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Mon footing solstice d’hiver débute devant la grille du Château neuf, là où est né Louis XIV, le 5 septembre 1638. Son père Louis XIII y mourut en 1643. Entamé au milieu du XVIe siècle, sous le règne de Henri II, puis développé principalement sous Henri IV, le château Neuf fut la résidence royale de 1659 à 1680. Délabré au fil des années après le départ de la Cour vers Versailles, il fut saisi pendant la Révolution, puis démoli fin XVIIIe, début XIXe. Il n’en reste pratiquement plus rien aujourd’hui. Il est 8h42, heure officielle du lever du soleil, c’est parti pour le footing royal du jour… sous la pluie et dans le vent. Objectif : rejoindre Versailles à 16h56, heure du coucher du soleil.
Première étape dans le Parc de Marly-le-Roi. Louis XIV y fit construire un château pendant son règne. « J'ai fait Versailles pour ma Cour, Trianon pour ma famille, Marly pour mes amis », a déclaré un jour le roi. Le château, lieu de plaisir et de fêtes, en « petit comité » (ils étaient tout de même un peu plus que 6 à table...) fut délaissé par Louis XV et Louis XVI et fut finalement détruit lors du Premier Empire. Le parc offre toujours un superbe espace de promenade… et de footing.
Je traverse le parc et replonge vers la Seine, vers Bougival pour retrouver les traces de la Machine de Marly, inaugurée en 1684. Sa mission était de faire monter l’eau de la Seine pour alimenter Marly et Versailles. Malgré tout un système de pompes (14 pompes de 12 m de diamètre étaient présentes dans la Seine), de réservoirs et d’aqueducs qui en faisait une des machines les plus complexes de l’époque, le résultat ne fut jamais à la hauteur des espoirs.
Direction Paris. Du quartier de La Défense à la place de la Concorde, j’emprunte ce qui fut nommé l’axe historique de Paris. Une partie très monotone d’abord pour traverser Nanterre et Puteaux avant de descendre l’esplanade de La Défense, de traverser la Seine avec l’Arc de Triomphe en point de mire puis descente des Champs-Élysées.
Petit crochet par la Porte Saint-Denis, construite en 1672 par l’architecte François Blondel à la gloire de Louis XIV en l’honneur de ses victoires sur le Rhin et en Franche-Comté, puis la Porte Saint-Martin également érigée sur ordre du roi. Sur ces grands boulevards, je passe devant de nombreux théâtres. Leur rideau est resté baissé, les portes sont closes et les lumières éteintes. Sur leur fronton, les affiches témoignent de la détresse du monde culturel avec ces pièces programmées depuis des mois mais toujours en attente de leurs premiers spectateurs.
Place à la parenthèse culturelle. Durant son règne, le roi a porté une grande considération aux artistes. Parmi eux, un certain Molière. Le crochet par la Comédie Française, fondée en 1680 par ordonnance royale et résidant depuis 1799 dans la Salle Richelieu au cœur du Palais-Royal, est donc une évidence. A l’époque du Roi, on y joua des pièces de Jean Racine (Andromaque, Phèdre etc.), Pierre Corneille (Le Cid) et bien évidemment de Molière. Passage à proximité de la rue Thérèse, nommée ainsi en hommage à Marie-Thérèse d’Autriche, infante d’Espagne et première épouse de Louis XIV (un mariage diplomatique comme souvent à l’époque).
Louis XIV s’installa au Palais du Louvre en 1652 et y entreprit de grands travaux et de grands aménagements. Il est notamment à l’origine des grands aménagements de la Cour carrée. Si beaucoup purent être réalisés, le grand chantier de Versailles finira par mobiliser la plupart des forces aux dépens du Louvre. A l'image des théâtres, les portes sont closes. Impossible même de s'approcher de la Pyramide ou de traverser la Cour Carrée. La culture est sous scellée. Non essentielle !
La visite royale rive droite est donc terminée. Pour franchir la Seine, le Pont Royal est évidemment le passage le plus approprié dans cette balade historique. Troisième plus ancien pont de Paris après le Pont Neuf et le Pont Marie, il fut entièrement financé par le roi Louis XIV et ouvert en 1689.
Sur notre gauche, quelques centaines de mètres en amont, on aperçoit les tours de Notre Dame. Si Louis XIV fut couronné dans la cathédrale de Reims le 7 juin 1654, Notre-Dame de Paris tient bien évidemment une place particulière dans le règne du roi. Au début de son règne et jusqu’à son installation à Versailles (1682), il y assista à de nombreux offices et y fit entreprendre de grandes modifications souhaitées par son père Louis XIII. Deux sculptures des deux rois sont d’ailleurs présentes dans la cathédrale. Les entrailles de Louis XIII sont déposées sous une dalle de marbre noir au pied de l’autel de la cathédrale parisienne, dans un petit baril de bois.
