Les résultats de l'enquête menée par la startup rejoignent mes propres constats empiriques dans les établissements que j'ai l'occasion de « fréquenter ». Ainsi, un des hiatus les plus significatifs se révèle à la question de savoir si le concept est appréhendé comme une opportunité dans l'entreprise : en haut de la pyramide, 7 dirigeants sur 10 l'affirment… tandis que chez les « product owners », c'est-à-dire au plus près de la conception et de la réalisation des produits, ils ne sont que 45% à en convenir.
Les mêmes populations divergent également, dans des proportions similaires (avec des scores de 62% et 42%, cette fois), dans leur appréciation de la compréhension généralisée des bénéfices de la banque ouverte. Autre cas d'incohérence, si deux tiers des membres des comités de direction estiment que les avantages justifient les coûts potentiels, seuls 37% de leurs subordonnés en charge des canaux « digitaux » et mobiles, bien que convaincus de la valeur dégagée, se déclarent en phase avec leur optimisme.
Un autre décalage extraordinaire, et à répétition, méritant d'être souligné est celui qui affecte plus particulièrement les directions informatiques. Elles sont, par exemple, les plus confiantes (à 65%, contre à peine plus de 4 « product owners » sur 10) dans la disponibilité dans leurs rangs de toutes les compétences nécessaires afin de transformer les promesses en réalités ou dans la capacité à profiter de toutes les possibilités (à 67%, soit deux fois plus que leurs collègues responsables des canaux « digitaux »).
Comment expliquer des points de vue aussi opposés ? Tink n'a guère de réponses définitives à offrir, hormis de considérer que des positions distinctes dans l'organisation procurent une perspective différente, notamment sur la présence des talents nécessaires, qui pourrait conditionner les opinions sur une dimension étendue. Pourtant, les conclusions de l'étude devraient soulever de graves interrogations sur les visions stratégiques des institutions financières et sur la manière dont elles sont partagées.
Je pense, en effet, que le cœur du problème mis au jour ici est l'absence de ligne directrice commune en matière de banque ouverte. À la base, ce que recouvre ce principe est déjà spécifique à chaque entité impliquée : pour l'une (la DSI), il s'agira de déployer des API, pour une autre (opérationnelle), elle recouvre plutôt une logique de services à valeur ajoutée pour le client, et, pour une dernière (au sommet), l'enjeu, résolument politique, est de ne pas prendre du retard face à la concurrence.
Derrière ces approches bridées par les œillères des périmètres de chacun, ce qui ressort finalement est le danger d'aborder une transformation majeure de la banque sans collaboration étroite entre toutes les parties prenantes. Les dirigeants croient, sur la foi de rapports complaisants, que l'entreprise est alignée sur leur vision alors que tout le monde part en ordre dispersé, chacun avec sa mission auto-assignée. Et seul celui qui doit faire atterrir la fusée se rend compte qu'elle a explosé avant même de décoller !