes et de se frotter bon gré mal gré à une institution qui outre l’enseignement des arts de la guerre imposait des règles de vie communes et aussi d’hygiène. Bref, un véritable creuset républicain qui fait aujourd’hui tant défaut.
Si la France a changé, l’adaptation proposée ne semble pas à la hauteur. La vraie question qui n’est pas posée est de savoir quel effort notre pays est prêt à acquitter pour tenter de garantir sa sécurité. On ne peut pas, comme c’est le cas, poser le constat que les impératifs stratégiques ont changé, que l’ennemi n’est plus à l’Est mais que les nouvelles menaces, à commencer par le terrorisme ou la dissémination nucléaire, sont partout, en diminuant dans le même temps les moyens puisque le but principal est de réaliser 2 milliards d’économies par an.
Pour faire avaler la pilule, les communes concernées devraient bénéficier d’un saupoudrage de 420 millions selon des critères non connus. Des mesures fiscales, autrement dit des recettes en moins pour l’Etat, sont annoncées à hauteur de 350 millions. Enfin, la région Grand Est particulièrement sinistrée devrait bénéficier d’une enveloppe spécifique de 620 autres millions.Le choc économique pour les territoires concernés, volontairement sous-évalué par le gouvernement, sera très important. Une nouvelle fois, on imagine le séisme qu’aurait crée une telle annonce si elle avait été faite par un grand groupe industriel. L’Etat aurait été le premier à s’en émouvoir et à réclamer un plan d’accompagnement à la hauteur.
Principaux concernés les militaires se trouvent particulièrement démotivés par une réforme perçue comme ayant été élaborée sans eux et contre eux.
Nicolas Sarkozy et son gouvernement auront préféré attendre la période estivale pour révéler la carte définitive de la France sinistrée. Un bon tempo politique, juste après le Congrès pour éviter toute sanction des élus concernés, mais un contre-temps économique. La fin de l’année 2008 et l’année 2009 devraient être marquées par un très fort ralentissement, voire une période de récession.