Noël est passé. Et, comme chaque année, mais peut-être pas tout-à-fait comme chaque année, il y a eu des cadeaux dans les souliers, sous le sapin ou dans la cheminée. Ces objets ont souvent pris leur place dans votre vie quotidienne. Ou bien ils réapparaissent de temps en temps. Il y a des cadeaux anciens qu’on retrouve avec plaisir, ou avec nostalgie. Claude François en avait fait une chanson, Le jouet extraordinaire. Il y en a dans certains films qui font peur, d’autres qui rassurent. Mais que vivent-ils, eux, ces cadeaux ? Imaginez qu’un jour, un de ces cadeaux se mette à vous parler (pas comme le ferait Siri), en vous tutoyant puisqu’il est si près de vous maintenant, et parfois depuis longtemps. Il vous raconte sa vie, sur un meuble ou dans un tiroir. Il est plus ou moins bavard mais ce qu’il vous raconte tient au moins en quatre phrases, chacune d’elles commençant respectivement par N, O, E, L. Et, s’il y a plus de quatre phrases, les suivantes recommenceront ce cycle.
Exemple :
Nous sommes depuis tellement d’années sous tes yeux que tu ne nous vois plus quand tu passes devant notre table. Oui, notre table, celle que tu n’utilises plus et sur laquelle s’entassent des bouts de papier recouvrant peu à peu le clavier d’un ordinateur endormi. Est-ce que tu te souviens de notre existence ? Là, au moment où nous te parlons, tout te revient en mémoire. Nous ne sommes pas un cadeau de Noël puisque c’est à un autre moment que tu as hérité de nous. Ouvre la boîte en plastique transparent. Extrais-nous de notre logis, trois dés en plastique rouge accompagnés de jetons et de la règle du jeu. Lentement déplie le papier qui n’a plus de secret pour toi. Note sur une feuille deux colonnes comme au temps où tu jouais avec ton père. On n’a pas besoin de piste, tu le sais bien, nous avons toujours roulé sur les nappes ou le bois des tables. Entends comme on claque sur leur surface. Le bruit te rappelle le temps de ces échanges où gagner n'était pas l'essentiel. Nos chiffres font de chacun de nous l’égal des deux autres. Observe que le hasard qui place une de nos faces au-dessus ne modifie pas cette égalité. Essaie de nous relancer, et tu verras que nos positions n’ont aucune supériorité sur les autres. Le jeu consiste, tu t’en souviens, à nous assembler dans certains ordres. Nous passions d’une main dans une autre et nous n’avions pas alors à éviter les contacts. Occupés à jouer avec nous et à compter les points, vous n’étiez attentifs qu’au présent. Exposés dans un musée, tu as vu nos ancêtres, en os, en bois, roulant plus ou moins bien mais que tu n’as pas touchés. Les vitres les protégeaient de doigts trop curieux. Nous survivons à celles et ceux qui nous ont possédés et passons aux autres qui viennent après. Offerts à ton histoire intime, comme à celle des autres avant toi, nous restons disponibles. Énumère enfin les chiffres de nos trois faces apparentes après un dernier lancer ce soir. Lis ce que tu vois : 4, 2, 1.
C’est à vous main tenant. Mettez-vous à l’écoute de tel ou tel cadeau et écrivez-nous ce qu’il vous raconte.
Puis postez votre texte dans les commentaires ci-dessous. Merci.