Le mouvement de réduction de l'empreinte physique du secteur se trouvait déjà sur une pente ascendante au début de l'année, la crise sanitaire n'a fait que l'accentuer un peu plus, comme l'illustre, par exemple, l'annonce récente de Société Générale, qui, à l'occasion d'un rapprochement avec sa marque Crédit du Nord déclare son intention de passer de 2 100 points de vente en 2020 à 1 500 en 2025. Or, quoiqu'en disent les responsables, ces évolutions tendent à éloigner toujours plus la banque de ses clients.
Rien de très grave, en général, pour les opérations courantes, dont la capacité de les réaliser à travers les outils web et mobiles est historiquement un des premiers déclencheurs de la baisse de fréquentation. En revanche, sans même évoquer le segment des professionnels, quand il s'agit de préparer un projet important – crédit pour un achat immobilier, gestion du patrimoine… –, beaucoup de personnes restent attachées à un contact face à face avec un conseiller, qui devient donc moins accessible.
Pourtant, il existe peut-être une solution pour limiter l'impact du changement. Pourquoi ne pas généraliser le principe du banquier itinérant, qui se déplace à domicile lorsque son client souhaite aborder un sujet majeur ? Naturellement, l'idée n'est pas inédite : elle a été, entre autres, mise en œuvre par BNP Paribas Fortis, en Belgique, entre 2016 et 2017 (qu'est devenue l'initiative ?). Mais les événements de ces derniers mois donnent potentiellement une assise supplémentaire au concept et renforcent sa faisabilité.
En effet, avec la crise sanitaire, les modalités de la relation ont sérieusement évolué. Tout d'abord, la plupart des clients acceptent désormais que la rencontre avec un conseiller soit plus ou moins réservée aux questions complexes, pour lesquelles, en outre, la prise de rendez-vous préalable devient la norme universelle. Sur l'autre versant de l'équation, les collaborateurs de l'établissement disposent également de conditions favorables au développement d'une nouvelle forme d'organisation.
L'introduction du télétravail, en particulier, laisse imaginer des possibilités extraordinaires. Appliqué au personnel des agences, de manière ponctuelle ou extensive selon les institutions (et les pays), il a permis d'équiper chacun des moyens nécessaires pour assurer ses responsabilités hors des locaux de l'entreprise. Il ne doit plus manquer grand chose (des options de connexion additionnelles, un complément de sécurisation, quelques mécanismes de contrôle…) afin d'autoriser une utilisation en tout lieu.
Dans un prolongement du modèle, envisageons maintenant un rayonnement individuel des employés à partir de leur domicile (à temps partiel, le cas échéant). Grâce à leur dispersion, ils pourraient alors probablement offrir une couverture géographique plus fine que celle des réseaux des banques et, de la sorte, restaurer la proximité désirée : ils sont (presque) des voisins, susceptibles de répondre rapidement aux sollicitations, toujours prêts à rendre visite à leurs clients, sans perdre un temps précieux en transport…
En arrière-plan, c'est la raison d'être de l'agence qui mériterait d'être rappelée… et remise en cause. Car, si la centralisation des activités financières dans un espace protégé était une obligation à une époque où elles impliquaient des mouvements d'espèces (qu'il faillait stocker) et où la tenue des comptes reposait sur un livre en papier, puis sur un système accessible uniquement à travers une infrastructure dédiée, ces contraintes ont aujourd'hui disparu et rien n'empêche plus de sortir le conseil bancaire des bureaux.