Alors que l’opinion attendait avec une sorte d’appréhension les options que le chef de l’État mettrait sur la table pour décrisper la tension politique, « l’homme lion » n’a pas dérogé à sa tradition.
En consacrant une partie essentielle de son message sur l’état de la démocratie, Paul Biya a de manière subreptice répondu aux deux exigences du leader du Mrc. En ce qui concerne la demande de la révision consensuelle du système électoral, mise sur la table aussi par plusieurs missions d’observation des élections au Cameroun, en l’occurrence lors de la présidentielle d’octobre 2018 et du scrutin couplé, législatives et municipales, du 9 février 2920, le numéro un camerounais n’a pas fait la fine bouche. C’est bien compris. « A ceux qui critiquent les imperfections de notre démocratie, je réponds que nous n’avons eu que quelques décennies pour la mettre en place. Les grands pays démocratiques, de leur côté, n’y sont parvenus qu’au bout de plusieurs siècles marqués par des guerres, des révolutions, des guerres civiles et même des dictatures », a asséné Paul Biya, déterminé d’en découdre avec les récriminations qui fusent de l’intérieur du pays et de la diaspora, principalement des pays occidentaux. C’est une autre façon de rappeler à ces pays démocratiques de revisiter leur histoire politique avant d’émettre des critiques à son action politique, serait-on tenté de croire.
Il a lâché le temps qui leur a été imparti aux grandes démocraties pour en arriver là : « plusieurs siècles ». C’est exactement comme s’il leur disait, ce qui vous a pris des siècles, je n’en suis qu’à quelques décennies ! En clair, Paul Biya demande aux Occidents de le laisser tranquille, qu’il ne va rien changer sur la conduite de la démocratie au Cameroun en suivant les différents diktats. Il va de ce fait plus loin en rappelant à ses concitoyens que le bonheur démocratique est à venir, sans toutefois fixer une quelconque date. « Pour ma part, je suis conscient de ce qui reste à faire. Mais j’ai la conviction que nous sommes sur la bonne voie et que bientôt, nous pourrons tous être fiers de nos avancées démocratiques », souligne Paul Biya dans son adresse à la Nation.
Quid du cessez-le-feu dans le Noso !
En suivant Paul Biya le 31 décembre déroulé sur le Noso, on comprend tout de suite comme il l’a toujours dit du reste, qu’il ne saurait avoir une quelconque assise ou dialogue avec les sécessionnistes. Au cours de son message, il a mis en avant deux faits qui justifient cette impossibilité d’un dialogue. En premier lieu, les sécessionnistes à ses yeux ne sont que des soi-disant, car « ils sont en réalité des assassins, qui plus est, des assassins d’enfants innocents ». C’est dire ici tout le mépris que le chef de l’État nourrit à leur endroit. « Assassins d’enfants », comme pour traduire toute sa phobie de parlementer avec ceux qui se disent sécessionnistes. En plus de ceci, il en appelle à la responsabilité des « pays amis » qui hébergent les financiers des bandes armées qui opèrent dans les deux régions. Dans la même foulée, il a indiqué que le « gouvernement n’a jamais cessé d’apporter la preuve de sa volonté d’ouverture et de dialogue » en libérant les prisonniers sécessionnistes ou tout simplement en facilitant leur réinsertion dans la société.
Comme on le voit, le numéro un camerounais n’est pas dans la posture d’une quelconque négociation. Ceux qui pensaient qu’on était sorti de l’auberge dans la crispation politique entre le pouvoir et le Mrc, devront mettre de l’eau dans leur vin, car rien n’a changé. Maurice Kamto parle de poursuivre avec son programme de résistance national pendant que les Américains font des pressions plus fortes sur Yaoundé pour un dialogue inclusif avec les sécessionnistes.2021 s’ouvrent donc sur les chapeaux de roue, une fois le cycle électoral amorcé en 2018 bouclé le 6 décembre dernier. Que fera donc Paul Biya pour juguler toutes ces antagonismes? Cette question doit être pour l’heure, pressante à Etoudi.