Charles Despiau décolle, tiré par l’Université
Paris. Vente aux enchères de sculptures chez Crait Muller à Drouot le 27 novembre 2020. Une dizaine de lots sont signés Charles Despiau. C’est beaucoup, d’habitude on voit passer un ou deux de ses bronzes par-ci par-là . Et de rares dessins. D’habitude aussi, les estimations des commissaires priseurs se révèlent assez fiables pour notre sculpteur et sont rarement dépassées, cette fois, c’est nouveau, elles s’envolent :
Une terre cuite d’Assia en pied, « Assia, sublime modèle », 86 cms, estimée entre 5000 et 6000 euros est adjugée à 14 800 euros, prix marteau, donc au final avec les frais dans les 20 000 euros pour l’acheteur. Soit 4 fois le prix du marché.
Une petite tête d’Assia, plâtre de 19 cms, estimée entre 600 et 800 euros se vend 3100 euros, comprendre dans les 4500 avec les frais.
Un nu assis, plâtre de 36 cms, estimé entre 600 et 800 euros part à 3600 euros donc à peu près 5000 euros au final. C’est-à-dire 6 à 7 fois l’estimation de départ.
Je me souviens il y a trois ou quatre ans d’un merveilleux bronze, pas une terre ou un plâtre, un bronze de 80 cms au moins, groupe de deux enfants en pied, Les enfants de la rue Batelière, œuvre de jeunesse de Despiau, parti tout doucement à 6000 euros. Son heureux propriétaire a aujourd’hui fait plusieurs fois la culbute.
Charles Despiau sort enfin du purgatoire. Je sais pourquoi. Son œuvre vient de faire l’objet d’une thèse de doctorat très documentée et sérieuse, bien diffusée aussi. Dans le catalogue de la vente parisienne à Drouot, cette thèse est citée et fait autorité à chaque lot. Alors « New-York » se décide comme le dit le commissaire priseur, alors le marché de l’art confiant car instruit par la faculté emboîte le pas.
La pauvre université et ses modestes chercheurs, ses humbles sherpas de la recherche, soutiers de l’art, donnent de la valeur à ce qu’ils touchent. Ils ont de l’or dans les mains.
Thérèse Marsan
Notes: Charles Despiau 1874-1946, né à Mont de Marsan Assia Granatouroff, modèle de Despiau. Elisabeth Lebon est docteur en Histoire de l’art (Paris I Panthéon-Sorbonne). Elle a consacré sa thèse de doctorat au catalogue raisonné de l’oeuvre sculptée de Charles Despiau. Charles Despiau classique et moderne, Elisabeth Lebon, Atlantica, Biarritz, 2016.