Retour vers l’ouest par les quais de la rive gauche par le Musée d’Orsay puis, un peu plus loin, celui du Quai Branly. La succession des ponts rythme le footing. Au niveau du pont Alexandre III, un petit coup d’œil sur la gauche permet d’apprécier l’Hôtel des Invalides dont la construction fut décidée par l’édit royal du 24 février 1670 pour les invalides de l’armée de Louis XIV, notamment ceux de la guerre de Trente ans contre l’Espagne. Il fut construit sur les plans de Libéral Bruant. L'architecte avait déjà œuvré pour La Salpêtrière et est également à l’origine des premiers plans de la Place Vendôme repris ensuite par Jules-Hardouin Mansart.
Arrivé devant la Tour Eiffel, j’avais imaginé emprunter le Pont d’Iéna pour une rapide incursion sur la rive droite pour y remonter, au pied du Trocadéro, la rue André Le Nôtre, jardinier et paysagiste du roi pendant 55 ans, à l’origine des jardins de Versailles mais aussi de Vaux-le-Vicomte pour Nicolas Fouquet ou encore des Tuileries et bien sûr de la grande terrasse de mon château de Saint-Germain-en-Laye. J’avais aussi prévu de prolonger un peu le crochet pour emprunter l’Avenue Montespan, dans le 16e. Madame de Montespan, de son vrai nom Françoise de Rochechouart de Mortemart, était la favorite du roi. Sept enfants sont nés de leur relation.
Il fait déjà nuit mais Versailles m’accueille enfin. Au bout de cette interminable ligne droite de l’Avenue de Paris – un faux-plat montant en plus-, se dresse le château, « l’œuvre » de Louis XIV. Dans ce terrain marécageux, il fit bâtir ce château, aujourd’hui un des monuments les plus connus au monde. Il y installa la cour en 1682. Il y mourut le 1er septembre 1715 à Versailles, après un règne, de 72 ans (régence de sa mère Anne d’Autriche, jusqu’en 1651, comprise) !
La grande statue équestre en bronze de Louis XIV qui se dresse depuis 2009 sur la place d’Armes du château, dessinée par Pierre Cartellier (le cheval) et Louis Petitot (le roi) et fondue par Charles Crozatier en 1838, marque la fin de mon périple. Le soleil est allé officiellement se coucher depuis un moment. Au regard du temps pourri de la journée, pas certain qu’il se soit levé… Le roi est mort. Moi aussi.
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Avant la mise en place du couvre-feu, j’avais étudié un parcours un peu plus long qui devrait occuper la « nuit la plus longue de l’année ». Voici quelques étapes initialement imaginées :
. Passage au 46 Rue Bossuet, là où est mort Jacques-Bénigne Bossuet, homme d’église et précepteur du dauphin, Louis de France, fils de Louis XIV et Marie-Thérèse d’Autriche (Bossuet a également laissé une trace importante dans l’histoire pour les oraisons funèbres prononcées).
. Direction le nord-est parisien, remontée du bassin de La Villette pour aller jusqu’à la Place de l’Édit de Nantes. Si cet édit fut prononcé en 1598 par Henri IV et offrit une relative liberté de culte pour les protestants, sa révocation, en octobre 1685 relève de la politique de Louis XIV. Elle déclencha une violente répression envers les protestants.
. Remonter les quais jusqu’à l’île de la Cité, puis direction le sud pour y parcourir les rues Racine et Corneille et, juste à côté la rue Condé, autour du théâtre de l’Odéon, baptisée ainsi en raison de la présence de l’hôtel de Condé. La Maison de Condé est une branche de la famille des Bourbon. Le Prince Louis II de Condé fut d’abord un des brillants généraux du roi dans la guerre de trente ans et son défenseur pendant le début de la Fronde (1648-1653), mouvement à la fois politique et social qui bouscula la Monarchie alors que Louis XIV était encore très jeune. Sous la menace des frondeurs, il quitta même Paris clandestinement dans la nuit du 5 au 6 janvier 1649 pour rejoindre le château de Saint-Germain, pourtant très délabré et sans meuble. Le jeune roi dut dormir sur un lit de camp. Cette période marqua considérablement le roi. Par réaction contre Mazarin, Condé deviendra plus tard un farouche opposant, meneur de la Fronde des Princes, sera arrêté et emprisonné à Vincennes puis plus tard, rejoindra les troupes espagnoles avant de revenir en bonne grâce à la Cour et de combattre… les Espagnols.
. Pas très loin de la gare Montparnasse, l’Allée Maintenon rend hommage à Madame de Maintenon, de son vrai nom Françoise d’Aubigné, d’abord gouvernante des enfants naturels de Louis XIV avec sa maîtresse Madame de Montespan, puis épouse du roi en 1683 à la mort de Marie-Thérèse d’Autriche.