L'amour sans le faire

de Serge Joncour

Roman - 310 pages
Editions Flammarion - août 2012

Après dix ans sans avoir échangé avec ses parents, Franck retourne à la ferme familiale du Lot, aux Bertranges.  C'est le lieu de son enfance, le lieu qui le renvoit aussi à son frère disparu, Alexandre. Louise est là aussi, pour quelques jours. Louise aussi a connu Alexandre par le passé, avec lui elle a eu un petit garçon. Il est là également, il s'appelle... Alexandre.

C'est un roman de Serge Joncour qui m'a un peu moins séduite que Chien Loup du même auteur, peut-être par la trop grande pudeur, ou le portrait un peu trop flou des personnages que l'on connaît assez mal. Franck et Louise sont réunis sans le vouloir totalement, autour de leurs blessures, de leurs faiblesses, autour du petit Alexandre, et autour des souvenirs. Tous deux ont hérité du passé et ont voulu lui tourner le dos. Franck a perdu le contact de ses parents agriculteurs, en partant travailler à Paris il a tourné le dos à une quelconque reprise de l'exploitation familiale, contrairement à son frère qui était pressenti pour poursuivre la vie de la ferme. 

Extrait :

"Ne pas pouvoir s'aimer, c'est peut-être encore plus fort que de s'aimer vraiment, peut-être vaut-il mieux s'en tenir à ça, à cette haute idée qu'on se fait de l'autre sans tout en connaître, en rester à cette passion non encore franchie, à cet amour non réalisé mais ressenti jusqu'aux plus intime, s'aimer en ne faisant que se le dire, s'en plaindre ou s'en désoler, s'aimer à cette distance ou les bras ne se rejoignent pas, sinon à peine du bout des doigts comme une caresse, une tête posée sur les genoux, une distance qui permet tout de même de chuchoter, mais pas de cris, pas de souffle, pas d'éternité, on s'aime et on s'en tient là, l'amour sans y toucher, l'amour chacun le garde pour soi, comme on garde à soi sa douleur, une douleur ça ne se partage pas, une douleur ça ne se transmet pas par le corps, on n'enveloppe pas l'autre de sa douleur comme on le submerge de son ardeur. C'est profondément à soi une douleur. L'amour comme une douleur, une douleur qui ne doit pas faire mal."

Louise a été recueillie peu ou prou par les parents d'Alexandre et Franck, elle a vécu longtemps dans cette ferme et les laisse à présent les grand-parents s'occuper du petit. Echouée là. Entre ces deux être à la dérive qui se raccrochent à ce rocher, il y a des interdits, des non-dits, des intimités, des pudeurs, et un garçonnet qui virevolte. 

L'écriture est belle, mais malheureusement l'histoire ne touche peut-être pas autant qu'elle devrait.

Un film, Revenir, de Jessica Palud avec Niels Schneider et Adèle Exarchopoulos s'inspire librement, très librement, de ce roman.

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