Rappelons qu’il n’existe toujours pas de véritable défense européenne parce qu’en 1954, dans un seul Etat, la ratification par le Parlement d’un traité pourtant signé par les six Etats membres de l’époque a été empêchée par des combinaisons de politique politicienne. Merci Pierre Mendès-France, merci Edouard Herriot, merci Jacques Duclos, merci Charles de Gaulle!
Rappelons que jusqu’en 1979, le Parlement européen n’était pas élu au suffrage universel parce que dans la Communauté élargie à neuf Etats, seule la France ou plutôt son Président s’y opposait!
En 2005 un projet de Constitution européenne, signé par tous les gouvernements de l’Union élargie à 25, après de laborieuses négociations, a été abandonné alors qu’il avait déjà été ratifié par plus de la moitié des Etats membres, uniquement parce que dans deux Etats le résultat d’un référendum a été négatif.
Et enfin cette année, un nouveau projet de réforme des institutions, le traité de Lisbonne, se trouve compromis à cause vote des Irlandais, dans le seul Etat où le référendum était obligatoire alors que tous les autres s’étaient engagés à une ratification par voie parlementaire et alors que plus de la moitié d’entre eux ont déjà accompli cette formalité. Donner raison à un seul Etat sur 27, un Etat insulaire dont la population est très inférieure à la moyenne des régions françaises, et alors que plus de la moitié des électeurs se sont abstenus, est-ce cela la démocratie? Admettrait-on qu’au niveau national le Conseil régional de Corse décide de soumettre à référendum le projet de révision de la Constitution de la République française, et qu’un vote négatif des Corses suffise pour enterrer le projet? Que ce soit les Irlandais ou les Corses, je comprends très bien ceux qui veulent défendre leur langue et leur identité, mais dans une démocratie peut-on admettre que l’opposition d’un seul suffise à tout bloquer, à arrêter le progrès?
Le pas qu’ont
franchi les Etats-Unis d’Amérique peu après leur indépendance, puis la Suisse au dix-neuvième siècle en devant une véritable fédération dans les faits et non plus une simple confédération, tôt ou
tard il faudra que l’Union européenne le franchisse si elle veut devenir une grande puissance au lieu de subir la mondialisation. L’Union européenne restera ingouvernable tant que les rapports
entre les Etats membres continueront d’être régis par les règles du droit international, qui impliquent que les décisions soient prises à l’unanimité. A défaut d’un accord des 27, bientôt 28, il
faut sans attendre envisager une Europe fédérale avec ceux qui répondent à certains critères, notamment l’appartenance à la zone Euro et à l’espace Schengen, sans toutefois remettre en cause
l’acquis communautaire mais en laissant aux autres le temps de s’adapter avant de pouvoir s’intégrer complètement. Cela ne remettrait pas en cause l’identité française, car s’il faut renoncer à
une partie de notre souveraineté, mieux vaut que ce soit dans le cadre d’une Europe fédérale, démocratique, et non au profit d’intérêts étrangers. Comment se fait-il que le Québec, qui n’est pas
un Etat souverain, défende notre langue avec plus d’efficacité que la France?
Noël Marchal